jeudi 31 octobre 2013

Zèle, acharnement ou maladresse ?

Ahmed Ould Khattri, ancien directeur de PROCAPEC, a été empêché de se présenter aux élections législatives au niveau de R’Kiz, suite à une démarche initiée par le Parquet général qui a écrit à la CENI pour signaler que l’intéressé ne pouvait se présenter parce qu’il est sous le coup d’une «condamnation». Démarche singulière et inappropriée.
Singulière parce que le Parquet n’a aucun mandat pour interpeller la CENI. Rien dans la loi électorale, ni dans la pratique n’ouvre la voie au Parquet pour une telle interférence. A la limite, le Parquet ne sait même pas qui se présente et sous quelles couleurs. Il doit être pris par le suivi des enquêtes sur les viols et meurtres, par les affaires pendantes devant les juridictions, et non par l’épluchement des listes candidates pour savoir qui peut et qui ne peut pas se présenter.
Inappropriée parce que si le Parquet est très au fait de qui est qui parmi les candidats, il aurait interdit la candidature à d’autres personnes, notamment à ce candidat qui se présente en bonne place sur la liste UPR et dont la procédure judiciaire vient de se terminer pour le faire bénéficier d’une «liberté provisoire» qui ne le soustrait pas normalement à la situation de "poursuivi". Et si Ould Khattri avait été candidat UPR, aurait-il fait l’objet de la même démarche ? si non, pourquoi ne pas entamer la démarche contre cet autre candidat ?
Inappropriée aussi parce que nous sommes en phase de crédibilisation d’élections qui font déjà l’objet d’objections plus ou moins objectives avec notamment l’absence d’une partie de l’opposition (boycott), les lenteurs de la CENI l’organe chargé d’organiser ces élections, la culture du doute devenue un élément essentiel de la réalité mauritanienne… Trop de choses peuvent être invoquées par ceux qui ne veulent pas de ces élections – et ils sont nombreux parce qu’ils se trouvent aussi dans la Majorité et chez les «participationnistes» -, trop pour prêter le flanc ou pour créer de nouvelles sources de suspicions et de doutes.
C’était à la CENI de voir par elle-même si Ahmed Ould Khattri a un dossier complet, auquel cas l’accepter, sinon le rejeter. Pas besoin d’une interférence du Parquet parce que les concurrents de Ould Khattri et du parti Tawaçoul sous les couleurs duquel il voulait mener campagne, auraient pu émettre des réserves. A ce moment-là, les services concernés – peut-être le Parquet – seront interpellés pour rétablir le droit. C’est ce qui devait être…
L’interférence du Parquet trouverait sa justification dans l’établissement d’un casier judiciaire «vierge» à Ould Khattri. N’est-ce pas un cabinet d’un tribunal, un service du secteur de la justice qui établit ce genre de document ? A qui la faute si dans notre pays, on peut établir un document comme celui-là ? A qui la faute si dans ce pays, des hommes, sous mandat, d’autres en liberté conditionnelle ont été, par le passé, nommés ministres ? Cela fait partie de la déliquescence du secteur de la Justice, déliquescence née de plusieurs décennies d’inféodation, d’incohérences, d’impunité, de poursuites ciblées, de décisions qui n’ont aucun rapport avec la Justice, d’arbitraires… (tout le reste a été dit)… C’est cette situation qui devait être corrigée depuis août 2005. Mais la réforme a toujours été remise à plus tard à cause des «urgences politiques» : le débat politique occultant toujours l’essentiel.
Qu’on donne à Ould Khattri ou à quelqu’un d’autre un certificat attestant qu’il ne souffre aucune poursuite judiciaire et qu’il n’a jamais été condamné, qu’il est donc dans la situation normale d’un citoyen normal, cela relève d’un dysfonctionnement de la Justice qui lui-même n’est que la partie visible d’un iceberg de dysfonctionnements : tout ce qui fait qu’aujourd’hui aucune action de la Justice ne peut être comprise ou justifiée aux yeux du citoyen lambda. C’est cette situation qu’il faut corriger un jour ou l’autre. Si le Parquet avait ordonné une enquête sur l’établissement de ces casiers judiciaires et sur les autorités qui les établissent, cela aurait eu le résultat escompté : les challengers de telle ou telle liste auraient engagé une procédure de contestation et le dossier aurait fini devant le Parquet pour conclure. Plus adroitement, en prêtant moins le flanc aux critiques et en laissant peu de place aux interprétations fallacieuses ou non.

En décidant de passer outre et d’en faire une affaire personnelle visant la seule personne de Ould Khattri et en s’abstenant de poursuivre d’autres personnes dans la même situation que lui, le Parquet a laissé la porte ouverte aux interprétations les plus dangereuses. En s’abstenant de poursuivre les autorités qui ont établi les casiers judiciaires, le Parquet évite de corriger le plus évident et le plus dangereux des dysfonctionnements de la Justice.

mercredi 30 octobre 2013

AQMI, la nouvelle énergie

Quoi qu’en disent les autorités françaises et quoi qu’on appelle ce qui a été versé – «rançon», «compensation», «contrepartie»… -, il est sûr qu’une grosse somme a été versée à ceux qui détenaient les quatre otages. 20-25 millions d’euros peut être une fourchette indicative quand on sait que pour libérer les trois premiers otages (un togolais, un malgache et l’épouse Larribe), les sociétés françaises ont dû verser plus de dix millions d’euros.
Sitôt empochée, la somme va servir d’abord à arroser les intermédiaires, puis à huiler les réseaux de la clientèle tribale des groupes terroristes  et enfin à s’acheter de nouvelles armes. Il suffira pour eux de se rendre dans le Sud libyen pour trouver l’armement le plus sophistiqué pour faire face aux forces de la MINUSMA et celles françaises encore déployées dans le Nord malien, sinon à frapper ailleurs pour étendre le conflit aux pays de la région.
Alors que la France accueillait triomphalement ses ex-otages, les Jihadistes attaquaient Gao à coups de mortier. Ils savent qu’avec une opération spectaculaire, ils peuvent reprendre du poil de la bête et recommencer à recruter parmi la jeunesse désemparée de l’espace sahélo-saharien.
La libération des otages est certes un évènement heureux pour tout le monde, surtout pour les Français qui récupèrent ainsi quelques-uns des leurs, mais en terme de victoire, il faut la mettre à l’actif des terroristes parce qu’ils auront vaincu les réticences françaises quant au paiement des rançons. Ils auront prouvé par la même occasion leur capacité à imposer leur diktat au pays qui continue de les bombarder. Avec, en prime, la préservation de la santé des otages malgré la situation difficile créée par la guerre dans le Nord malien. Sur tous les plans, ce sont les ravisseurs, les criminels de guerre qui en profitent.
Le plus grave est que la somme versée va servir immédiatement à équiper des unités combattantes qui ont pour objectif de bouter les Français hors de la région. D’où le refus de reconnaitre que de l’argent a été versé aux ravisseurs. Quitte à recourir à des formules ridicules comme «aucun argent public» n’a été versé. A supposer que l’argent versé appartienne à Vinci et Areva, les deux sociétés françaises pour lesquelles travaillaient les ex-otages, en quoi cela change-t-il les donnes ? Ces sociétés ne sont-elles pas «publiques», au sens de propriété «publique» ?
Querelle de mots qui aura des conséquences politiques certaines sur la politique intérieure française dans les jours qui viennent.
Au niveau de la zone Afrique, particulièrement Sahel et Sahara, les pays ne doivent pas laisser passer cette reculade française sur un principe que tous voulaient imposer au monde. L’Algérie et la Mauritanie en premier ont intérêt à se prononcer sur la question. Tout versement de rançon est dangereux rien que parce qu’il incite à continuer sur cette voie et qu’il entretient cette «économie de la traite des personnes» qu’est la prise d’otages. 

