jeudi 3 mai 2012

Hollande vs Sarkozy


C’était l’évènement, même pour certains d’entre nous. Regarder ce genre d’exercice me permet de voir, encore une fois, où est-ce que nous en sommes sous nos latitudes. En matière de capacités intellectuelles à pouvoir défendre un projet, de connaissances sur le pays et sur les sujets de gouvernance en général, de compétence en matière de prise de parole en public… et de dire nous sommes à des années lumières du monde moderne…
Cela me permet aussi de comprendre les enjeux, les préoccupations actuelles du monde dominant. Deux heures trente minutes de débats, parfois passionnés, sans un mot sur le «printemps arabe» que la France de Sarkozy déclare avoir accompagné (au moins en Libye et en Syrie). Si l’on a parlé de la Mauritanie, c’est dans le cadre de l’échange sur le terrorisme au Sahel. François Hollande a dit qu’il faut aider la Mauritanie et voir avec le Niger ce qui peut être fait. Nicolas Sarkozy a déclaré qu’il faut attendre l’élection d’un gouvernement légitime au Mali pour trouver des solutions définitives à la question, et en passant, il s’est félicité du modèle sénégalais et noté qu’en Mauritanie et au Niger «des élections parfaitement transparentes ont été organisées»…
Rien sur la Libye ou la Syrie ou l’Iran ou la Palestine… Comme si les deux candidats s’accordaient sur le fait de ne pas évoquer des sujets qui peuvent faire dévier le débat. Ou comme s’ils étaient d’accord sur la politique et l’approche mises en œuvre.
Sur l’appréciation des deux prestations, je retiendrai que j’avais d’un côté un politique selon l’acception de chez nous : agressif, à la limite de la vulgarité, prétentieux, ramenant tout à sa personne. D’un autre un homme d’une certaine hauteur, essayant, malgré le manque de maitrise de certains sujets, de présenter une vision globale de ce qu’il croit être les enjeux majeurs de son programme, relativement habile, avec un sens de la répartie qui ne lui fait pas oublier de rejeter les provocations et autres appels à la confrontation violente…
D’un côté Nicolas Sarkozy a joué la victime, puis le rempart contre les menaces qui pèsent sur l’identité de la France, sur son authenticité, sur ses équilibres sociaux…
D’un autre François Hollande qui s’est présenté en rassembleur, en homme de consensus et d’ouverture, en Président incarnant les valeurs humanistes qui font l’exception française.
L’élite politique de chez nous a beaucoup à apprendre de ce qui se passe ailleurs. nous ne le dirons jamais assez.

L’affaire Pélican


C’est un peu cette affaire d’autodafé commis par Birame Ould Abeidi et certains de ses compagnons, cette affaire qui continue à alimenter les discours politiques, chacun voulant en faire un cheval de bataille pour se relancer. Trop de gens voulaient une mort subite pour Birame et ce qu’il représente. Si certains reprochaient à Ould Abeidi de prendre en otage une cause qui mérite consensus, d’autres y voyaient un concurrent, sinon un danger qu’il fallait maitriser pour en faire un atout. C’est ce qui explique ses alliances avec les différents segments du paysage politique.
D’abord et surtout avec les partis formant la COD. Il fut un temps où les communiqués rendaient compte des rencontres des dirigeants les plus en vue avec le chef de l’IRA. Il a été même envisagé, à un moment, de lui confier la mise en place d’un gouvernement provisoire de transition quand «on» avait commencé à exiger le départ de Ould Abdel Aziz. Cela a été annoncé officiellement. Il a été démarché par tous ceux qui le dénoncent à présent.
Ce soir, au sit-in de la COD, des discours ont laissé entendre que l’IRA et donc Birame avaient des relations avec les renseignements. Saleh Ould Hanenna de Hatem a rappelé que l’organisation, non reconnue du reste, s’adonnait impunément à ses activités qui étaient largement couvertes par les médias officiels. Ce qui est faux, mais passons.
Dans un communiqué rendu public, l’ancien chef de l’Etat, le colonel Ely Ould Mohamed Vall croit savoir que les autorités, au courant bien avant les faits, pouvaient empêcher l’autodafé. En arrêtant Birame et ses amis ? C’est ce qui est dit implicitement. Les vieilles méthodes du temps de l’ancienne DGSN. Des méthodes qui ont décrédibilisé toutes les actions de la police. Parce qu’on avait fini par croire que tout ce que la police entreprenait visait la fabrication du faux.
Avait-on besoin de tant d’acharnement sur Birame et ses amis de la part de la COD et des personnalités politiques en vue ? C’est bien une manière, pour ceux qui étaient mêlés avec lui dans un même projet, de se démarquer le plus possible de la personne. Et pour ceux qui y voyaient un écueil de le liquider définitivement.
On peut comprendre que le pouvoir trouve dans cette affaire l’occasion de régler des comptes à ses adversaires «imprudents». Mais pour la COD, quel intérêt à charger Birame ?
Encore que pour les Islamistes de Tawaçoul, il y a un terrain à (re)conquérir, celui de la conscience islamique, véritable ciment, seul catalyseur et inspirateur de la ferveur de notre société. Après avoir considéré que la cause de Birame pouvait être un facteur de déstabilisation du régime, et, pour cela avoir essayé de l’exploiter dans la perspective révolutionnaire, il fallait bien se reprendre pour éviter de s’aliéner la masse qui ne veut pas qu’on touche à ses fondamentaux.
Mais pour les autres partis de la COD, à quoi cela sert-il de dire que Birame est un agent des renseignements ou qu’il a été manipulé ? Rien. D’autant plus que cela ne peut être crédible.
Birame est un excité dont les positions déjà radicales, ont été soutenues par certaines grandes figures (religieuses et politiques). N’ayant pas la stature de Mufti, il a, comme nous tous, entendu ceux de nos Ulémas qui nous répètent que tout ce qui est venu après le Texte (Coran) et la Sunna est une création de l’homme, une innovation satanique probablement et qu’il ne fallait pas lui vouer une sacralité. Il a voulu frapper un grand coup. Il l’a fait dans la mesure où il a dérangé la quiétude de tout le monde.
Que ceux qui le trouvaient fréquentable et qui le célébraient parfois ne s’en désolidarisent pas. Pas si allègrement quand même…