jeudi 30 juin 2011

Ce n’est pas une guerre «par procuration»

J’ai entendu hier soir le député Salek Ould Sidi Mahmoud dire sur Al Jazeera que le pays mène «une guerre par procuration». C’est une expression qui a été utilisée en juillet 2010, après le raid mauritanien contre AQMI. Pas par les partisans du député (Tawaçoul) lesquels avaient une autre approche à ce moment-là. Mais ces propos ont été tenus plusieurs fois. Assez pour interpeller ceux d’entre nous qui refusent de croire que la Mauritanie, même si elle est offensive actuellement, reste une victime. La victime d’une guerre qui lui a été imposée par les Jihadistes d’abord du GSPC, ensuite ceux de AQMI.
Le 4 juin 2005, à Lemghayti, 17 mauritaniens sont assassinés, certains froidement, par des éléments du GSPC. La garnison décimée n’avait aucune vocation guerrière. Ce qui explique le fait d’avoir reçu, la veille, les éclaireurs du groupe qui ont profité de l’hospitalité des Mauritaniens. Alors qu’ils leur préparaient nourriture et thé, les Mauritaniens ne se doutaient pas que ces «frères» étaient venus pour savoir quelle était la meilleure manière de les égorger.
Suivront les attaques de Ghallawiya avec ses trois morts, celle de Tourine avec ses douze décapités, sans oublier les assassinats de paisibles étrangers sur le sol mauritanien, et l’enlèvement d’humanitaires et de touristes.
Toutes ces attaques ont vu la participation de jeunes mauritaniens qui sont nés ici, fait leurs études dans des Mahadras ou des écoles modernes d’ici, fait un passage plus ou moins appuyé dans une mosquée de Nouakchott où ils ont été abreuvés par des prêches violents légitimant leurs actions futures. Ils sont tous connus aujourd’hui, tout comme leur cursus.
Nous aurions espéré que Lemghayti, Ghallawiya, Tourine soient sur une terre étrangère. Mais c’est bien la Mauritanie qui est blessée, qui est visée dans son existence. Pensons un peu aux effets de l’opération destinée à faire exploser des centres névralgiques de Nouakchott. Pour cela deux voitures transportant chacune 1,5 tonne d’explosifs ont été équipées dans la forêt de Wagadu et envoyées à partir de cette forêt. Depuis ce temps, AQMI cherche à établir une base dans cette forêt. La Mauritanie serait alors à une heure de route et plus le temps passait, plus les terroristes renforceront leurs positions. Le député aurait-il voulu que les éléments de AQMI préparent eux-mêmes leurs attaques, qu’ils les exécutent quand ils auront mis toutes les chances de leur côté ? Peut-être, mais le bon sens dicte le contraire…
Dire que c’est «une guerre par procuration», c’est ignorer toutes les victimes, tous les soldats morts en défendant le pays, c’est refuser à leurs parents, à leurs compatriotes de les célébrer en martyrs, parce qu’on aura fait d’eux des aventuriers, des agresseurs agissant en dehors de leurs limites géographiques, violant l’intégrité du voisin, assassinant des gens «sans peur et sans reproche»…
Pour le reste, les Maliens apportent eux-mêmes la confirmation de leur participation à l’action. Il y a quelques semaines déjà, le ministre des affaires étrangères malien déclarait qu’une action commune devait être engagée par les armées des deux pays dans la forêt de Wagadu…

mercredi 29 juin 2011

Voyage au Maroc

Chaque fois que je reviens ici, j’ai l’impression que quelque chose a changé. Sur la route de l’aéroport, les vieux hameaux se sont transformés en grosses villas, signe que le niveau de vie des propriétaires terriens s’est amélioré considérablement. Les villages qui frappaient par la misère de leurs façades sont pour la plupart devenus des quartiers d’habitation à étages. L’autoroute Casa-Rabat est en phase d’élargissement pour permettre trois files dans chaque direction. On peut désormais entrer à Rabat sans avoir à souffrir les embouteillages causés par le goulot d’étranglement que constituait l’entrée principale. Elle peut désormais être contournée par Hay Ryad.
Les rues de la capitale sont propres et soignées. Palmiers, fleurs et autres plantes sont bien tenus. Je ne peux m’empêcher ici de penser aux pauvres palmiers plantés il y a quelques années sur l’une des avenues de Tevraq Zeina et morts de soif depuis. Leurs carcasses, toujours debout malgré le mauvais traitement subi, défient encore l’adversité. Debout comme ils sont, ces palmiers rappellent à ceux d’entre nous qui ont encore le temps – et la possibilité – de méditer, la vanité de nos actes. Quand ils ont été plantés là, cela s’est accompagné d’une grande opération de communication. Quelques années plus tard, ces palmiers meurent en silence, dans l’indifférence des habitants du quartier et des responsables municipaux. On nous dit pourtant que la municipalité de Nouakchott a des milliards dans ses comptes…
Revenons à Rabat… Ici, le poids de la jeunesse est évident. Quand nous arrivons à la MAP pour prendre nos badges, nous trouvons devant nous une bonne centaine de jeunes journalistes. Sauf les étrangers parmi eux, aucun ne semble avoir dépassé la trentaine. Dans les rues, à l’hôtel, dans la mosquée où nous prions… partout, c’est la jeunesse qui frappe. Une jeunesse qui semble s’accomplir, s’assumer.
En fin d’après-midi sur le boulevard Mohamed V, c’est l’effervescence. Des groupes de jeunes passent. Portraits du Roi Mohamed VI à l’appui, ils chantent : «malikouna wahid, Mohammad Essadiss» (notre Roi est unique, Mohamed VI), «Shaa’b yaqul, na’am lidoustour» (le peuple dit, oui à la Constitution). Un autre groupe descend le boulevard et distribue des papiers. Je reconnais quelques anciens militants de l’extrême gauche marocaine. Ils mènent campagne contre la Constitution à coup de : "hadah doustour eshafara, bghayna doustour el fouqara" (c'est la constitution des voleurs, nous voulons celle des pauvres). Mais au lieu de demander de voter non, ils prônent le boycott. C’est facile dans un pays où déjà on se plaint de la désaffection par le citoyen du fait politique. D’autres partis descendent le boulevard, appelant à voter oui à cette Constitution. On sent la vie ici. On sent le débat, la diversité des idées et des visions. C’est qu’ici il y a déjà un système politique qui a donné des traditions d’engagement et de constance dans l’engagement. C’est une classe politique qui a souffert pour ses convictions, pour ses visions.
Là encore, je ne peux que penser un moment à mon pays, à ce qui s’y passe. A l’impossibilité d’instaurer un dialogue. Pas parce que les protagonistes refusent la perspective, mais parce qu’il n’y a pas de tradition de débat. La relation politique est si personnalisée qu’elle ne peut ouvrir sur un échange d’idées (lesquelles d’ailleurs ?). ce qui explique la fuite en avant des uns et des autres, avec notamment la mise en avant de préalables et/ou de conditions qu’on sait à l’avance irrecevable par le vis-à-vis, c’est bien l’absence d’une tradition de débats et l’incapacité à incarner et à accepter la diversité qui bloque. C’est aussi l’absence de vision pour le pays.
Je pense à tout ça et je me demande si finalement, le pays ne ressemble pas à ces palmiers que nous avons plantés là en grande pompe, avec promesses de les entourer de tous les soins, et que nous avons très tôt oubliés…