mardi 29 octobre 2013

Les otages d’Arlit libérés

Inattendu et surprenant ! Le Président français François Hollande annonce ce soir la libération des quatre otages enlevés en septembre 2010 sur le site minier d’Areva à Arlit au Niger. Le Président Hollande est au plus bas de sa forme, les derniers sondages l’accréditent de moins de 24% d’opinion favorable et la courbe s’en va descendant. La gestion faite de l’affaire Leonarda, du nom de cette jeune kosovare expulsée de France, n’a fait qu’user l’image déjà ternie d’un Président qui se bat vainement contre une crise économique et sociale qui ne semble pas s’atténuer. Pour la troisième fois, c’est donc le théâtre des opérations au Nord du Mali qui donne un nouveau souffle au Président français.
Le bonheur des parents et des retrouvailles en général va cacher momentanément – peut-être le temps de reprendre le souffle – les questions essentielles qui entourent cette libération. En attendant d’en savoir plus, l’on peut rapporter le récit qui fait déjà le tour du monde.
Les négociations auraient repris il y a quelques mois. La diffusion par les ravisseurs de la vidéo il y a six semaines environ, faisait partie du processus de négociations : il fallait donner une preuve de vie des otages après tant d’accrochages dans la région où ils sont sensés être détenus.
Le Président du Niger entre en ligne et fait actionner ses réseaux à travers un ancien ministre de l’environnement Mohamed Akotey qui est secondé par un ancien membre de la DGSE française qui préside (ou qui est lié) à une société privée de sécurité.
On sait que depuis la débandade des groupes jihadistes sous les coups répétés des forces françaises, et surtout depuis la mort de Abu Zeyd, le redoutable chef de la Katiba Tarek Ibn Zeyad responsable de l’enlèvement. Depuis ce temps, les otages sont entre les mains d’un groupe prêt à négocier.
On sait aussi que l’influence du chef de Ançar Eddine Iyad Ag Ghali restant intacte, les otages sont devenus une partie prenante de la problématique du Nord. Leur sort est désormais lié au processus de règlement de la question du Nord. Ce n’est donc certainement pas par hasard que le gouvernement malien a annoncé ce matin-même l’annulation de quelques mandats d’arrêt qui visaient certaines grosses pointures de l’aristocratie devenue élite politique locale.
La DGSE qui avait implanté un bureau à Gao, savait parfaitement que ce sont les filières touarègues qu’il faut désormais activer pour avoir un répondant. Ne pouvant plus passer par Bamako, c’est naturellement le Niger qui devait servir d’interface. Exit aussi le Burkina Faso et son incontournable président dans ces affaires-là.
Comme le rapporte déjà la presse, la libération a été obtenue jeudi dernier. Mais les modalités d’échange (de quoi ?) devaient prendre le temps nécessaire de vérifier qu’on n’est pas floué. Pour chacune des parties. Depuis dimanche (28/10), les otages ont été récupérés. Restait la mise en scène qui devait suivre. Le timing est choisi. L’évènement peut être annoncé par le Président depuis Bratislava en Slovaquie…

Selon les premières informations, une somme de 20 à 25 millions d’euros a été versée pour obtenir cette libération. Si le gouvernement français refuse de reconnaitre qu’il a versé une telle somme, ce serait donc Areva qui a payé pour ses employés. Quelle différence ?

lundi 28 octobre 2013

A quand l’Observatoire du Sahel ?

Il s’agit d’un projet qui vise à installer un Observatoire du Sahel en Mauritanie qui couvrira la Mauritanie, le Mali, le Niger, le Sénégal et le Burkina Faso. Le choix de la Mauritanie s’explique par «son positionnement géographique et stratégique» et son rôle pionnier dans la lutte contre le terrorisme.
C’est pourquoi, les initiateurs du projet se battent actuellement pour avoir un répondant dans notre pays. Ayant eu l’aval de notre ambassade à Genève, ils attendent encore que le ministère du développement réagisse. Les objectifs de l’Observatoire peuvent être résumés ainsi :
- fédérer derrière un projet transversal et pluridisciplinaire visant à repenser les enjeux de sécurité et de développement au Sahel dans la lutte contre l'extrémisme violent et le terrorisme au Sahel ;
- Créer une interface entre le milieu des praticiens et la société civile afin de faciliter le débat sur les questions susmentionnées
- Soutenir la recherche dans la sous-région, notamment à travers des approches empiriques et de terrain
- Tenir une conférence (dans les mois à venir) à Nouakchott, dans le but de dynamiser l'ensemble du projet et susciter la réflexion autour d'une problématique pré-définie et produire un rapport d'activités sur les principaux éléments de ledit évènement.
- Enfin, il s'agira d'accentuer les efforts de la recherche sur des thématiques peu ou mal comprises que sont les questions liées à la gouvernance, à la jeunesse, à l'islamisme et aux trafics en tout genre qui affectent la région et au delà.

Il faut signaler enfin que l’Observatoire sera l’interface pour l’UNIDIR (United Nations Institute for Disarmament Research), basé à Genève et qui lance un projet de recherche sur le Sahel. Un projet qui vise à analyser les limites des politiques de coopération dans la lutte contre l'extrémisme violent et le terrorisme dans la sous-région. C'est un projet transversal (analyses des dynamiques locales, régionales et internationales) et pluridisciplinaire (prendre en compte les domaines de la sociologie et de l'anthropologie, notamment les variables historiques et géographiques de la sous-région afin de contrebalancer les discours et approches sécuritaires qui sont limitées au vu de l'évolution du terrorisme au Sahel).

 De plus, à travers ce projet d'Observatoire au Sahel, la Mauritanie se trouvera de facto impliquée dans la mise en place des structures nécessaires pour une meilleure compréhension des enjeux de sécurité et de développement dans la sous-région et au delà.

dimanche 27 octobre 2013

Qui va défendre la CENI ?

