mercredi 12 septembre 2012

Le 11 septembre libyen


Cela s’est passé à Benghazi, cette ville que l’OTAN a utilisée comme prétexte pour détruire le régime de Kadhafi en donnant «un coup de main» à la rébellion. C’est bien pour sauver Benghazi des troupes «barbares» que les pays du Traité atlantique ont dit entreprendre leur entreprise guerrière en Libye. C’est ici que les célébrations du 11ème anniversaire des attentats du 11/9 ont été les plus meurtriers pour les Américains, chefs de file de l’OTAN.
Dans la matinée du mardi 11 septembre, sous prétexte – il y a toujours un prétexte à tout – de protester contre la diffusion d’un film insultant pour la foi musulmane, un groupe armé est entré dans le Consulat américain de Benghazi. Comme par hasard, l’Ambassadeur Chris Stevens se trouvait là en compagnie de nombre de ses collaborateurs. On se souvient du visage sympathique de l’Ambassadeur du temps où il faisait des spots pour expliquer sa mission aux populations. L’attaque va emporter avec lui trois autres américains dont un diplomate et deux Marines.
L’attaque intervenait quelques heures avant l’élection d’un nouveau chef de gouvernement par le nouveau Parlement libyen. Elle a joué sans doute dans l’élection du candidat islamiste, l’opinion cherchant en eux le meilleur bouclier anti-jihadiste. Parce que l’attaque est bien le fait des Jihadistes, probablement ceux du groupe Ançar Echari’a (les soutiens de la Chari’a). Elle pourrait être une réponse – tardive peut-être, mais une réponse quand même – à la liquidation du numéro deux d’Al Qaeda, Abu Yahya Alliby, chef charismatique auquel plusieurs factions libyennes vouent respect et allégeance. Si cela se confirme, cela met l’administration américaine dans un pénible dilemme.
Le Président Obama est en pleine campagne pour une présidentielle de tous les risques. Si la réponse n’est pas ferme et surtout immédiate, tous ses espoirs de réélection pourraient être compromis. Si, par contre, la réaction est prompte et si elle répond aux attentes – expédition punitive et meurtrière contre le groupe qui a organisé l’attaque -, cela pourrait servir sa campagne.
Comment faire alors que les amis libyens n’ont pas les moyens de livrer les auteurs du crime ? Comment faire surtout si l’on sait que la partie libyenne ne peut rien entreprendre contre les groupes armés concernés qui ont, eux aussi, leurs assises tribales, leurs cercles d’influence, leurs poids au sein des structures dirigeantes… ?
Toute attaque américaine compromettrait sérieusement les équilibres déjà fragiles en Libye. Et ouvrirait la voie à toutes les fractures de la Libye de l’après Kadhafi.
Pour rappel, la première guerre outre-Atlantique menée par les Etats-Unis après leur indépendance fut celle dite de «la Tripolitaine». Quand en mai 1801, ce territoire exigea des Etats-Unis d’Amérique un impôt de 83.000$, plus que la somme habituelle payée en contrepartie de la protection de la flotte américaine contre la piraterie souvent soutenue par les autorités elles-mêmes. Le refus américain décida le Pacha à déclarer la guerre aux Américains qui s’empressèrent de bloquer le port de Tripoli. Ils connurent un premier revers avec la destruction de la frégate «Philadelphia» et la prise en otage de son équipage dont le Captain William Bainbridge. Ce qui donna lieu à une guerre qui dura entre 1801 et 1805 et qui se termina par un accord revenant à la situation ante et au paiement d’une rançon de 60.000$ pour les prisonniers.
Les souvenirs de cette époque sont toujours présents dans l’esprit des faiseurs de guerres comme ceux du Pentagone. Tout comme les images des ambassades américaines de Beyrouth et de Téhéran dans les années 70… dur, dur...