mardi 28 juin 2011

La bataille de Wagadu vue par la presse d’ailleurs

Intéressant quand on a lu les supputations de certains organes mauritaniens, de voir comment les autres ont lu les évènements. Dans Le Monde du 27 juin, on lit le compte-rendu suivant : «L'opération militaire lancée vendredi par la Mauritanie contre Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI) en territoire malien a fait quinze morts dans les rangs des islamistes, deux soldats mauritaniens ayant été tués et cinq blessés, ont annoncé, dimanche 26 juin, des responsables de l'armée à Nouakchott, la capitale.
"Le bilan est de quinze morts chez les criminels, de deux morts et cinq blessés côté mauritanien", ont annoncé les colonels Brahim Vall Ould Cheibani, chef du bureau des opérations à l'état-major de l'armée, et le colonel Teyeb Ould Brahim, porte-parole de l'état-major.
Selon eux, "le campement" d'AQMI, qui se trouvait dans la forêt du Wagadou, longue de 80 kilomètres et large de 40 kilomètres, située à 110 kilomètres de la frontière mauritanienne dans le nord-ouest du Mali, "a été complètement détruit et c'est la débandade, le sauve-qui-peut, dans leurs rangs". 
Selon l'état-major, "la base était une forteresse aménagée par les criminels qui ont creusé des tranchées très profondes et posé des mines tout autour". "Ils constituaient une véritable menace pour notre pays (...). Beaucoup de matériel a été détruit : l'ennemi a fait usage d'armement lourd, dont de l'armement antichar et anti-aérien", a-t-il ajouté.
L'état-major a précisé que l'opération avait été menée "en coordination avec l'armée malienne" et que les deux armées "se sont partagé la forêt très dense" du Wagadou. La partie confiée aux militaires mauritaniens était celle qui abritait la base d'AQMI, raison pour laquelle ce sont eux qui ont "pris l'initiative de l'attaque", a-t-il ajouté.
Le nombre de militaires engagés dans l'opération n'a pas été précisé. L'armée malienne a pour sa part arrêté dans la nuit de samedi à dimanche neuf membres d'AQMI près de la forêt de Wagadou, selon une source militaire malienne, information confirmée par l'état-major mauritanien
». (Source : Le Monde du 27.06.11)
Au Mali, on semble s’accorder sur la réussite de l’opération, même si on regrette un peu que les Mauritaniens tentent de tirer la couverture à eux. Dans Le Républicain du 27/6, on signale que «des manœuvres conjointes entre les armées malienne et mauritanienne sont en cours. C’est dans un tel contexte que l’attaque du tout nouveau camp d’Aqmi est intervenue le week-end. Avec un bilan probablement très lourd du côté des Salafistes vu les moyens utilisés par Nouakchott qui bombe la poitrine, et à raison, si le succès revendiqué est réel. Pourtant, si tout le monde est content pour le consensus retrouvé, on constatera, une fois de plus, qu’on parle non d’un exploit de l’armée malienne mais de l’armée mauritanienne à un jet de pierre de la capitale malienne. Et cela n’est pas du tout bon pour les signaux de rupture que Bamako envoie depuis peu».
Enfin, je vous propose l’éditorial du Pays, quotidien du Burkina Faso : «La Mauritanie peut raisonnablement crier victoire et célébrer à sa façon la destruction de cette base en fortification de AQMI en plein territoire malien. Son engagement et sa volonté d’en découdre avec les terroristes ne faisaient d’ailleurs aucun doute. Et ses forces armées n’en sont pas à leur premier fait d’arme. Déjà en septembre 2010, cette armée avait engagé des avions dans les combats contre AQMI dans le Nord du Mali. C’est dire que la vigilance dont font preuve les autorités de ce pays dans la traque des groupes terroristes de AQMI va au-delà de ses propres frontières. AQMI a plusieurs fois tenté de frapper en plein Nouakchott mais à chaque fois, ses attaques ont été plus ou moins déjouées. Et cela depuis plus d’un an maintenant et avec la bienveillante collaboration de l’Etat malien dont le territoire est devenu la base arrière de AQMI. A défaut d’être aussi entreprenant que la Mauritanie et d’assurer une traque vigoureuse et permanente des terroristes, le Mali, pays où convergent tous les otages faits par AQMI, est dans l’obligation morale d’aider ceux qui font le coup de feu, ne serait-ce qu’au niveau du renseignement militaire. Si AQMI a établi ses bases arrières dans ce pays, c’est que les responsables de la nébuleuse terroriste savaient que les Maliens tout seuls n’arriveraient pas à les déloger aussi facilement. On en sait plus aujourd’hui, cet assaut victorieux est le fruit d’une parfaite coordination entre les forces militaires des deux pays. C’est la principale leçon de cette opération. Même si les Mauritaniens, euphoriques se sont pratiquement attribué le succès de cette attaque, en donnant même l’impression que les Maliens ont regardé faire comme si ce n’était pas dans leur intérêt de se débarrasser de ces fous de Dieu. Le président malien, Amadou Toumani Touré, et son homologue mauritanien ont plusieurs fois réitéré la nécessité de concrétiser l’engagement des pays en guerre contre le terrorisme dans le Sahel. Il faut croire que ces deux pays viennent de donner l’exemple que tous attendaient. AQMI doit désormais se sentir à l’étroit dans l’espace sahélien, et doit être traqué jusqu’aux confins du désert car la quiétude des populations et des Etats en dépend fortement. Cette récente opération montre à souhait qu’avec un minimum de volonté politique et une bonne coordination des moyens, AQMI n’est pas aussi insaisissable que cela. Il faudrait donc consolider cette coopération à un moment où le chaos actuel en Lybie favorise le trafic d’armes de toutes sortes, capable de renforcer les capacités militaires d’AQMI. Il faut donc être plus que jamais vigilant». Signé : Abdoulaye TAO.

lundi 27 juin 2011

Serge Daniel, encore !

Ce matin, le correspondant de RFI à Bamako, a encore sévi. Les militaires mauritaniens qui étaient il y a peu la première source d’information de Serge Daniel, sont l’objet de suspicions quand ils font des déclarations publiques : «les responsables de l'armée mauritanienne sont sortis hier dimanche de leur mutisme pour donner leur version des faits et un bilan». C’est seulement quand ils parlent sous le sceau de l’anonymat que leurs propos sont sûrs.
Serge Daniel n’hésite pas quand il s’agit de AQMI : «Sur le terrain, les opérations de sécurisation se poursuivent. Selon des témoins contactés par RFI, 48 heures après le raid, al-Qaïda au Maghreb islamique est toujours sur le terrain. Trois véhicules appartenant aux islamistes armés auraient été aperçus dans la nuit de dimanche à lundi, à l’ouest, paradant à la frontière Mali-Mauritanie». Les récits des habitants sont là pour confirmer la débandade des combattants de l’organisation : des groupes de deux, trois, cinq combattants ont été signalés errant, cherchant des montures, enlevant un troupeau pour couvrir leur fuite à la frontière. Neuf d’entre eux ont été arrêtés par l’Armée malienne qui patrouillait dans la zone – mais ne «paradait» pas, malgré le fait d’être chez soi et d’être le plus fort.
Bien sûr c’est, selon l’honorable correspondant (de RFI), c’est «la preuve que les troupes venues de Nouakchott n’ont pas porté un coup fatal à Aqmi». Les troupes ne viennent pas de Nouakchott, parce qu’il s’agit des groupes spéciaux d’intervention entièrement dédiés à la lutte contre le terrorisme et qui sont basés, pour ce fait, dans le grand désert à la frontière. Ce sont ces unités qui ont lancé l’attaque, qui sont restées sur le terrain ; c’est leur ennemi qui est en déroute, qui a vu son camp détruit, et malgré cela c’est cet ennemi qui sort vainqueur selon le récit de Serge Daniel. Pour lequel, le doute persiste sur le bilan donné par les Mauritaniens, parce qu’il «n’est pour le moment pas confirmé de source indépendante». Indépendante ???!!!??? AQMI ? Les services algériens ? Les complices du nord Mali ? Décidément les voi(es) des inspirateurs de notre confrère sont insondables.
Aucun souci de la contradiction. N’est-ce pas SD qui a annoncé qu’il n’y a pas eu d’engagement de l’Armée malienne. Il le répétait dans ses dépêches et ses correspondances jusqu’à ce matin : «Du côté des deux états-majors, malien et mauritanien, on affirme que les opérations communes vont se poursuivre». Poursuivre quelque chose qui n’a pas commencé ? Dans l’esprit de SD c’est possible…
«Vingt-huit jeunes Mauritaniens membres d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) ont fait défection des camps de l'organisation dans le Sahara et se sont rendus à l'armée mauritanienne, ont affirmé dimanche à l'AFP des sources militaires dans le nord du Mali». Une dépêche du 21 novembre 2010. Information absolument fausse. Comment peut-on dire ça autrement, pour dire que cette information n’est basée sur AUCUN FAIT !!! Pourtant elle est passée, avec les détails en prime : «Ils sont très jeunes et ont été endoctrinés. Certains ont même 14 ans. Leur retour est le fruit d’un travail sur le terrain». Et de pousser : «Au début du mois, les mêmes sources avaient annoncé que six jeunes Mauritaniens avaient fui les bases d'Aqmi. L’infiltration d’Aqmi par des éléments dépêchés par l’armée mauritanienne aurait notamment permis d'obtenir ces défections, selon ces sources». Aïe !