La CENI est l’objet de toutes les attaques. Et ça vient de commencer. Parce que les Mauritaniens cherchent toujours un responsable à leurs déboires, les politiques plus que le citoyen lambda. Je ne sais pas pour vous, mais j’ai rarement vu un Mauritanien - noir ou basané, gris ou clair - reconnaitre ses erreurs et assumer la responsabilité de ce qui lui arrive comme conséquence de ses choix et de ses positionnements souvent hasardeux. Même quand vous reprochez à quelqu’un ses tendances à user de mensonge dans telle ou telle situation, il vous dit fatalement : «Ce n’est pas exprès, mais que veux-tu ? les gens te poussent au mensonge à force de te presser…» C’est bien parce que vous l’avez «trop regardé» qu’il a brûlé le feu rouge entrant en collision avec une voiture qui venait dans l’autre sens. Parce que vous l’avez «appelé au téléphone» qu’il a finalement renoncé à la mosquée pour faire sa prière d’Al Maghrib… n’importe quoi pour éviter de faire face à lui-même.
Les critiques dont la CENI est aujourd’hui l’objet sont peut-être fondées, pour certaines d’entre elles, mais elles ne justifient pas la violence des propos tenus, encore moins la stigmatisation dont ses membres et son président font l’objet. Une violence qui prépare – et entretient – un climat délétère, une atmosphère faite de tension et de rejet. C’est comme si on voulait discréditer à l’avance le travail qui sera fait. C’est de bonne guerre s’il s’agissait seulement des partisans du boycott qui feront tout pour faire échouer les futures élections dont la réalisation dans un minimum de «normalité» va les mettre définitivement hors jeu. Mais l’hostilité vis-à-vis de la CENI devient dérangeante quand elle s’exprime à travers les propos de ceux qui ont choisi et ses textes fondateurs et son appareil dirigeant. Comment comprendre cette focalisation des partis ayant participé à la confection de cette institution sur les défauts de la CENI ? Comme s’il ne s’agissait pas de choix qu’ils ont faits.
Quand la première mouture du texte fondateur de la CENI a été rejetée par le Conseil constitutionnel, il y a eu une campagne pour demander aux protagonistes du dialogue de faire en sorte de ne pas limiter le conseil des Sages aux plus de 60 ans. Ils ont refusé et sont allés au-delà de 60 ans pour tous ses membres. Prétextant qu’il est difficile de trouver dans les moins de 60 ans, l’indifférence, la neutralité, l’expérience nécessaires au travail demandé. Messaoud Ould Boulkheir, Boydiel Ould Hoummoid, Abdessalam Ould Horma, Mohamed Mahmoud Ould Mohamed Lemine, Ahmed Ould Bahiya et tous ceux qui ont participé au dialogue ont sélectionné ceux qu’ils croient être les plus pourvus : Abdallahi Ould Soueid’Ahmed, Ahmed Ould Ghnahalla, Moulaye Ahmed Ould Hasni, Pr Ba Mohamed Lemine, Dr Manthita Tandia, Memed Ould Ahmed et Mohamedhen Ould Bagga.
Aucun de ceux-là n’était connu du grand public, du moins pas pour ses précédents politiques compromettants. La principale critique émise au lendemain de leur nomination était surtout liée à l’âge et à la capacité de mettre en œuvre le processus électoral bloqué à l’époque.
On sait, tout le monde sait, que ces hommes et femme peuvent se tenir à égale distance des protagonistes politiques. Tout le monde sait qu’aucun d’eux ne peut faire l’objet d’une suspicion quant à la recherche de l’intérêt national et au sens de l’équité. Ils peuvent faire des erreurs, des mauvais choix. Ils ont peut-être fait de mauvais choix, certainement des erreurs. Mais ce n’est pas pour cela qu’il va falloir les disqualifier avant de les voir diriger le match tant attendu.
J’ai lu et entendu une grande adversité vis-à-vis de Ould Soueid’Ahmed et de ses compagnons. Elles ne sont tout simplement pas justes et relèvent de l’acharnement. Le niveau du langage, le contenu des critiques, l’absence de propositions alternatives, le manque de volonté de pousser vers une meilleure attitude, de meilleurs procédés… tout cela indique les véritables desseins.
D’une part, des partis qui préparent l’opinion à leurs résultats qui seront le reflet de l’appréciation publique de leurs actions. D’autre part, cette propension, devenue sport national, à toujours noircir le tableau. Comme si la réalité ne suffisait pas et comme si tous ne sont pas responsables de cette situation qu’ils prétendent décrier.

Quelqu’un que j’aime beaucoup me rappelait récemment ce que Gandhi avait dit : «Soyez le changement que vous voulez voir dans le monde» ! Chacun de nous doit faire sienne cette sagesse.

samedi 26 octobre 2013

Sur la ligne de départ

A la date limite fixée par la CENI, 440 listes candidates aux législatives dont le premier tour est prévu le 23 novembre, ont été déposées par une soixantaine de partis et coalitions de partis (environ 58 partis participent à ces élections). 428 listes appartiennent à des partis et 12 à des coalitions.
58 listes ont été déposées pour la liste nationale qui comprend 20 sièges, 29 listes de femmes ont été déposées pour la liste nationale réservée aux femmes. Les deux listes nationales font partie du lot soumis à la proportionnelle. Ce qui complique la tâche aux grands partis et ouvre les portes aux plus faibles.
Sur le plan régional, Nouakchott arrive naturellement en tête avec 43 listes déposées pour 11 sièges à pourvoir (proportionnelle). Le Hodh Echergui avec 42 listes, le Hodh el Gharby avec 29 listes, l’Assaba avec 32 listes, 33 listes au Gorgol, 34 au Brakna, 33 au Trarza, 16 en Adrar, 30 à Nouadhibou, 12 au Tagant, 24 au Guidimakha, 18 au Tiris Zemmour et 7 en Inchiri.
La ville où il y a le plus de protagonistes est Kiffa où 17 listes ont été déposées. Ici la proportionnelle va jouer. Alors que pour les municipales, 9 listes sont inscrites et deux d’entre elles seulement devront aller au second tour pour se départager définitivement.
A Tamchekett (Hodh el Gharby), Chinguitty (Adrar), Wadane (Adrar), Tichitt (Tagant) et Bir Mogreyn (Tiris Zemmour), 2 listes seulement se font la concurrence. Ce qui ne veut pas dire que la course n’est pas aussi passionnée qu’ailleurs. Le duel qui devra être le plus suivi est celui qui va opposer Dr Louleid Ould Wedad, député depuis toujours de Wadane et candidat d’El Wiam au jeune candidat de l’Union pour la République (UPR), Sidi Baba Ould Lahah. Tout les oppose : les ancrages politiques qui font que l’un appartient au vieil Appareil de l’avant août 2005 et l’autre à l’après ; le conflit générationnel, l’un appartient à la classe politique traditionnelle, l’autre se propose comme relève… en plus de tous les autres protagonismes que les observateurs ne manqueront pas de trouver et qui animeront la campagne dans un bled perdu, abandonné depuis sa mise en quarantaine par le Quai d’Orsay (Wadane est au centre de la fameuse Zone rouge).
Les listes ont encore jusqu’au mardi 29 octobre à minuit pour faire les réaménagements nécessaires et pour compléter leurs dossiers. Rappelons que de quelques candidats, notamment UPR, ont retiré leurs candidats, certains d’entre eux préférant aller sous d’autres couleurs. C’est le cas de deux des candidats UPR de Kobenni qui ont finalement été cooptés par El Wiam : Fatma Mint Eli Mahmoud, activiste dans l’humanitaire, et Babah Ould Ahmed Babou, député sortant. Tous deux sont fortement soutenu par Mohamedou Ould Cheikh Hamahoullah, le Chérif de Nioro qui entend régler ses comptes avec ses adversaires politiques dans la région pendant ces élections, d’où l’importance des enjeux.

