jeudi 4 juillet 2013

Morsi : la chute

C’est finalement l’Armée qui a fait la différence en se rangeant du côté de la rue. Du coup l’opération de démantèlement de la confrérie des Frères Musulmans a commencé. Et avec elle une nouvelle ère dans la transition politique ouverte par la révolution du 25 janvier 2011.
Pourtant, les Frères Musulmans avaient tout fait pour verrouiller les portes de l’accès au pouvoir. Allant jusqu’à démettre les chefs militaires qui ont accepté de leur remettre le pouvoir après une élection plus ou moins libre et transparente. Pour les remplacer par de jeunes officiers supérieurs d’obédience islamiste. Mais quand est venu le moment crucial, l’Armée a fait son choix en demandant au Président élu, Mohamed Morsi, de dégager. Au-delà de l’évènement que nous suivons tous à travers les média internationaux et les plus brillants commentateurs, je crois qu’il ya lieu de soulever quelques remarques.
La première est liée à la révolution elle-même, une révolution dont l’aboutissement ne pouvait pas être celui-là : le passage d’un autoritarisme à un autre pour revenir à celui de départ.
La seconde est liée au parrainage de cette révolution fortement soutenue à partir du Qatar. Avec l’engagement de la machine de propagande qu’a fini par être Al Jazeera et le prédicateur Youssouf Al Qaradawi, en plus du soutien politique de l’ancienne équipe. Le changement à la tête de l’Etat du Qatar a son rôle dans le développement du processus égyptien.
La troisième est liée à la situation en Syrie devenue insoutenable pour les opinions publiques arabes qui y voient la volonté de détruire ce qui reste de la Résistance face à l’Etat hébreux.
La quatrième remarque découle de celle-ci : la deuxième révolution égyptienne devrait marquer le renouveau du nationalisme arabe : les photos du chef des Armées côtoyaient celles de Abdel Nasser.
Pour résumer, je dirai que nous assistons au retour de manivelle contre les manipulateurs des révolutions. Le zèle et l’excès de confiance dans le poids politique ont leurré les Islamistes qui ont vite oublié l’exigence d’un résultat et au plus vite. Ils ont continué à vouloir installer l’Egypte dans un cycle d’instabilité, de promesses imprécises, de futurs fuyants… cela s’est retourné contre eux.
Comme chez nous, la classe politique traditionnelle n’a pas compris que les changements «techniques» - changements des têtes des systèmes – signifiaient l’ouverture d’une ère de transition qu’il faut accompagner pour la faire aboutir un jour à quelque chose de viable, démocratiquement parlant. Ils ont voulu tout et tout de suite.
Une deuxième erreur largement partagée ici et ailleurs : le mépris du rôle des militaires. Il est facile de contester le rôle de l’Armée dans nos sociétés émiettées et fracturées, mais il est difficile de ne pas payer le prix de cette attitude.

C’est le lieu ici de repenser à cette société arabo-musulmane qui n’a jamais connu la dévolution pacifique du pouvoir et où la demande despotique est encore très prononcée. De se poser la question : quelle démocratie pour nous ? et comment travailler pour y arriver ?