dimanche 26 juin 2011

Serge Daniel dans ses œuvres

Quand on écoute le correspondant de RFI (et AFP) au Mali, on est toujours surpris par sa capacité à trouver des «sources anonymes» pour lui donner des informations qui semblent être de première main. Je l’écoute souvent – ou le lie sur le fil de l’AFP – donner des informations «précises», «vérifiées» mais que personne d’autre, à part un ou deux sites mauritaniens, ne reprend.
On se souvient encore des dizaines de transfuges de AQMI qui se seraient rendus aux Mauritaniens, de la bataille entre différents trafiquants entre la frontière mauritano-malienne… Il m’est arrivé d’en parler avec quelques-uns de nos confrères – de l’AFP et de RFI. Tous sont d’accord pour exprimer des doutes sur sa manière de couvrir les évènements et même sur la véracité des informations qu’il donne.
Je l’ai écouté ce matin dire encore une fois que «dans un premier temps, sans parler de victimes chez l’ennemi, un officier mauritanien affirmait que lors du raid mené par l’armée à l’ouest du Mali, un campement d'al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) a été détruit». Dans une autre correspondance, il allait préciser que l’officier était sur place. Mais qui va croire que Serge Daniel, installé à Bamako, étranger au pays, va avoir une source d’une telle importance alors que les journalistes mauritaniens (et maliens) n’arrivent pas à entrer en contact avec leurs frères ? qui va croire que le chef d’une unité en opération va avoir le temps, et la latitude, de parler au téléphone avec un correspondant de presse ?
«Le flou persiste». Ce n’est pas vrai : on sait que c’est l’Armée mauritanienne qui occupe le terrain quelques heures après le combat, c’est d’ailleurs la seule information sûre, il n’y a pas lieu donc de se demander si les cadavres abandonnés sur place sont ceux des éléments de AQMI ou pas. Regardons comment Serge Daniel de RFI construit le doute :
««Des véhicules calcinés et des morts ont été retrouvés sur les lieux où les combats se sont déroulés», révèle quelques heures plus tard un élu malien. Très rapidement, un responsable de l’armée mauritanienne monte alors au créneau : «Les véhicules détruits et les personnes tuées sont du camp des islamistes armés», affirme-t-il. Ces derniers n’ont pas encore donné leur version des faits. Généralement, ils le font à travers un communiqué, avec parfois des images des pertes subies par l’ennemi».
1. Aucun responsable de l’Armée mauritanien n’est «monté au créneau». 2. AQMI a bien donné sa version des faits et depuis la première heure.
Et comme pour pousser le bouchon : «En attendant ce probable communiqué et en attendant aussi que l’armée mauritanienne mette de l’ordre dans sa version des faits, une remarque s'impose : les islamistes tiennent désormais tête aux armées régulières de la région du Sahel». Cela, en bon français – mais seulement en bon français – veut dire : 1. Il y a de l’amalgame dans ce que dit l’Armée mauritanienne, alors qu’elle n’a absolument rien dit jusqu’à présent ; 2. AQMI a remporté une victoire alors que ses unités combattantes sont en déroute, alors surtout que le même Serge Daniel nous disait la veille que les camps de l’organisation terroriste ont été détruits. Lequel des Serge Daniel croire alors ?

samedi 25 juin 2011

Les défauts de communication de l’Armée

A peine a-t-on appris que l’Armée avait engagé un accrochage avec des éléments terroristes d’AQMI, que ceux-ci ont publié un communiqué dans lequel ils ont confirmé le fait et donné leur version des faits. Une version étriquée parce que donnant le beau rôle à quelques bandes qui allient trafics et jihad, poursuivies par les armées de tous les pays de la région.
Depuis une semaine, on nous parle des mouvements autour de la fameuse forêt de Wagadu où seraient terrées ces bandes. On nous dit que Maliens et Mauritaniens préparent une attaque contre eux. Et quand l’attaque a lieu, on veut nous faire croire que la version AQMI mérite d’être prise au sérieux…
A qui la faute ? A l’Armée mauritanienne qui attendra encore et encore… que tout soit dit à propos de l’accrochage avant de donner sa version. Ce sera trop tard. L’information, elle est demandée aujourd’hui, pas demain. Il faut donc la donner à temps.
L’attaque de juillet 2010 contre le camp d’AQMI, c’est la version AQMI qui a été retenue. Comme quoi les Mauritaniens avaient pour mission de libérer l’otage français Germaneau, lequel sera exécuté «en représailles». Celle de septembre, c’est toujours la version de l’ennemi qui sera retenue avec notamment une «débâcle mauritanienne» (une dizaine de morts). Et même dans l’affaire du sous-officier Ould Kabach, c’est la version prétendant à une forte infiltration de l’Armée par AQMI qui a été retenue. Dans dix ans, ce sera de l’Histoire. Pourquoi ? Parce que les nôtres n’auront pas compris que le temps presse et qu’il n’attend pas. Aucun organe de presse ne va attendre que les responsables de la communication aient le feu vert de leur commandement et que celui-ci ait l’autorisation du politique…
On n’est pas obligé de donner les détails, mais on doit rester présent en faisant entendre sa voix. C’est très facile de dire : «L’Armée mauritanienne a accroché une unité de terroristes qui avaient pour mission de pénétrer sur notre territoire pour y commettre des actes de sabotages. Nous n’avons pas encore d’informations à donner, mais nous pouvons vous dire que notre Armée a été équipée et est préparée à mener des campagnes visant à anticiper les menaces terroristes. Grâce à la coopération avec nos frères maliens et aux actions menées par le passé, nous pouvons aujourd’hui dire que la peur a changé de camp». Quoi de plus simple ?
Par ailleurs, quand le correspondant de l’AFP (et RFI) au Mali dit «de source militaire mauritanienne…» ou encore «un militaire mauritanien sur place affirme…», que faut-il penser du reste de l’information quand on sait qu’aucun officier, aucune source militaire mauritanienne n’a daigné parler ? Il faut que ça cesse…

vendredi 24 juin 2011

Coup de semonce pour le «Vieux»

Le Président Wade a voulu faire passer des amendements à la Constitution sénégalaise instituant un «ticket présidentiel». C’est-à-dire avec une liste de président et de vice-présidents, élus à un tour. Un subterfuge qui, aux yeux des Sénégalais, va permettre à Wade de se faire élire à moindre risques en 2012 et, probablement d’engager son fils pour lui succéder. Le fils Karim Wade à qui il a confié le dossier épineux de l’énergie dans un Sénégal qui souffre de délestages dans toutes ses grandes villes. Il faut dire que ce n’est pas la première fois que le vieux Wade, élu pour apporter le changement au Sénégal, exerce l’art du tripatouillage pour s’assurer la mainmise sur les affaires politiques.
Au mois de mai dernier, il a voulu scinder les collectivités locales qui ne lui étaient pas favorables et nommer à la place des élus des délégations spéciales qu’il choisirait lui-même. Cela a donné lieu à de fortes mobilisations, notamment dans la région de Rufisque. Il a été obligé de reculer. Le problème aujourd’hui, c’est que le soulèvement de Dakar donne l’impression de s’inscrire dans le sillage des printemps arabes.
Contre l’intronisation d’un héritier, donc la création d’une dynastie, contre un pouvoir usé par le temps et l’incapacité de répondre aux exigences de sa jeunesse, les manifestants ont scandé des slogans semblables à ceux de Tunis et du Caire : «Wade, dégage», «Non à la dynastie»…
Le Président Wade a finalement accepté de retirer son projet. Mais a-t-il compris que le Sénégal n’est pas le Gabon ? A-t-il compris surtout que, face au peuple sénégalais, le feu vert de Sarkozy et les accointances suspectes avec l’Occident conquérant ne sont pas d’un grand secours ?