Rappelons que les listes municipales ont été définitivement validées par la CENI. Douze partis ont dépassé le cap des 20 candidatures : UPR (218 listes), Tawaçoul (155 listes), APP (150 listes), El Wiam (103 listes), Sursaut de la Jeunesse (95 listes), UDP (38 listes), Sawab (38 listes), Vadila (35 listes), RD (29 listes), Ravah (26 listes), PUD (24 listes) et PRDR (22 listes).

vendredi 25 octobre 2013

Une soirée Maalouma

D’abord l’ârdine, avec un flux intense, sans agressivité cependant, sans violence aussi… juste une série de sonorités qui vous transpercent… doucement… pas lentement, mais doucement… qui vous transportent… La voix de Maalouma arrive pour vous baigner dans l’univers du plus romantique des poètes amoureux de l’espace Bidhâne, M’hammad Wul Ahmed Youra, le génie de tous les temps de cet espace…
«shmeshâna wu shga’adna/âana wunta hawn uhadna
yal ‘agl ‘la daar Inzdna/giblit sâhil wâd Hnayna…»
Pendant qu’on s’oublie dans la méditation de ce dialogue que le poète entreprend avec son âme ingrate parce que voulant quitter ces lieux sans se donner le temps de pleurer le bonheur ici vécu, sans se souvenir pour rendre aux lieux quelques bribes du bonheur d’antan, en signe de reconnaissance…
…«mâ vit âna wunta lathnayn/viddâr g’adna wu bkayna
wu tmathnayna viddâr ilayn/min haq iddâr tnajayna»
Comme pour venir en écho au poète Lamartine qui, lui, interpellait le temps qui passe :
«Eternité, néant, passé, sombres abîmes,
Que faites-vous des jours que vous engloutissez ?
Parlez : nous rendrez-vous ces extases sublimes
Que vous nous ravissez ?» (Le Lac)
On est perdu dans la comparaison des approches dans l’expression du bonheur perdu… en pensant que M’hammad a voulu faire de ce temps (qui n’est pas perdu pour lui), un espace qu’il vénère et pour lequel il exprime une profonde gratitude… Lamartine qui s’en prend à «ceux» qu’il croit responsables du vol de son bonheur…
Et dans tout ça, la voix douce et mélancolique de Maalouma… On suffoque sous l’emprise de la complainte quand, soudain sortent les sonorités de la tidinît de Mokhtar Wul Meydah, le père de Maalouma… Il joue sa célèbre partition «Gwoyridh»… «dent-daan-denna-det-denadenadenna-den…»
Une voix unique en son genre. Un jeu unique d’une tidinît unique… On plonge dans le passé… au sens de l’ancrage, du retour aux sources, de l’immersion dans l’Originel, de la restauration de l’Authentique, de la reprise du chemin perdu, celui de la création et de l’innovation…
Retour à Maalouma, à l’ârdîne et à la poésie de M’hammad… le moment de flottement qui devrait se comparer avec celui de l’ivresse… qui met les sens aux aguets… tous les sens… quand arrivent les voix d’un chœur chantant un rap des plus modernes… avec des mots qui célèbrent la vie et qui donnent espoir…
Silence. Méditations. On est encore sous les effets de cette magie qui associe ancien, moderne et postmoderne dans une harmonie parfaite…
«Gwoyridh» est un élément d’un ensemble, celui du nouvel album de Maalouma Mint el Meydah et qui porte le nom évocateur de «Knou», ce rythme si apprécié par les connaisseurs de la musique traditionnelle qu’ils ont souhaité l’entendre joué dans tous les modes. Certains le jouent dans le Vaghu de la Jamba el Kahla (la Voie noire), dans le K-hâl de la Jamba el baydha (Voie blanche), d’autres ont créé «knou el vayiz» dans le Sayni-karr… chacun y allant de ses petites variations pour célébrer ce rythme destiné à faire danser les plus belles femmes présentes. Car pour danser Knou, il faut répondre à un minimum de conditions physiques qui sont pour le rythme, déjà fantastique, une sorte d’ornements supplémentaires…
J’ai, comme Maalouma, le souvenir de la première femme, épouse d’un fonctionnaire affecté au milieu des années 60 à Mederdra, qui dansait le Knou dans cet environnement-là. Je la vois encore envoûter le public qui n’avait pas l’habitude de voir les femmes danser debout… Je crois que ce sont bien les prestations de cette femme-là qui ont causé une nette évolution dans le milieu de l’Iguidi, libérant notamment les femmes des appréhensions qui pesaient pour les empêcher d’occuper la scène de la danse. Comme quoi…
L’album de Maalouma sort en début d’année 2014. Il fera date parce qu’il va signer l’arrivée à maturité d’un style, celui de Maalouma. Un style devenu école malgré les hostilités des premières heures.

Quand l’école initiée par Maalouma mûrit, elle revient fatalement aux premières sources de ses inspirations : son père Mokhtar, sa tante Nîla Mint el Boubâne, ses premiers amours musicaux occidentaux et arabes… En somme, un ancrage dans la Tradition résolument ouvert à la Modernité. Qui dit mieux ? (qui fait surtout mieux ?)

jeudi 24 octobre 2013

La tribu dans tous ses états

A peine les choix de l’Union pour la République (UPR) annoncés, que les mécontentements se sont exprimés. C’était attendu. Mais ce qui l’était moins, c’est le cadre dans lequel cette expression s’est faite : à travers la tribu.
Au Hodh, en Assaba, au Trarza, des communiqués ont été publiés au nom de tribus mécontentes du choix fait par l’UPR. C’est ce qui choque.
Jamais des choix n’ont suscité autant de désapprobation «tribale». Allant jusqu’à amener à dénoncer des éléments de la tribu cooptés par le parti qu’on dit «au pouvoir». Jamais justement l’expression tribale et sectaire n’a été aussi forte en Mauritanie. Quelques raisons à cela.
D’abord la perte des repères «traditionnels» parmi lesquels ceux dits «idéologiques». Qui est qui aujourd’hui ? qui est de gauche ? qui est de droite ? qui est du centre ? qui est conservateur ? qui est progressiste ? qui est islamiste ? qui est laïc ? La laïcité existe-t-elle ici et sous quels aspects ? suffit-il de revendiquer un référentiel religieux pour être islamiste ? ou de ne pas le faire franchement pour ne pas l’être ?
Il y a aussi les repères «physiques» autour desquels s’articulaient les enjeux politiques locaux et nationaux. D’abord les intermédiaires qualifiés parfois de «grands électeurs» : notables et dignitaires de régimes qui ont toujours servi d’encadreurs de masses. Le pouvoir de Ould Aziz a, dès son avènement, déclaré la guerre à l’intermédiation et aux professionnels en la matière. Décapitant «l’industrie politique» et mettant fin au racolage en la matière. Sans asseoir quelque chose à la place. C’est ce qui explique que la scène semble aujourd’hui un peu perdue, et même chaotique par moments et dans certains microcosmes.
Troisième raison et non des moindres, l’absence d’alternative autre que l’instinct grégaire qui nous réunifie autour de ce que nous avons été et non de ce que nous aurions voulu être. Il est toujours plus facile pour les formations politiques de jouer sur les fibres sectaires et primitives que de concevoir et de travailler pour un projet moderniste et citoyen. Surtout qu’avec la désaffection des populations, le refus de ces formations de prendre leurs responsabilités et leur incapacité à faire face aux défis, les partis politiques n’ont pas pu dépasser le stade de la gestation «démocratique». Leurs choix de boycott en 1992 et plus tard ont eu l’effet d’une IGV pour la démocratie naissante. Du coup, la scène politique n’est jamais arrivée à maturation.
Il est plus simple alors de rester dans les schémas traditionnels qui imposent à l’individu la sujétion au groupe restreint. C’est finalement aux autorités de réagir fortement et rapidement.
Toute expression franchement tribaliste, ethnique et/ou régionaliste publique doit être sanctionnée dans l’immédiat. Aucune faiblesse ne doit être acceptée par les autorités. Les élections concernent les partis et non l’administration publique. Toute protestation doit viser les partis et non les structures de l’Etat…
On pourra m’opposer que l’Etat lui-même et ses représentants doivent se faire respecter. C’est vrai, d’autant plus que ces élections occasionnent des manquements graves. Quand on sait que les arbitrages sur la loi des finances ont été suspendus parce que les administrations n’ont pas le temps, on est en droit de s’inquiéter. Cette loi des finances doit être soumise au Parlement la première semaine de novembre pour permettre aux dépenses de l’Etat d’être ordonnées et d’être exécutées. Jusqu’au jour d’aujourd’hui, rien n’a été fait du travail préalable. A cause de la politique et des élections…

