mardi 15 avril 2014

Quiproquos et susceptibilités

On est passé à la deuxième phase du dialogue, celle qui devait déterminer le chronogramme à suivre pour arriver à un accord. Ceux du Forum national pour la démocratie et l’unité (FNDU) ont proposé un délai allant jusqu’au 1er mai, alors que les deux autres pôles ont demandé à tout finir au plus tard le 20 avril.
Derrière ce premier écueil se cache la volonté des uns de faire dépasser le délai légal de convocation du collège électoral, date qui doit être obligatoirement le 21 avril. Ce n’est pas la seule «manœuvre» de l’une ou l’autre des parties. Même la base sur laquelle est engagé le dialogue relève d’un quiproquo plus ou moins voulu.
Pour le FNDU, il s’agit de dialoguer directement avec le Pouvoir. Ils ont exprimé ce désir en insistant sur la présence de membres du gouvernement : c’est la raison de l’entrée en scène de Me Sidi Mohamed Ould Maham, ministre de la communication par ailleurs premier vice-président de l’Union pour la République (UPR), le parti au pouvoir. Le renforcement de la délégation par la présence du ministre de la Justice, Sidi Ould Zeine, n’a pas changé la donne parce que Me Ould Maham est resté président de la délégation de la Majorité.
«Ce n’est pas avec la Majorité encore moins l’UPR que nous voulons discuter, mais avec le Gouvernement. Quand on voit la composition de la délégation on comprend qu’on refuse d’accepter que le FNDU n’es pas là pour faire face à un autre pôle (CAP, ndlr) ou un groupe qui ne peut rien décider». Le commentaire va plus loin : «tant qu’on ne revient pas au respect de la préséance dans le gouvernement, on croira toujours qu’on veut nous imposer une structure dont on ne veut pas». Autrement dit, c’est Sidi Ould Zeine qui devait diriger la délégation pour le dialogue pour convaincre le FNDU qu’il discute avec le gouvernement et non ses «ombres».
En plus de ce niveau d’«incompréhensions» et manœuvres plus ou moins dilatoires, il y a eu l’épisode de la confection des délégations qui a vu les trois pôles obligés d’élargir le nombre de leurs représentants à 11 au lieu de 7 prévus initialement. Tout ça pour permettre à toutes les tendances d’être représentées. Si le groupe n’avait pas été élargi, certaines personnalités n’auraient pas fait partie du conclave.
Autre remarque équivalent à un quiproquo, c’est le fait de se retrouver ensemble, en train de décider pour nous à un moment crucial de l’histoire politique du pays, les plus caciques du défunt PRDS (parti républicain social et démocratique au pouvoir de 1991 à 2005, responsable de tous les déboires du pays durant tout ce temps). Revoyons les listes des représentants des trois pôles aujourd’hui en conclave :
Pour la Majorité : Me Sidi Mohamed Ould Maham, Sidi Ould Zeyne, Zeynebou Diallo, Mohamed el Mokhtar Ould Zamel, Sidina Ould Didi, Mohamed Ould Babana, El Moudir Ould Bouna, Ethmane Ould Eboulmaali, Beyta Allah Ould Ahmed Leswad, Mohamed Val Ould Youssouf, Samory Alassane ;
Pour le FNDU : Yahya Ould Ahmed Waqf, Saleh Ould Hanenne, Lô Gourmo Abdoul, Ahmed Ould Lafdhal, Mohamed Ould Bourbouç, Cheikhani Ould Boybe, Mohamed Val Ould Belal, Sarr Mamadou, Niang Amadou (CGTM), Samory Ould Beye (CLTM), Mohamed Ahmed Ould Salek (CNTM) ;
Pour la CAP : Abdessalam Ould Horma, Emanatoullah Ould Bakh, Idoumou Ould Abdi, Ahmed Khayrou, Sidi Mohamed Ould Abidine, Mokhtar Ould Haye, Ladji Traoré, Ahmed Ould Abdallahi, Mohamed Ould Yarg, Mohamed Lemine Ould Kettab.
On se connait entre nous, vous allez excepter au maximum six personnes, tous les autres ont, à un moment ou un autre, soutenu l’arbitraire, exercé l’injustice, couvert les malversations, justifié les dérives autoritaristes… Tous ceux-là ont toujours combattu la démocratie et les valeurs humanistes qui doivent animer une société démocratique…

C’est dire que les Mauritaniens ont mis en risque l’avenir de la démocratie… Espérons quand même qu’il en sorte quelque chose.