jeudi 23 juin 2011

Dépénalisation, oui mais…

C’est une vieille revendication des acteurs de la presse qui a été satisfaite au terme du conseil des ministres d’hier : la dépénalisation des infractions de presse. Cela veut dire que le journaliste ne courra plus le risque de la peine de l’emprisonnement pour certains faits comme l’offense, la diffamation…
C’est naturellement le ministre de la communication, Me Hamdi Ould Mahjoub, qui a expliqué les nouvelles dispositions. Il a indiqué que l’ordonnance N° 17-2006 qui a constitué un bond en avant dans l’exercice de la liberté d’expression, que cette ordonnance avait besoin d’être améliorée pour mieux l’adapter aux exigences nouvelles de liberté et de protection pour le journaliste. Quelques articles de cette loi ont été modifiés pour permettre l’annulation des peines d’emprisonnement prévues. Les articles 35, 36, 40 et 41 ont perdu leurs alinéas prévoyant cette peine. Offense à chef d’Etat, à diplomates ou à pays étrangers, la diffamation pour laquelle on courait la peine d’emprisonnement, c’est désormais l’amende qui est prévue pour sanctionner de tels délits.
Considérant le rôle évident de la presse dans le raffermissement de la démocratie dont elle reflète l’état de maturité, les pouvoirs publics, dit le ministre, "ont choisi de lever le cachet criminel des infractions journalistiques et de le remplacer par un mécanisme d'exemption du journaliste de la peine d'emprisonnement suite à la collecte et au traitement de l'information". Seules vont subsister les articles criminalisant l’incitation à la haine, promettant le racisme et le crime. Pour ces délits, la peine d’emprisonnement est naturellement maintenue.
En moins d’un an, la Mauritanie a pu lancer la loi organisant la presse électronique, celle instituant la libéralisation de l’audiovisuel, celle transformant les institutions publiques d’information (radio et télévision) en société anonyme pour leur permettre de devenir de véritables services publics… Des avancées notoires qui vaudront certainement à la Mauritanie de gagner des points dans le classement des pays par respect de la liberté d’expression.
«Après cinq années d’alternances parfois heurtées entre pouvoir militaire et pouvoir civil, le pays se stabilise peu à peu. Concernant la presse, la législation est la plus favorable de la sous-région». C’est le lancement du rapport sur la Mauritanie fait sur le site de Reporters sans frontières (www.rsf.fr) qui précise : 0 journalistes tués, 0 collaborateurs tués, 0 journalistes emprisonnés, 0 collaborateurs emprisonnés, 0 net-citoyens emprisonnés.
Un acquis qu’il faut savoir préserver. D’abord par une plus grande prise de conscience du rôle de la presse, le recadrage de nos préoccupations et l’engagement responsable au service des causes justes. Personne ne peut dénier au journaliste son droit à l’engagement. Mais aucun journaliste n’a le droit d’oublier son obligation à la responsabilité. Les insultes, le dénigrement, la fausse information, l’engagement vulgaire… ce n’est pas du journalisme. Et les organes et les personnes qui le pratiquent peuvent exister un moment, tromper un temps, mais restent condamnés à disparaitre.
La dépénalisation doit s’accompagner d’un renforcement de l’autorégulation, surtout en l’absence d’une HAPA efficiente. Mais aussi de la célérité au niveau de la justice pour le traitement des questions liées aux infractions de presse. Seuls les procès peuvent aider à ancrer les notions de liberté et de responsabilité et donner en même temps au citoyen la possibilité de défendre sa dignité et son honneur s’il se trouve bafoués au terme d’un article. Il ne faut pas croire que les signatures anonymes peuvent couvrir ou dégager la responsabilité. Non ! attention donc.

mercredi 22 juin 2011

Encore le bac

C’est le dernier jour du bac. Pour la série scientifique, la deuxième journée, au moins au centre des jeunes filles (II), il y a eu la fraude à ciel ouvert. J’apprends que c’est le cas un peu partout. Après la rigueur du premier jour, c’est le lâchage dès le deuxième jour. Mon enfant est découragée parce que l’épreuve de physiques était difficile. Mais dans la salle à côté, un candidat a pu recevoir les sujets traités à partir de l’extérieur. Corrigés qu’il a largement partagés avec ses copains de salle. A la sortie les candidats ne s’en cachent pas. Les téléphones ont marché à partir de la deuxième journée. Pour toute enquête, il suffit de demander aux opérateurs le traçage des communications de et vers les établissements. C’est facile à faire et cela mérite d’être fait pour prendre des mesures à l’avenir.
En ce dernier jour, les candidats D font mathématiques. Ceux du collège des filles II, furent surpris, à onze heures, quand le chef du jury a fait son entrée dans les salles pour annoncer que les feuilles destinées au brouillon ne peuvent servir pour compléter les réponses des élèves. Crises de nerfs multiples. Dès le premier jour, les encadreurs et surveillants avaient refusé de donner plus d’une double feuille aux candidats pour répondre aux questions. Naturellement, cela ne suffisait pas. Alors, dans toutes les salles, les surveillants ont proposé aux élèves d’utiliser les feuilles destinées initialement au brouillon. Tout en précisant de prendre soin d’écrire leurs noms et numéros dans les casiers réservés à cela. Et c’est seulement à la dernière heure, au dernier jour que le chef du jury, souverain ici, annonce que les copies destinées au brouillon ne seront pas corrigées. De quoi inquiéter et même rendre fou.
Le vieux professeur que je suis ne comprend pas. Je demande aux policiers à la porte de transmettre mon inquiétude au chef du jury. Il vient me voir et m’explique que cela ne me regarde pas et que d’ailleurs il l’avait dit «pour faire peur aux candidats» et qu’il sait que «les surveillants ont dit ça» mais qu’«ils n’avaient pas raison», et qu’il mentionnera le tout dans son rapport !!! Je plains celui qui aura à lire un rapport écrit par ce monsieur.

mardi 21 juin 2011

Solstice d’été

Ce jour est supposé le jour le plus long de l’année dans notre hémisphère. Tout simplement parce que le soleil est dans sa position la plus «proche» pour nous. Il est au niveau du Tropique du Cancer – ou presque pour ne pas blesser les sentiments des géographes orthodoxes.
C’est ce jour que choisit le Président Mohamed Ould Abdel Aziz pour aller à Rosso. Il avait besoin d’une longue journée pour faire tout ce qu’il a fait et revenir à Nouakchott. Après avoir distribué quelques 1340 ha aux 125 diplômés chômeurs visés par un programme de réinsertion qui allie offre d’emploi et augmentation de la production agricole, visité une exposition des opérateurs de la Chemama, contrôlé l’état d’avancement de la construction de la ville nouvelle de Rosso, le Président a eu le temps de parler longuement avec les agriculteurs et d’écouter leurs doléances.
Hier ville morte, abandonnée à son sort par les pouvoirs publics; hier ville-martyre pour ce que ses populations ont vécu de frustrations, de privations et d’arbitraires; hier ville décadente, perdant ses vocations premières à cause d’une gestion volontairement nihiliste, la ville de Rosso revient à elle-même, reprend espoir et se réconcilie avec le travail et la dignité.
Avec le projet de «nouvelle ville», la relance de l’activité agricole par l’intéressement des producteurs réels, la construction d’un réseau routier moderne et d’un réseau d’assainissement à l’intérieur de la ville, ainsi que la liaison très prochaine avec Boghé, Rosso redevient ce qu’elle a été : un carrefour d’échanges, une terre de labeur et de générosité. Mieux, elle aspire désormais à recouvrer son ambition première qui est celle d’être la porte dorée d’une Mauritanie réconciliée avec elle-même et avec ses voisins, d’une Mauritanie riche de sa diversité, fière de ses choix, d’une Mauritanie rassurée et forte de sa cohésion. C’est du moins ce qu’on espère pour la capitale du Trarza.