Le «shut down mauritanien» menace le pays qui se déchire entre soutiens et protagonistes de groupes tribaux qui n’entendent rien céder de ce qu’ils croient être une suprématie et qui n’est qu’un sentiment factice d’auto-consécration. L’Histoire nous apprend que tout ce que nous savons de nous-mêmes est juste ce que nous voulons savoir, ce que nous avons construit par nous-mêmes et sur le tard. Rien qui puisse justifier la déconstruction de l’Entité nationale.

mercredi 23 octobre 2013

Cri du cœur

J’ai reçu ce papier que j’ai voulu partager avec vous en signalant que l’auteur est une figure emblématique du mouvement national démocratique (MND), d’où l’intérêt de ce qui ressemble plus à un cri de cœur qu’à un exercice froid d’analyse. A vous d’en juger :
«Je ne pouvais imaginer qu’un jour, certains parmi nous ne croiront plus à la démocratie et  n’en voudront pas, nous qui avions abandonné les idées nationalistes chauvines à la fin des années 60 pour adopter la pensée démocratique, ou plus exactement «la démocratie populaire».
Je ne pouvais imaginer qu’il se trouvera parmi nous des gens qui n’écouteront pas et qui ne se plieront  pas à la voix des masses populaires, de la base, celles-là même qui permettent de réaliser les objectifs tactiques et stratégiques que nous avons fait nôtres.
Je ne pouvais imaginer qu’alors que nous avons acquis un espace démocratique dans lequel nous nous sommes engagés par la persévérance, le combat et les sacrifices des années 90, il se trouvera parmi nous des personnes qui défendront aujourd’hui le défaitisme et la fuite en avant, sans motif stratégique autre que celui de la peur de participer franchement au jeu politique sur une scène où seul l’engagement peut faire avancer les choses.
Je ne pouvais imaginer un instant qu’il se trouvera parmi nous certains qui travailleront à nous faire taire, à nous empêcher de faire entendre notre discours politique, à nous priver d’exploiter toutes les tribunes pour faire entendre notre voix. faire connaitre nos idées et notre projet de société, produits d’un long parcours et motifs d’une  grande fierté.
N’avons-nous pas fait le choix stratégique de ne renoncer à aucune des tribunes offertes (ou conquises) pour faire passer notre message? N’est-ce pas  pour cela que nous avions participé aux organisations de masses du Parti du Peuple Mauritanien (PPM), puis après à toutes les organisations réactionnaires à pensée unique ?
Nous avions à chaque fois choisi délibérément d’occuper les espaces existants.
Nous avions par exemple participé à la conception et à la rédaction du journal «Gounguel Soukabé» qui était l’organe de la jeunesse du PPM à Kaédi. Cela nous avait permis de publier de belles réflexions qui versaient toutes dans notre vision de la société. Une vision souvent en contradiction avec la pensée dominante : souvenez-vous des articles contre la guerre du Sahara qui, à nos yeux, menaçait gravement les «réformes» entreprises à l’époque (pas besoin de rappeler que l’Histoire devait nous donner raison).
Nous avions aussi intégré activement l’Union des travailleurs de Mauritanie, syndicat affilié au PPM. Puis nous avions été actifs dans le «Volontariat national» des années 80, avant d’aller dans les Structures d’éducations des masses (SEM).
Nous soutiendrons plus tard la liste dirigée par Messaoud Ould Boulkheir aux municipales de 90 à Nouakchott, avant d’aller à toutes les élections proposées par le régime d’alors.
A ce moment-là, les cartes d’identité étaient confectionnées sur des cartons volants, les fonds de verre servant à imiter les cachets. A ce moment-là aussi, pas moyen de contrôler le travail d’une administration complètement inféodée.
Nous avons arraché au pouvoir de Ould Taya, grâce à notre persévérance dans la lutte par le dialogue, l’établissement d’une carte nationale infalsifiable. Nous avons aussi enlevé aux dictateurs successifs maintes concessions qui nous ont permis de conquérir 6 Mairies dont deux centrales (Boghé et Barkéwol) et 3 députés qui comptent aujourd’hui parmi les meilleurs et les plus représentatifs de la ligne populaire. Ce qui leur est reconnu unanimement, y compris par leurs adversaires les plus radicaux. Les députés Kadiata Malick Diallo et Moustapha Bedredine se distinguaient par la maitrise des sujets traités, par la capacité à faire parvenir les critiques et les plaintes des couches défavorisées. Toutes ces organisations et ces élections là n’étaient-elles pas fondamentalement unilatérales et falsifiées ?
Toutes ces élections, toutes ces conquêtes ont été possibles grâce à notre forte détermination d’exploiter tous les espaces ouverts dans un environnement ou l’unilatéralisme des dirigeants a toujours été de mise.
Nous avons défié l’unilatéralité, la fraude et la manipulation parce que ce n’est pas la régularité de ces élections qui nous amenait à y participer, mais la prise en compte de leur légalité comme cadre nous permettant de faire parvenir notre discours, notre message à la plus grande frange de notre peuple qui reste la source de notre inspiration et dont le bien-être est l’objectif de notre action…
Je ne pouvais imaginer qu’il se trouvera un jour parmi nous des compagnons qui oseront sacrifier tous ces acquis et tous ces militants qui ont permis de réaliser ce parcours, pour… pour… pourquoi en fait ?
Je ne pouvais imaginer qu’un jour, il se trouvera parmi nous quelqu’un qui chercherait une opinion publique – encore à créer en Mauritanie – au risque d’ignorer et de mépriser cette opinion publique que constituent les militants de notre parti, ceux-là qui ont, bon an mal an, accompagné et soutenu notre combat, ceux qui ne cherchent que la réalisation d’objectifs communs, d’objectifs nobles et qui ne sont mus que par la foi en des principes hautement valeureux.
Je ne pouvais imaginer qu’il se trouvera un jour parmi nous des personnes qui, après avoir défendu la participation à l’élection, contestable du reste et unilatérale par excellence, de 2009, appellent au boycott d’élections locales où les candidats restent quand même des ressortissants des communes concernées dont les habitants ne veulent que les plus représentatifs et les plus probes de leurs enfants comme représentants, nonobstant l’unilatéralisme du processus électoral.
La démocratie n’est-elle pas fondée sur le principe de la participation à tous les aspects de la vie politique ? Pour ce qui est des garanties, comme il est de tradition chez nous, c’est à nous de les donner à nos militants à travers leur mobilisation en vue de dénoncer toutes les infractions et de les faire échouer. Personne en fait, ne peut nous donner ce que nous voulons, parce que nous, nous l’arrachons, comme par le passé. Et puis, n’y a-t-il pas encore des gens qui savent distinguer entre les enjeux locaux et ceux qui relèvent du niveau national ?... Sommes-nous allés aussi loin dans les erreurs de jugement ?
Dommage.
Je ne pouvais imaginer non plus qu’il se trouvera parmi nous des gens qui ignoreront que l’exercice politique découle d’une analyse froide de la réalité qu’on voudra changer vers le meilleur.
Ne disions-nous pas : «prends de ta main gauche ce qu’on te donne et tends la main droite pour avoir plus» ? Moteur d’une lutte continue que cette affirmation…
Mais… mais… tout ce que je ne pouvais imaginer est arrivé.
 Il s’agit aujourd’hui d’une situation née quand la vénérable direction de mon Parti a choisi de ne pas répondre aux attentes des masses militantes qui ne demandaient que la cohérence dans les positions par rapport à l’histoire commune.
Quand cette direction a d’abord choisi de ne pas choisir, de tanguer entre «la participation» et «le boycott», avant de se résoudre à exiger le retrait des listes déposées en son nom par des militants convaincus de la nécessité pour eux de participer, d’occuper le terrain, de faire entendre leurs voix en vue de refuser le diktat et l’arnaque politique.
…Qu’Allah préserve l’Union des forces du progrès, qu’Il lui rendre ses masses militantes et tous ceux qui ont décidé – ou vont décider - de le quitter…
Nous n’avons jamais été adeptes de la démission devant les défis…
Je ne m’imaginais pas qu’il se trouverait parmi nous des démissionnaires au premier écueil. Une expérience de plus de cinquante ans nous a aguerris. Assez pour nous amener, le cas échéant, à reconnaitre nos erreurs et à travailler pour les corriger. Pour éviter le pire.» 

