mardi 10 juillet 2012

La leçon libyenne, oui, mais...


Ce sera la revanche de Mahmoud Djibril, le premier Premier ministre de l’ère post-Kadhafi qui s’est laissé démettre par les groupes révolutionnaires, principalement ceux de tendance islamiste. Sa coalition, l’Alliance des forces nationales (AFN), est en tête dans les résultats des premières élections libres de Libye. Elections qui doivent désigner les 200 membres du «Congrès national général», assemblée qui doit entre autres rédiger une Constitution nouvelle et éviter le fédéralisme. Pour ce faire quelques 2,8 millions d’électeurs étaient appelés à s’exprimer le 7 juillet.
Constat satisfaisant : le taux de participation qui a dépassé 63%, indiquant ainsi la volonté du peuple libyen de participer au jeu politique et à la démocratie. Le scrutin s’est passé sans grands heurts, même si l’on a signalé des actes de violence à Benghazi où des bureaux de vote ont été saccagés par les autonomistes.
L’avance des partis libéraux regroupés dans l’AFN sonne le glas des partis islamistes dont le parti de la Justice et de la reconstruction des Frères Musulmans. C’est donc la première défaite des FM à une élection faisant suite au «printemps arabe». En effet le fait d’avoir gagné en Tunisie puis en Egypte, faisait penser que les Islamistes seraient les grands gagnants de toutes les élections dans le monde arabe qui connait un reflux des idéologie et un retour aux sources qui profitent largement à une organisation dont le discours est resté proche des populations.
En fait de printemps, nous avons assisté à une saison «imprécise» qui a fait souffler le chaud et le froid, mais dont l’atmosphère est restée lourde de menaces d’orages et de tempêtes. On a été loin – on est encore loin, très loin même – de la douceur d’un printemps normal.
Avec la guerre civile en Libye, en Syrie, au Yémen… l’instabilité au Bahreïn, et même en Egypte où les marques des nouvelles autorités restent à fixer, et en Tunisie où les pressions conjuguées des salafistes et des ténors de l’ancien régime troublent l’évolution.
Elle est loin la «révolution arabe»… Loin de nous. Comme la première (celle qui a vu l’identité se définir par rapport à l’Empire Ottoman) et la seconde (celle qui a eu la bataille de l’indépendance et de l’unité comme moteur), la troisième révolution semble avorter. Une fois de plus elle a été détournée. Et si elle a effectivement servi à libérer certains peuples d’un joug qui n’a que trop duré, elle n’a pas encore permis le recouvrement de la dignité et de l’autonomie complète des peuples concernés.
C’est à peine si elle n’a pas servi ce qu’on nous disait combattre jusqu’à présent. Elle a permis une sorte de trêve avec Israël : la cause palestinienne est «oubliée», au moins temporairement, en tout cas elle n’occupe plus les esprits au moment où Israël fait ce qu’il a toujours fait.
Elle a permis la destruction des forces qui ont tenu tête jusqu’à présent à l’ordre hégémonique de l’Occident en général. En effet, personne ne peut prévoir le temps que prendra la reconstruction d’une Syrie viable après tant de destructions.
Elle a permis de dilapider tant de ressources financières provenant des richesses des pays du Golf en vue de payer les services des Armées conquérantes de l’OTAN et/ou d’armer les mercenaires et les groupes armés pour renverser tel ou tel régime.
A qui profite tout cela ?