lundi 20 juin 2011

Le bac commence

C’est tout naturellement parce que j’ai un enfant qui fait le bac que je me retrouve à 7 heures du matin devant le lycée des filles II, derrière l’ancien collège des garçons où j’ai fait une partie de ma scolarité. L’ambiance est surchauffée. De quoi stresser un peu plus les candidats. Ici en majeure partie pour le bac D, série sciences naturelles. Les policiers arrivent. Le chef du jury est là. Mais les professeurs commencent à arriver seulement la demie. Certains n’entreront qu’après huit heures. On dirait qu’ils savaient qu’il y aurait un retard considérable pour le début des examens.
C’est un peu après huit heures (plus dix environ) que le chef du jury ordonne aux policiers de laisser passer les candidats. Le contrôle est strict. C’est bien parti. Les épreuves ne commenceront que vers neuf heures. De quoi inquiéter les candidats qui ont subi la pression de la fuite des sujets. Mais tout semble se dérouler normalement.
Les candidats découvrent que les sujets ventilés la veille n’ont rien à voir avec ce qu’ils ont devant les yeux. Ce qui ne les empêche pas de (re)tomber dans le piège du sujet objet de fuite.
Comme je l’ai dit, cela dénote d’une démarche visant à saper, à décrédibiliser ce qui reste de l’Etat. C’est pourquoi c’est grave. Et c’est pourquoi le silence des autorités concernées, ici le ministère de l’éducation, est criminel. Réagissez bon sang !!!
On me dira que le niveau est tel qu’il n’y a plus la force de réaction. Que le niveau moral est tel que : «maatla shi isha’ran ijloudhoum» (rien ne les irrite plus). Cela participe à la dépréciation de l’appareil déjà mal-en-point. 

dimanche 19 juin 2011

La fausse information

C’est en fin d’après-midi que le site www.cridem.org a produit un appel de quelqu’un, un parent d’élève dont le fils lui a rapporté une épreuve soi-disant du bac. L’épreuve est même téléchargeable. Le ministère a dû démentir quelques heures après.
En tant qu’enseignant – à l’origine – je sais que ce sont là des informations récurrentes depuis le scandale de 2000, quand le bac a été vendu par les intermédiaires du ministre de l’époque. Mais, depuis, les choses ont nettement évolué.
Parent d’élève moi-même, j’ai été soumis ces derniers temps à une pression énorme : chaque jour, des camarades de mon enfant viennent lui annoncer que telle ou telle papeterie vend les épreuves. Je lui explique que c’est un commerce porteur pour ces papeteries, mais que cela n’a aucun fondement : les épreuves du bac sont sous scellés et personne n’y a accès.
«Mais, papa, c’est un organe d’information qui a donné la nouvelle, il ne peut pas mentir. Il doit avoir fait une enquête pour s’assurer du fait». C’est ce que mon enfant m’oppose depuis que nos confrères de cridem.org ont accepté de faire passer une information qui n’en est pas une. Mais le malheur, c’est que, avec ou sans démenti du ministère, le mal est fait. Personne ne peut plus avoir confiance dans le système éducatif qui était déjà largement décrédibilisé par l’exercice dont il souffre depuis trois décennies. C’est grave et ça ne peut pas rester sans suite. Une enquête policière – et/ou administrative – doit déterminer les responsabilités, non pas dans la fuite qui n’est pas vraie, mais dans la diffusion d’une information destructrice. Pour ce qu’elle fonde de doutes sur la sincérité même de l’appareil administratif de l’éducation.
Il y a peu, d’autres sites ont fait état de l’interpellation d’un officier, attaché militaire dans un pays voisin, pour relations supposées avec Al Qaeda. L’information n’est basée sur aucun fait. Mais allez le dire aujourd’hui aux médias qui en ont fait état à l’étranger, aux chercheurs sur la question…, la vérité pour eux à présent c’est que l’Armée mauritanienne «est infiltrée par AQMI». Alors que l’information sur laquelle on se base pour faire une telle conclusion, cette information est absolument fausse. Que faire alors ?

samedi 18 juin 2011

Que reste-t-il de l’Appel de De Gaulle ?

Juin 1940, tout semble avoir été joué pour la France. Les forces allemandes contrôlent les deux tiers du pays. Le Maréchal Pétain signe l’armistice qui met fin aux hostilités et signe la défaite effective des forces françaises. On croit alors que la position du Maréchal épousait mieux les exigences de la realpolitik. On oubliait le sens de l’Histoire. On oubliait surtout l’effet catalyseur d’un Appel lancé depuis Londres par un certain Général de Gaulle… c’était le 18 juin, la veille de la capitulation. Ce jour-là, les français écoutant la BBC entendirent ceci :

"Les chefs qui, depuis de nombreuses années, sont à la tête des armées françaises, ont formé un gouvernement.
Ce gouvernement, alléguant la défaite de nos armées, s'est mis en rapport avec l'ennemi pour cesser le combat.
Certes, nous avons été, nous sommes, submergés par la force mécanique, terrestre et aérienne, de l'ennemi. Infiniment plus que leur nombre, ce sont les chars, les avions, la tactique des Allemands qui nous font reculer. Ce sont les chars, les avions, la tactique des Allemands qui ont surpris nos chefs au point de les amener là où ils en sont aujourd'hui. Mais le dernier mot est-il dit ? L'espérance doit-elle disparaître ? La défaite est-elle définitive ? Non !
Croyez-moi, moi qui vous parle en connaissance de cause et vous dis que rien n'est perdu pour la France. Les mêmes moyens qui nous ont vaincus peuvent faire venir un jour la victoire.
Car la France n'est pas seule ! Elle n'est pas seule ! Elle n'est pas seule ! Elle a un vaste Empire derrière elle. Elle peut faire bloc avec l'Empire britannique qui tient la mer et continue la lutte. Elle peut, comme l'Angleterre, utiliser sans limites l'immense industrie des Etats-Unis.
Cette guerre n'est pas limitée au territoire malheureux de notre pays. Cette guerre n'est pas tranchée par la bataille de France. Cette guerre est une guerre mondiale. Toutes les fautes, tous les retards, toutes les souffrances, n'empêchent pas qu'il y a, dans l'univers, tous les moyens nécessaires pour écraser un jour nos ennemis. Foudroyés aujourd'hui par la force mécanique, nous pourrons vaincre dans l'avenir par une force mécanique supérieure. Le destin du monde est là. 
Moi, Général de Gaulle, actuellement à Londres, j'invite les officiers et les soldats français qui se trouvent en territoire britannique ou qui viendraient à s'y trouver, avec leurs armes ou sans leurs armes, j'invite les ingénieurs et les ouvriers spécialistes des industries d'armement qui se trouvent en territoire britannique ou qui viendraient à s'y trouver, à se mettre en rapport avec moi. Quoi qu'il arrive, la flamme de la résistance française ne doit pas s'éteindre et ne s'éteindra pas. Demain, comme aujourd'hui, je parlerai à la Radio de Londres."
Dans ses mémoires, De Gaulle explique ainsi le moment et la portée : «La première chose à faire était de hisser les couleurs. La radio s'offrait pour cela. Dès l'après-midi du 17 juin, j'exposai mes intentions à M. Winston Churchill. Naufragé de la désolation sur les rivages de l'Angleterre qu'aurais-je pu faire sans son concours ? Il me le donna tout de suite et mit, pour commencer, la B.B.C. à ma disposition. Nous convînmes que je l'utiliserais lorsque le gouvernement Pétain aurait demandé l'armistice. Or, dans la soirée même, on apprit qu'il l'avait fait. Le lendemain, à 18 heures, je lus au micro le texte que l'on connaît.»
70 ans après, on se demande ce qu’il en reste. Dans mes lectures sur la commémoration de l’anniversaire, je suis tombé l’éditorial de Bertrand Le Gendre (Le Monde du 17 juin) qui dit : «Ceux qui continuent à se disputer la vraie croix de Lorraine sont des nains comparés à ce géant. Peut-être se rappellent-ils ce que disait de Gaulle avant qu'il ne devienne de Gaulle, en 1932, dans Le Fil de l'épée (Berger-Levrault) : "L'action, ce sont les hommes au milieu des circonstances." Les circonstances changent. Les hommes se hissent ou non à leur hauteur. C'est cela être gaulliste aujourd'hui. On est curieux de savoir ce qu'en dira le chef de l'Etat le 18 juin à Londres, lui qui affirmait avant son élection : "Le gaullisme ne se commémore pas, il se vit !"»
Pour sa part, Jean-Louis Debré explique dans une interview: «Soyons clair. Le vrai gaullisme, c'est celui de De Gaulle et de ses compagnons, celles et ceux qui ont fait le chemin de la Résistance, de la reconquête, de la reconstruction, de la traversée du désert et qui - on l'oublie trop - ont remis la France en marche. Après, il y a eu un gaullisme pompidolien, un gaullisme mitterrandien, un gaullisme chiraquien.»
Lui De Gaulle disait en 1952 que "chaque Français fut, est et sera "gaulliste"". Il tenait aussi à expliquer : "Mon seul adversaire, celui de la France, n'a jamais cessé d'être l'argent."
Où en est la France d’aujourd’hui ?