Aynina Ould Ahmed El Hadi

-Membre fondateur du Mouvement national démocratique (MND)
- Signataire et co-fondateur du Groupe des 25 revendiquant la démocratisation en 1991
- Membre fondateur de l’Union des Forces Démocratiques (UFD)

- Militant de l’UFP

mardi 22 octobre 2013

Pêche : la remise à niveau continue

Le 20 et 21 octobre une délégation japonaise a négocié avec le ministère mauritanien des pêches en vue du renouvellement de l’accord de pêche au thon qui existe depuis 21 ans. Jusque-là, c’était l’affaire des ministres qui se rendaient au Japon et donnaient leurs accords pour permettre à la flottille japonaise de continuer son activité. Cela ne signifiait pas grand-chose pour le Trésor mauritanien. En 2010, un nouvel accord avait signé à Tokyo et prévoyait la reprise des négociations avant l’expiration, le 13 décembre prochain, de cet accord.
C’est naturellement Cheikh Ould Baya, conseiller technique du ministre des pêches, qui a dirigé la délégation mauritanienne à ces négociations. La délégation japonaise était dirigée par Jun Yamashita, président de Japan tuna, opérateur privé dans le secteur des pêches au thon.
Passées les amabilités préliminaires, la délégation mauritanienne a exposé son point de vue après avoir présenté le nouveau contexte caractérisé par la volonté de réaliser des accords et/ou convention «équitables» pour le pays, et «non discriminatoires» pour les partenaires. C’est la philosophie qui est à l’origine des accords et conventions avec l’Union Européenne, les Chinois et les opérateurs russes qui opèrent dans nos eaux territoriales.
Pour les Mauritaniens, le niveau des redevances versées actuellement par la flottille japonaise est en-deçà de ce que payent les autres opérateurs. D’où la nécessité de corriger pour revenir à une situation «non discriminatoire». D’autant plus que le Japon, grande puissance économique, a intérêt à intégrer cette activité à l’économie mauritanienne «conformément aux objectifs stratégiques du secteur des pêches et de la lutte contre la pauvreté» et «participer au développement de la pêche artisanale et côtière» (dixit P-V de la réunion). Une manière d’engager la responsabilité morale d’un pays comme le Japon.
Côté japonais, on estime «irrégulières» les activités des thoniers japonais : 12 navires et 1,5 millions euros par an en moyenne. C’est ce qui explique la réticence face aux exigences mauritaniennes.
La partie mauritanienne demande une compensation financière de 10 millions euros/an, somme qui doit être considérée comme participation à l’effort de lutte contre la pauvreté notamment en finançant des activités de la société de distribution de poisson qui est l’un des axes fondamentaux de la nouvelle politique visant à faire profiter les populations mauritaniennes de leurs ressources : on ne peut pas continuer à souffrir la faim alors que nous avons à portée tant de protéines. En plus, les thoniers japonais devraient payer 35 euros par tonne pêchée.
Pour la partie japonaise, ces conditions seront difficiles à adopter, surtout que le prix du thon baisse avec la dévaluation du Yen face au dollar. Tout en laissant ouverte la porte a de nouvelles négociations en vue d’arriver à un accord profitable à tous.
Prions pour que les deux parties arrivent à un accord dans la lignée de ceux qui ont été signés avec l’Union européenne, les Chinois et les Russes. Espérons aussi que cette remise à niveau des accords touche les autres secteurs de l’économie, les mines notamment.

