samedi 10 janvier 2015

Qui pleurera les milliers de morts africains

Paris s’apprête à accueillir une multitude de chefs d’Etats et de gouvernements dont des Africains et des Arabes venus exprimer leur solidarité avec la France et participer du coup au soutien de la liberté d’expression. Que de bonnes intentions pour des dirigeants responsables de plusieurs atteintes aux droits humains dont la liberté d’expression. Arabes ou Africains, ceux qui seront là ont pour la plupart quelque chose à se reprocher. Cabu, Wolinsky et les autres s’en gausseraient aigrement. Ils auraient tourné cette célébration en dérision et y auraient vu une simple parade des plus forts.
Nous pouvons être heureux, nous Mauritaniens de ne pas être représentés dans ce qui parait déjà comme une hyper manip. Notre Président, notre gouvernement n’a rien à faire au milieu d’un rassemblement où tout peut être dit, où tout peut arriver, y compris un bras-dessus-bras-dessous avec Benyamin Netanyahu…
Aussi peut-on se demander si les Africains présents auront le loisir de rappeler les milliers de morts du Nigéria, du Cameroun, du Mali, de Somalie, du Kenya…, si les Arabes vont dédier leur présence aux milliers de victimes algériennes, yéménites, irakiennes, syriennes, libyennes, tunisiennes, égyptiennes, jordaniennes… pour ne citer que les plus touchés. Est-ce ces chefs d’Etats présents auront à cœur d’associer la mémoire de toutes les victimes africaines du terrorisme ? Est-ce qu’ils auront la possibilité d’exprimer leur compassion aux peuples touchés, aux pays détruits ? Non ! d’ailleurs personne parmi ceux qui seront demain dans les rues de France et surtout pas les chefs d’Etats, personne n’aura une pensée pour nos victimes, pour nos sociétés, pour nos peuples, pour nos Etats. Nos morts ne comptent pas.
Il y a quelques jours l’obscurantisme frappait encore au Mali, au Nigéria, où est la communauté internationale ? que fait-on pour permettre le retour au calme et à la sérénité dans le Nord malien ?
Nous n’intéressons les puissants que dans la mesure où nous pouvons servir de sanctuaires pour les terroristes. Quand il y a eu la guerre contre Al Qaeda, on voulait la circonscrire dans les vallées encaissées d’Afghanistan, la prendre comme prétexte pour détruire l’Irak. L’Amérique, le Monde libre a fait la guerre à Al Qaeda. Il a détruit des pays, déstructuré à jamais des sociétés avec leurs systèmes de production, de commerce, de relations… Mais de nombreuses Al Qaeda sont nées par la suite.
Aujourd’hui ce Monde libre fait face aux déviances de ses propres enfants qu’il n’a pu intégrer, façonner. Il nous invite à partager avec lui ses douleurs, à pleurer ses morts, à panser ses plaies, à soigner ses fractures…
Qui viendra s’associer à nos douleurs à nous ? qui pleurera nos morts à nous ? qui pansera nos plaies à nous ? qui soignera nos fractures à nous ?
On ne prête qu’aux riches… on ne donne qu’aux riches… on ne fraternise qu’avec les riches…