vendredi 17 juin 2011

De Wade à Ould Bolle

Le 11 juin dernier, le président sénégalais réitérait sur RFI son appel à Kadhafi de quitter le pouvoir, reprenant son «conseil appuyé» au Guide libyen : «Plutôt tu partiras, mieux ça vaudra». Un conseil qui vaut pour tous ces chefs d’Etats qui s’agrippent au pouvoir et qui semblent servir de modèle à «Gorgui»…
Dans cet entretien avec RFI et pour se défendre d’avoir agi en dehors de la volonté africaine, le président Wade a déclaré qu’au cours du sommet d’Adis, la majeure partie des chefs d’Etats présents s’étaient prononcé pour demander à Kadhafi de partir. Seul le président Aziz s’était opposé, selon lui, à ce que la demande figure expressément dans la résolution de l’UA. Ce qui est faux. Quand le président Wade a pris la parole pour fustiger Kadhafi et la Libye du Guide, c’est Yoweri Museveni qui a pris la parole pour s’opposer à sa démarche. Il a rappelé les rapports de son pays, l’Ouganda, avec la Libye, ses trois guerres contre des protagonistes financés par Kadhafi, son opposition à son projet de gouvernement d’Union africaine lors du dernier sommet auquel il avait participé. «Qui l’a soutenu en demandant la mise en place immédiate d’un gouvernement africain ? qui l’appelait le Guide et lui accordait tous les attributs de grandeur ? qui le recevait en grande pompe et se pliait devant sa volonté ? le doyen Wade…», a-t-il répliqué en substance aux propos de Wade. Après cette intervention, les chefs de délégation se sont concentrés sur la feuille de route de l’Union africaine qui reste l’expression de l’Afrique unie. Pour une fois, les africains ont exprimé une position indépendante par rapport aux forces de domination, il y a de quoi être fier nonobstant le reste. Que Zuma se cherche un rôle distinct, on peut le comprendre car il veut bien capitaliser ce rôle dans sa course pour le poste de membre permanent du Conseil de sécurité représentant le continent noir. Même s’il oublie quand même qu’il ne peut tirer sa légitimité que de ses pairs africains. Mais pour le président Wade ? Hier fervent disciple du Kadhafisme, aujourd’hui le qualifiant de dictature qui a duré 42 ans ? Pour les faveurs du président Sarkozy qui a quand même introduit le fils Karim dans la cour des grands en le présentant au président Obama lors du sommet du G8 ?
Toujours à propos des positions «originales» - ou singulières – par rapport au problème libyen. J’ai été mandaté par le maire de F’Dérick, localité du nord du pays, pour exprimer une proposition à Kadhafi. Lui, Ould Bolle, président du parti de «lefoueysdine» (les idiots, les diminués…), maire de F’Dérick, est prêt à abandonner tous ses postes pour Kadhafi. Son parti, sa mairie, en contrepartie de son départ et de celui de sa famille de Libye. Lui, Ould Bolle s’engage à lui disponibiliser quelques tentes en plein désert, de bonnes chamelles de traite, en plus du parti qu’il dirige et qui semble être le plus grand parti du monde. «Il y a deux catégories de gens : ceux qui se fâchent quand on leur dit qu’ils sont membres de notre parti, ceux-là sont des membres fondateurs, et ceux qui se taisent, ceux-là en sont membres par acquiescement», explique Ould Bolle qui n’a jamais profité lui des faveurs du Guide libyen.

jeudi 16 juin 2011

Des changements à la DGSN

La Direction générale de la Sûreté nationale vient de procéder à quelques changements dans ses directions et dans quelques commissariats de l’intérieur.
Ce mouvement a consacré la désignation de Mohamed Abdallahi Ould Taleb Abeidy dit Ould Adda à la direction de la surveillance du territoire. En quittant la direction de la sûreté d’Etat en 2008, il avait été nommé directeur de la police judiciaire où il avait lancé de nombreux projets de modernisation des procédures et des approches avant de se retrouver conseiller du directeur général. Plusieurs fois directeur régional de la sûreté, le commissaire Ould Adda est l’un des cadres les mieux outillés de la police nationale.
A la tête de la DSE entre 2006 et début 2008, il a dirigé, sous les ordres du Général Ghazwani, le démantèlement des cellules opérationnelles de Al Qaeda au Maghreb Islamique. Ce qui en fait l’un des meilleurs connaisseurs du dossier terrorisme. Son retour aux premières loges peut s’expliquer par la recherche d’un nouveau rôle de la police dans la lutte anti-AQMI qui semble être l’apanage de l’Armée.
Ould adda remplace Mohamed Ould Denna qui va à la direction du personnel. Lui aussi un personnage atypique de l’encadrement de la police nationale. Sa piété et sa droiture font presque le consensus. Mais pourquoi ne pas avoir confirmé dans son poste de directeur-adjoint Mohamed Lemine Ould Ahmed ?

mercredi 15 juin 2011

Toujours question de chiffres

Lundi dernier, un accord de financement d’un montant de 16 millions de dollars a été signé entre la Banque Mondiale et l’Etat mauritanien. Il a pour objectif principal d’aider le pays à lutter contre le chômage. C’était si important que l’ambassadrice des Etats-Unis, le coordinateur de la coopération espagnole et le représentant de l’AFD (Agence Française de Développement) ont marqué la cérémonie de signature de leur présence. 
Le site www.tawary.com nous rapporte que le ministre des affaires économiques et du développement a déclaré, au cours de la revue de mi-parcours, que le pays a utilisé 383 millions dollars sur l’ensemble de l’enveloppe des financements de la Banque Mondiale. Le site rapporte qu’une source officielle du bureau de la BM à Nouakchott a corrigé en affirmant que la Mauritanie n’a «consommé» que 23,3 millions dollars. Pour deux projets, celui du Programme de développement urbain que dirige Mohamed Ould Babetta et celui des mines que dirige Samoury Ould Sweidatt. Les deux ont présenté des projets assez ficelés pour convaincre la BM de les financer. Pour le reste, rien.
Cela rappelle la situation du projet phare dans la modernisation et le renforcement des capacités de l’administration mauritanienne, celui qu’on appelle le PRECASM. L’évaluation à mi-parcours qui a été faite il y a quelques semaines de ce projet, s’est faite alors que sa première phase était close depuis l’année d’avant. Aujourd’hui, ce projet est incapable d’absorber six millions dollars destinés à «renforcer les capacités de l’administration». Vous vous rendez compte !!!!