lundi 21 octobre 2013

Leonarda, un prétexte

A peine une semaine après les drames de Lampedusa où près de 400 personnes sont mortes lors de leur traversée méditerranéenne, alors que les larmes coulaient encore et que les blessés et les traumatisés tentaient de retrouver leurs corps et leurs esprits, tandis que les survivants se débattaient encore dans leurs cauchemars, à peine une semaine et voilà qu’éclate l’affaire Leonarda. Du nom de cette jeune fille de 15 ans expulsée avec sa famille par les autorités françaises vers le Kosovo d’où ils sont supposés venir. Une affaire qui éclabousse déjà le Président François Hollande risquant de lui faire perdre le maigre taux de satisfaction (23% selon les derniers sondages) qu’il gardait encore.
Tout commence par une intervention policière au cours d’une expédition scolaire le 9 octobre dernier, intervention qui visait à extraire une jeune fille de 15 ans, Leonarda Dibrani, en vue de l’expulser du territoire français avec sa famille en situation irrégulière.
Quelques jours après, l’affaire est révélée par les associations de l’éducation et par les professeurs de la jeune fille qui trouvaient «inhumaines» et «inacceptables» les conditions dans lesquelles l’opération a été menée. Surtout que la jeune fille a été interpellée «en pleine activité scolaire».
L’occasion pour les détracteurs du ministre de l’intérieur Manuel Valls de l’accabler, lui qui a laissé faire. Pour les antisocialistes de monter au créneau pour dire que rien n’a changé depuis la bande à Sarkozy (Brice Hortefeux, Claude Guéant…), que la même politique est appliquée en matière d’immigration. Une politique visant à séduire dans le camp de l’extrême-droite qui a le vent en poupe. Ce n’est pas pour rien que Manuel Valls reste le plus apprécié des ministres du gouvernement actuel…
L’occasion de voir aussi la Gauche se déchirer en laissant apparaitre ses divergences sur une question fondamentale dans le débat français : l’immigration et la gestion des flux migratoires. Une distance phénoménale sépare les perceptions des Communistes, des Verts et des Socialistes, les Socialistes eux-mêmes restent divisés sur la question.
Mais le plus grand coup est sans aucun doute l’intervention malvenue du Président Hollande lui-même. Cherchant à calmer les esprits, le Président Hollande est sorti de son silence pour, d’une part soutenir son ministre de l’intérieur et, d’autre part proposer à la jeune fille de revenir sans ses parents terminer sa scolarité. Tollé général devant ce qui a été apprécié comme «un chantage fait à une mineure» (ou la France ou sa famille). Le Président n’avait pas besoin de ce faux pas lui qui était déjà au plus fort de sa désaffection par le public.
Mais au-delà des conséquences politiques de l’affaire – conséquences qui peuvent être immédiates avec la démission du ministre de l’intérieur ou «dans le temps» avec les remaniements de plus en plus probables dans l’Appareil politique des Socialistes – peut-on comprendre cette passion pour une affaire qui n’en est pas ? comment se fait-il que médias et opinion publique ne prennent pas la peine d’exposer les faits ? pourquoi se passionner pour des gens qui n’ont aucun mal à trouver refuge (la famille vient de l’Italie où elle ne risquait rien et non du Kosovo) ?
Notons que les drames de Lampedusa n’ont suscité aucun remous au sein de la classe politique européenne, les habitants de l’ile italienne étant les seuls à avoir fait du bruit sur les deux drames. En France, l’élite a regardé de loin si elle n’a pas superbement ignoré ce qui se passait à moins de deux heures de vol de Paris… mais passons.  
D’après les enquêtes menées ici et là, la famille Dibrani est composée de huit membres : le père qui a quitté le Kosovo depuis 35 ans, la mère qui est italienne et les six enfants dont un seulement est né en France, les autres sont nés en Italie. Quand ils sont venus s’installer en France, ils ont prétendu venir d’un Kosovo encore instable. Pour éviter d’être contredits, ils avaient déchiré leurs papiers italiens. Le père cherchant à profiter des subventions promises en France à tout demandeur d’asile ayant régularisé sa situation. Il y comptait tellement qu’il refusait toute proposition de travail. C’est cette première constatation qui fonde les conclusions du rapport administratif aujourd’hui mis en ligne par le ministère de l’intérieur : «La décision d’éloigner la famille Dibrani est justifiée en droit ; aucun des recours de M. Dibrani n’a été jugé recevable». Parce que «M. Dibrani n’a jamais donné suite aux propositions d’embauche qui lui étaient faites, et il ne cachait pas attendre le versement des prestations familiales qui suivraient sa régularisation pour assurer un revenu à sa famille».
Impliqué plusieurs fois dans des affaires de vol, le père a toujours eu des versions différentes de son passé et de sa provenance. Il a toujours affiché un mépris total des lois françaises. Le piteux état dans lequel la famille a laissé l’appartement qu’elle occupait au titre de demandeur d’asile, indique une volonté de prédation avérée : selon les rapports, sa réoccupation nécessite de grands travaux préalables.
Sa fille, Leonarda Dibrani, séchait régulièrement les cours et découchait tout aussi régulièrement. «Selon les données recueillies par la mission, les absences de Leonarda au collège dont de 66 demi-journées en 6ème, 31 en 5ème, 78 en 4ème et 21 ½ depuis le début de l’année scolaire actuelle». On est loin de l’image angélique présentée par les médias.
Que les policiers n’aient «pas fait preuve du discernement nécessaire» lors de l’exécution de la décision, est un fait mais il reste qu’ils ont appliqué une décision judiciaire plusieurs fois confirmée. Alors ?
Je suis toujours surpris par ces émois collectifs qui secouent de temps en temps les opinions publiques occidentales en général, françaises en particulier. Des émois sélectifs souvent. Quand on s’émeut pour la scolarité interrompue de Leonarda (dont la famille a eu la chance de recourir à des juridictions qui l’ont finalement déboutée), on doit avoir un mot, une pensée pour les milliers d’enfants libyens privés parfois à jamais de leur scolarité à cause des bombes françaises lâchées par des avions français dans une bataille qui ne concernait en rien la France.
Un mot, une pensée pour les milliers de Syriens déchirés, assassinés, qui voient leurs écoles détruites, leur avenir à jamais compromis parce que la France et derrière elle une partie de l’Occident, a jugé qu’elle avait un devoir moral d’armer une partie contre l’autre dans un conflit qui n’est pas le sien.  
Un mot, une pensée pour tous ceux qui ont souffert à cause de la folie guerrière des gouvernements français, à cause des soutiens abusifs de l’élite, à cause de l’indifférence générale vis-à-vis de ce qui se passe ailleurs…
S’émouvoir pour Leonarda Dibrani n’absout rien. Ce ne peut être une prophylaxie collective à moindre prix. On n’oubliera pas les milliers de sans-papiers africains et arabes, habitant en France, lui offrant le meilleur d’eux-mêmes et qui n’arrivent pas à bénéficier d’une régularisation de leurs situation. Ni ces milliers de jeunes, diplômés ou non, cherchant à aller en Europe pour trouver de quoi vivre et qui meurent, violemment emportés par des vagues de plus en plus puissantes, de plus en plus hautes… aussi hautes que les murs érigés pour les empêcher d’arriver sur ces terres où ils estiment avoir une chance…

dimanche 20 octobre 2013

Les gendarmes se laissent aller

C’est un spectacle que nous offrent les Gendarmes chargés de surveiller et de protéger l’entrée de l’aéroport de Nouakchott. Quand on arrive on est frappé par la rigueur affichée : tenue correcte, tailles standards, déploiements convenables, propos (plus ou moins) acceptables… «Restez de l’autre côté, n’approchez pas si vous ne voyagez pas»… C’est bien et c’est tant mieux. Nous sommes tous demandeurs d’ordre.
Seulement voilà, après quelques minutes, vous allez voir nos gendarmes pris par des conciliabules avec des civils voulant entrer sans en avoir le droit. C’est ici un parent qui est invité à briser la rigueur affichée, ici un ami, là une connaissance…
Hier soir, je n’ai pu m’empêcher de le faire remarquer à l’un d’eux en lui disant que ce qui me choque, c’est surtout la jeunesse des Gendarmes en faction. Des jeunes doivent rester rigoureux et s’interdire de faire du favoritisme. Lui rappelant que si la mission de protéger l’aéroport a été confiée à la Gendarmerie, c’est parce qu’on accusait la police de «d’excès de convivialité» avec les usagers et de manque de rigueur. Que c’est finalement ce qui est en train de rattraper les Gendarmes. Qu’ils n’ont rien à gagner en donnant aux citoyens toutes les raisons de ne pas les respecter. «Vous êtes jeunes et vous devez tenir à votre respect et à celui de votre Corps».

