vendredi 2 septembre 2011

Comeback diplomatique


La présence du Président Mohamed Ould Abdel Aziz au sommet de Paris conclut un cycle diplomatique qui a obligé les autorités mauritaniennes à s’exercer à un équilibrisme qui n’a pas été forcément compris par tous leurs partenaires.
Cet exercice a commencé par la condamnation, ferme, de toute utilisation de la violence par le régime de Kadhafi contre les populations. Nous sommes le 25 février, seulement une semaine après le début de la révolte populaire. La Mauritanie se retrouvera à la tête du panel des chefs d’Etats désignés par l’UA pour travailler sur le dossier. Parce que notre pays présidait le Conseil de Paix et de Sécurité. Dès lors, la diplomatie du pays s’est retrouvée dans l’obligation de garder une égale distance entre les belligérants de ce qui est devenu une rébellion armée avec une dimension internationale marquée par l’intervention de l’OTAN.
Aux parties libyennes, le Président Ould Abdel Aziz, chef du panel, répètera que ceux qui meurent sont des libyens, que les bombes détruisent les infrastructures libyennes, que c’est leur pays qui est en danger de partition… et qu’il va falloir trouver une solution négociée en ayant comme base de discussions la feuille de route de l’Union Africaine.
Un souci qui doit avoir pesé sur la position mauritanienne : le souci sécuritaire. Dès le début de l’insurrection, tout le monde a vu l’engagement sur le terrain du Groupe libyen de combat et de prédication (GLCP), filiale locale de l’ancien GSPC devenu AQMI. Tout le monde a vu aussi le mouvement extraordinaire d’armes et de combattants partis de la Libye pour aller dans la zone saharo-sahélienne. Ce que la Mauritanie, mais aussi l’Algérie ont senti comme une menace directe sur la sécurité et la stabilité de la région. D’où les appréhensions des uns et les hésitations des autres.
Ce qui n’a pas empêché le Président Ould Abdel Aziz de dire très tôt que Kadhafi ne pouvait plus diriger la Libye et qu’il devait laisser la place pour l’expression du peuple libyen.
La fin de la Libye de Kadhafi ouvre d’énormes opportunités diplomatiques à la Mauritanie. Tout comme elle met fin à une menace qui a toujours pesé sur la stabilité politique du pays par les multiples ingérences et interférences du Guide dans les affaires intérieures mauritaniennes.
Cette fin signifie le retrait des dollars libyens de l’espace africain et, peut-être, le retour des canaux «traditionnels» de contact entre les ensembles arabe et africain. Parmi ces canaux, l’existence d’une diplomatie visant à faire jouer à notre pays son rôle naturel d’interface des deux mondes. Cette vocation naturelle détruite par près de trois décennies d’atermoiements et de navigation à vue, est vitale pour la Mauritanie qui ne peut vivre sans l’ancrage ferme dans ses appartenances arabe et africaine. Seule le Soudan, parmi les pays arabes, aurait pu jouer ce rôle. Mais ce pays a été incapable de gérer sa diversité, ce qui a mené à la partition du Sud.
Le retour sur la scène africaine de la Mauritanie est une option diplomatique qui mérite l’encouragement. Elle fait revenir le pays dans son environnement naturel. Et le tranquillise sur son appartenance, riche par sa diversité.
En attendant le développement futur de ce comeback, rappelons ces phrases de Ould Abdel Aziz devant la conférence de Paris : «Avec la CHUTE DU REGIME DU COLONEL KADHAFI et le contrôle de Tripoli et de la majorité du territoire par les forces du CNT, nous formulons le vœu ardent que la sécurité, l'ordre et la stabilité règnent à nouveau dans ce pays, d'intérêt stratégique pour notre sous région et notre Continent, afin qu'il puisse sauvegarder son intégrité territoriale et son unité et préserver sa paix civile. Le Conseil de Paix et de Sécurité de l'Union Africaine réuni à Addis Abeba, le 26 août dernier, a lancé un appel en faveur de la formation d'un Gouvernement de Transition, inclusif, qui occupera tout naturellement le siège de la Libye au sein de l'Union Africaine».