mardi 14 juin 2011

Les chiffres parlent

J’ai toujours été intrigué par la facilité pour le Mauritanien normal de jongler avec les chiffres. Je ne sais pas si cela nous vient de loin, mais je suis sûr que la gestion hasardeuse et même dangereuse des trois dernières décennies a cultivé cette propension a citer les chiffres sans faire attention, sans se dire qu’un chiffre exprime une vérité et non une approximation.
Je me souviens que quand on est allé en Côte d’Ivoire, on ne pouvait pas savoir combien de Mauritaniens étaient installés dans ce pays. Les chiffres qu’on nous avançait variaient entre 30.000 et 200.000. Parfois c’est une seule personne – de surcroit un diplomate – qui vous dit : «c’est entre 30 et 200.000 personnes». Et combien de fois vous entendez : «untel n’a rien fait, il a juste bouffé un milliard d’ouguiyas». Mais un milliard, c’est quelque chose. Prenez vos calculettes et essayez de savoir combien de minutes depuis l’Hégire jusqu’à maintenant. Moins de huit-cent-cinquante millions de minutes se sont passées. Un milliard c’est beaucoup. Un chiffre, c’est important.
Je vous invite à aller sur le site www.tresor.mr et à regarder les données. Vous allez être surpris. On nous dit que les caisses de l’Etat ont été vidées, que les recettes fiscales ont baissé à cause des passe-droits accordés aux importateurs proches du régime.
Et on prend l’exemple du fonds national des hydrocarbures. Sachez qu’au 30 du mois d’avril 2011, les revenus de l’Etat tirés du pétrole encaissés atteignaient un peu plus de 6.214 millions dollars américains, (6 214 337,41 USD) soit l’équivalent d’un peu plus de 1.692 milliard d’Ouguiya (1 692 909 797.23 UM). A cette même date, le solde du compte FNRH était d’environ 58.905 millions de dollars US (58 905 077.49 USD), soit l’équivalent de 16.579 milliards d’ouguiya (16 579 339 368.6 UM). Savez-vous aussi que les entrées douanières ont doublé pour le premier semestre 2011 par rapport à 2010 (42 milliards UM au lieu de 21), triplé et même quadruplé par rapport aux années d’avant ?
On va rarement à la source d’information, parce qu’on préfère l’approximation à l’exactitude du chiffre. Sinon comment comprendre que la plupart de nos opérateurs – politiques, médiatiques … - préfèrent s’en remettre à la rumeur sur le chiffre plutôt qu’à la donne officielle. On me dira que l’épisode des faux chiffres a détruit la crédibilité de la source officielle. A quoi je rétorquerai qu’il n’y a rien de pire que les supposés de la rumeur. Et qu’en tout cas, des sites comme celui du trésor public contribuent à renforcer la tendance transparence. Il faut donc y croire.

lundi 13 juin 2011

Le CNT (enfin) en cause

C’est un rapport que le Centre international de recherche et d'études sur le terrorisme et d'aide aux victimes du terrorisme (CIRET-AVT) et le Centre français de recherche sur le renseignement (CF2R), viennent de rendre public qui donne l’alerte. Enfin. Ce qui se passe en Libye n’est pas aussi «évident» que semblent le croire Bernard-Henry Lévy et ses adeptes (dont le Président Nicolas Sarkozy).
Le rapport craint que l’on ne soit en face d’une machination qui a commencé par l’exagération de l’information concernant le bombardement par les forces de Kadhafi des civils et ce pour justifier l’intervention occidentale ; et qui a fini par auréoler les révolutionnaires de tous les qualificatifs positifs. Le rapport fait suite à une mission qui est d’abord allée en Tripolitaine (Tripoli) du 31 mars au 6 avril, ensuite en Cyrénaïque (Benghazi) du 19 au 25 avril.
Au-delà de l’idéologie fondamentaliste combattante que dégagent les discours et les comportements des «révolutionnaires», les experts ont été surpris par le refus du Conseil national provisoire (CNT) de présenter l’ensemble de ses membres. «Seuls les noms de 13 des 31 membres sont publicsL'identité des représentants de l'ouest libyen n'a pas été révélée pour des raisons "de sécurité". (...) Des raisons discutables». Pour la plupart des 13, il s’agit des apparatchiks du régime Kadhafi. Dont d’ailleurs Moustapha Abdel Jelil, président du CNT et ancien ministre de la justice du «Guide». Il a, en tant que juge, confirmé par deux fois la peine de mort contre les infirmières bulgares. Cette affaire dans laquelle le «Guide» avait bien voulu accorder le beau rôle à Sarkozy fraichement élu Président de la République. C’était au moment des amitiés douteuses.
Selon Eric Dénécé, directeur du Centre français de recherche sur le renseignement, «on est face à des individus qui sont extrêmement marqués dans leur comportement quotidien et leur volonté d'imposer leur système en allant jusqu'à imposer la charia». Ce qui n’est pas forcément un handicap s’il était sous-tendu par un projet d’Etat citoyen moderne. Mais rien que l’idéologie salafiste portée par une structuration hyper-tribalisée. Rien de bon.
«Les membres de la mission ont été très surpris par le caractère artificiel de cette "révolution" par procuration». N’est-ce pas ?
«La guerre civile a provoqué le retour chez eux de nombreux émigrés économiques, alors même que leurs pays connaissent un important chômage. Cet exode risque d'aggraver significativement la situation intérieure de ces États : ils perdent une source de revenus -celle des transferts de fonds des émigrés- et voient revenir chez eux des travailleurs qui vont grossir la masse des chômeurs et des insatisfaits». Pas de quoi torpiller l'initiative confiée par l'Union africaine à un panel de chefs d'Etats du continent.
Comme le dit le rapport personne ne peut pleurer Kadhafi, mais il y a lieu de se poser des questions.

dimanche 12 juin 2011

Recréation culturelle

Avec quelques amis dont des professeurs, des chercheurs spécialistes et des profanes comme moi, nous avons décidé d’organiser des ateliers de traduction de poésies. Il s’agit de se mettre en groupe pour traduire des poèmes en dialectes de chez nous : en Hassaniya, Pulaar, soninké ou Wolof. On vient de commencer et on entend l’ouvrir à tous ceux qui pourraient être intéressés. Mais pour associer les lecteurs de cette page, je m’en vais vous proposer cette traduction du célèbre poème de Sidi Mohamed Ould El Gaçri. A vous de l’améliorer.

«Kel hamd illi ya waad
lemrayvig wakten raad
’liik Allah ib’aad
dahrak dhaak ilghallaak
u khissrit haalit lablaad
u ‘idt inta lilli jaak
maah inta dhaak u ‘aad
dha maahu dahr ighlaak
’idt aana maani zaad
Sidi Mohamed dhaak»
(heureusement ô Wad Lemrayvig/
qu’à présent qu’Allah a de toi éloigné/
le temps qui t’a fait aimé/
et que le pays a perdu de son éclat/
et que pour celui qui viens à toi, désormais/
tu n’es plus celui qui fut/
et que le temps qui t’a fait aimé n’est plus celui-là,/
je ne suis plus non plus
ce Sidi Mohamed-là) 

samedi 11 juin 2011

Excuses pour les excuses

Messaoud Ould Boulkheir a bien dit ce que les sites avaient rapporté : l’ultimatum lancé est bien vrai. J’ai reçu plusieurs appels me confirmant qu’il avait bien tenu de tels propos devant les populations de Boghé, de Sélibaby. D’ailleurs il vient de les tenir devant celles de Nouadhibou. Nous espérons de lui de ne pas revenir là-dessus à son retour à Nouakchott, comme ce fut le cas pour la première fois. Je présente mes excuses pour ceux d’entre mes confrères qui avaient rapporté l’information et pour ceux qui l’avaient commentée. Je retire mes excuses présentées ici pour avoir moi-même repris et commenté l’information.
Ceci dit, l’une des constantes d notre classe politique, c’est bien la multiplicité des discours. Depuis le temps qu’on les pratique, nos acteurs politiques ont toujours un discours pour leurs militants qu’ils chauffent, un pour leurs partenaires qu’ils polissent et un pour les étrangers qu’ils leurrent. Cela ajoute considérablement à l’illisibilité de l’espace politique. Dommage.

vendredi 10 juin 2011

Fausse information

Le président Messaoud Ould Boulkheir a démenti avoir jamais lancé un ultimatum à ses compagnons de la COD. Jamais selon lui, il n’a dit qu’ils devaient nécessairement engager le dialogue avec le pouvoir, à défaut de quoi il ferait cavalier seul.
Cette information a fait le tour de tous les sites, de la plupart des journaux. Elle a fondé des analyses, des conjectures, laissé entrevoir une nouvelle dynamique dans le jeu politique. Mais quand le principal intéressé l’a démentie, on a vu personne s’excuser et revenir sur ce qu’il avait écrit. Chaque organe d’information a fait comme si cela n’avait rien à avoir avec ce qu’il avait annoncé et analysé. Pourtant c’est un gros mensonge.
Cela me rappelle quelques «clashs» avec certains de mes confrères. Je vous raconte le plus révélateur. Un jour, j’ai été contacté par des amis dont on a annoncé le ralliement au parti au pouvoir alors qu’ils étaient en plein dans l’opposition. Pour cela, les organes d’information avaient imaginé tout un processus qui commence par la rencontre avec le Président d’alors et qui finit par l’annonce l’adhésion solennelle. Rien de tout ça n’était vrai. D’ailleurs, deux des concernés n’étaient pas en Mauritanie quand on a dit qu’ils rencontraient le Président de la République. J’appelle le directeur du premier organe ayant lancé l’info. Il ne récuse rien de ce que je lui dis, mais… «On ne peut démentir ce qu’on a déjà annoncé, mais parce qu’il s’agit de tes amis, je leur propose de nous faire un démenti…» Comme quoi !
Pour revenir à l’information concernant Ould Boulkheir, j’ai fait partie de ceux qui l’ont reprise et commentée. A mes lecteurs, je présente ici mes plates excuses.

jeudi 9 juin 2011

Emotion tardive

Je suis surpris cette semaine de voir tant de salive, tant d’encre couler pour l’affaire de la convention avec les Chinois. Une convention dont la presse avait parlé au moment où elle a été signée. C’est d’ailleurs pourquoi l’on a été obligé – côté gouvernemental – de la passer devant le Parlement. Une preuve de plus que nos acteurs sont toujours en train de courir après les événements. Surtout que les habitants de Nouadhibou ont déjà vu la partie chinoise à l’œuvre. A toutes fins utiles, voilà, en relecture, les conclusions de l’enquête parue dans notre N°530 du 25 décembre 2010 :

«Brader, encore brader

Connaissez-vous la société «Poly-Hondone Pelagic fishery C°» ? Certainement non. Faites comme nous, allez sur un moteur de recherches. Vous aurez 87 réponses qui se rapportent toutes à son implantation en Mauritanie. Rien avant. Comme s’il s’agissait d’une génération spontanée. Cela rappelle les cas nombreux dont le plus connu est celui de Sterling – petite société basée à Londres avec moins d’un million dollars de chiffre d’affaires et qui a eu le marché de la commercialisation du pétrole mauritanien en 2004 moyennant le versement de 130 millions dollars (alors qu’elle engrangeait pour 1 milliard).
La Poly-Holondone est cette société dont les activités ont été officiellement lancées à l’occasion des festivités commémorant le cinquantenaire de l’indépendance à Nouadhibou. La convention qui la lie à la Mauritanie a été signée le 7 juin 2010. Par cette convention d’une durée exceptionnelle de 25 ans, la société s’engage à financer à hauteur de 100 millions dollars (toujours) à : aménager le terrain attribué pour la construction d’un ponton d’accostage et d’un quai de débarquement des bateaux qui vont approvisionner l’usine de transformation des produits de mer ; construire cette usine qui sera composée de deux unités de traitement des produits, d’une fabrique de glace (100t/jour), d’un entrepôt frigorifique (6000 t), d’une unité de fabrication de farine et d’un laboratoire de contrôle ; construire un chantier de construction d’embarcations de pêche artisanale et d’un centre de formation et de recyclage.
En contrepartie, la Mauritanie s’engage à n’appliquer que la législation en vigueur au moment de la signature de la Convention. Si demain, notre Parlement changeait une loi dans le domaine d’activité, cela ne s’appliquerait pas à la société chinoise.
«Il ne sera appliqué à l’investisseur pendant la durée de la présente Convention, aucune mesure restrictive limitant, de quelque manière que ce soit, les conditions que lui accorde la législation en vigueur lors de la signature de la présente Convention qui l’autorise ce qui suit : - Liberté de choix des fournisseurs ; - la liberté d’importer des matériels, équipements de production, matière d’emballage, assaisonnement, pièces de rechange et autres produits, voitures, pièces détachées, et matières consommables quelle qu’en soit la nature et la provenance ; - la liberté d’exporter toute sa production suivant les circuits dont il a le choix ; - la liberté de fixer ses prix et de conduire sa politique commerciale». Article 8 de la Convention.
Oubliées les politiques visant à redynamiser la Société de commercialisation du poisson (SMCP). Défiées les lois et règlements applicables en matière d’exportation des produits de mer, en matière d’importation de produits, en matière d’environnement, en matière des relations commerciales et politiques de la Mauritanie. L’investisseur peut importer un produit dangereux («quelle qu’en soit la nature…») venant d’Israël («…et la provenance»). Bonjour les dégâts ! Mais ce n’est pas fini.
Article 9 : «L’Etat autorise l’investisseur à ouvrir un compte en devises convertibles auprès d’une banque de premier ordre de son choix et d’y loger 70% des recettes d’exportations qu’il pourra réaliser, les disponibilités de ce compte sont librement transférables». Qui dit mieux ? Mais où est la Banque Centrale de Mauritanie dans tout ça et que dit-elle dans ce cas ?
2463 emplois permanents créés, on ne peut être plus précis. Dont 35% d’expatriés. Que dit la législation ? Qu’en pensent les syndicats nationaux ?
60.000 m2 «sur le bord de la mer dans la zone située entre la COMACOP et TOURS BLEUES» pour construire l’usine qui bénéficiera d’un régime de franchise et de quelques avantages supplémentaires : «a. pour les moyens de production : L’importation des matériaux de construction, de machines, outils et équipements et pièces de rechange ainsi que les engins et véhicules utilitaires en franchise de tous droits et taxes fiscaux ; Les extensions, modernisations et renouvellement bénéficient des mêmes exonérations. Les matériels ré-exportables introduits par des sociétés sous-traitantes, pour l’exécution de marchés de travaux réalisés pour le compte de l’investisseur, seront admis au régime de l’admission temporaire spéciale.
b. Pour l’exploitation : les matières premières, le diesel, les lubrifiants, les nourritures pour les employés expatriés et produits semi-finis nécessaires à la production ne donnent lieu à la perception d’aucun droit ou taxe à l’importation. (…)» Les avantages n’en finissent pas.
Exonération de l’IMF, 50% de la TPS, exemption TOTALE de patente ou tout autre impôt pouvant s’y substituer, des droits d’enregistrements, de timbre, de l’impôt sur le revenu des capitaux mobiliers…
Cela arrive au moment où la Mauritanie est en phase de préparation d’un nouveau Code d’investissement qui doit définir de nouvelles donnes pour tout investisseur. A un moment aussi où la Mauritanie souffle un peu après l’annulation d’une partie de sa dette extérieure très difficile à supporter ces dernières décennies. Les Conventions signées depuis 2008 avec les Chinois devraient avoir dépassé le milliard de dollars pour des réalisations qui ne coûteraient, en réalité, que dans l’ordre des 350 millions. A qui profite le crime ? That is the question. Comment dire ça en chinois ?»