Je le voyais me regarder sans entendre ce que je disais. Je me rappelais qu’il suffit de voir les allées et venues autour des postes de contrôle de la Gendarmerie sur les routes nationales pour comprendre que la Gendarmerie n’est plus ce Corps qui suscitait respect et considération. Il y a quelque chose qui s’est cassé au sein du commandement : le rajeunissement  de ce commandement ? ou son vieillissement ? le laisser-aller de ce commandement ? ou la mainmise de ce commandement ? C’est au fond le commandement qui détermine le comportement de tous les gens du Corps. Ici plus qu’ailleurs.

samedi 19 octobre 2013

Destinée

Il s’appelle Arnoud Van Doorn. Il est néerlandais. Il est connu pour avoir été un élu du parti d’extrême droite PVV connu pour ses engagements islamophobes. Il avait d’ailleurs activement participé à la réalisation du film «Fitna» dont l’objectif était de porter préjudice à l’Islam, aux Musulmans et surtout au Prophète Mohammad (PSL). Nous sommes en mars 2008 quand le parti de Geert Wilders avait mis en ligne ce film par ailleurs mal accueilli par l’ensemble des gouvernements européens.
Cet homme est musulman depuis quelques mois. Je l’ai vu sur une télévision arabe répondant aux questions d’une journaliste qui tenait à savoir tout sur le cheminement, sur la conversion de l’homme. Lui venait d’accomplir le Haj. Suprême récompense, grand moment d’accomplissement pour tout Musulman.
Arnoud Van Doorn qui siège toujours comme élu dans le conseil municipal de La Haye, entend dépenser son énergie pour «corriger» les torts qu’il a causés par son film et ses activités avant sa conversion.
«Je ne ménagerai pas mes efforts pour protéger les droits des Musulmans dans tous les pays européens, ainsi que pour servir l’Islam et ses croyants partout dans le monde». Puis d’ajouter : «Je ferai de mon mieux pour réparer les dégâts que j’ai faits à l’Islam et son Prophète à à travers le film ‘Fitna’».
Il va même jusqu’à envisager de créer un parti sur des bases islamiques. «Pas un parti islamiste, il est ouvert à tous», mais un parti construit sur les valeurs de l’Islam. Aujourd’hui, Arnoud Van Doorn est l’un des plus grands défenseurs de notre religion.
Quand le film a été mis en ligne des appels au meurtre ont été lancés par des fanatiques. Si quelqu’un avait tué cet homme, on n’aurait pas eu un aussi passionné Musulman. Laquelle des démarches était la plus judicieuse : celle qui consiste à tuer un homme au nom d’on ne sait quelle précepte ou celle de le laisser vivre sa vie, s’exprimer comme il l’entend et le voir évoluer sur des questions aussi fondamentale ? laquelle des situations sert le plus l’Islam et les Musulmans ?

Quand j’ai vu Arnoud Van Doorn s’exprimer, je n’ai pu m’empêcher de partager ces quelques réflexions.

vendredi 18 octobre 2013

Les fruits de l’effort

La Mauritanie vient de réussir à avoir trois «résultats» probants d’efforts consentis ces dernières années.
D’abord la victoire remportée malgré le lobbying espagnol au Parlement européen : 467 pour, 154 contre et 28 abstentions. Il s’agissait de faire passer l’Accord de pêche avec l’UE. Lequel accord consacre un profit maximal pour la Mauritanie (augmentation de la subvention, recul de la zone de pêche, «nationalisation» des céphalopodes, débarquement des captures dans les ports mauritaniens, augmentation de l’emploi pour les Mauritaniens…).
Ensuite le satisfecit des institutions financières internationales lors des assises des conférences annuelles à Washington. FMI et Banque Mondiale ont exprimé leur satisfaction quant aux résultats obtenus par la Mauritanie ces dernières années après avoir atteint les équilibres macro-économiques, condition de base d’une économie saine. Les deux institutions expriment un grand optimisme quant à l’avenir de l’économie mauritanienne.
Troisième «bonne nouvelle», celle qui fait suite au classement mondial de la liberté d’expression. Premier pays arabe, ce qui n’est pas un exploit en somme, la Mauritanie maintient le classement de l’année dernière (67ème sur 179) et qui fait suite à la libéralisation de l’audiovisuel, à la dépénalisation du délit de presse et à l’instauration effective d’une totale liberté d’expression. Ci-après, pour ceux qui ne l’ont pas encore lu, le communiqué de Reporters sans frontières (RSF) :
«L’Afrique du Nord a été épinglée par Reporters sans Frontières dans son dernier classement sur la liberté de la presse dans le monde. Seule la Mauritanie sort du lot en conservant son rang de l’année dernière à la 67ème place sur 179 pays classés. 
L’Algérie se classe au 125ème rang, en recul de 3 places par rapport à 2012, suivie de la Libye (131ème, +23), du Maroc (136ème, +2), de la Tunisie à la 138ème (en recul de 4 places) et de l’Egypte (158ème, + 8).
Dans le récent classement de RSF, l’Algérie a perdu 3 places du fait de la multiplication des agressions et des procès à l’encontre des professionnels de l’information et de l’augmentation des pressions économiques sur les médias indépendants. 
«Plus d’un an après le vote par le Parlement algérien d’une nouvelle loi sur l’information, censée abolir le monopole de l’audiovisuel public, l’autorité de régulation, préalable indispensable, n’a pas encore été instituée. Aucune chaîne de droit privé algérien n’a pu voir le jour. La nouvelle législation reste donc théorique, un simple effet d’annonce», constate RSF.

Libye : les conséquences positives de la fin du règne de Kadhafi

La Libye a gagné 23 places. Cette forte progression s’explique, selon RSF, par les conséquences positives de la fin de 42 ans de règne de Mouammar El Kadhafi sur la liberté de l’information. Selon l’ONG, le classement précédent avait été plombé par les exactions commises au cours de l’année 2011. Toutefois, «les améliorations attendent d’être confirmées, avec l’inscription du principe de la liberté de l’information dans la Constitution. 
Elles appellent aussi la mise en place de lois garantissant ce principe et apportant de véritables protections pour les journalistes, ainsi que des garde-fous en faveur du pluralisme et de l’indépendance des médias».

Maroc : position stable

La position du Maroc est stable, observe RSF qui pointe, cependant, les promesses non tenues du gouvernement d’Abdelilah Benkirane en novembre 2011, notamment la dépénalisation des délits de presse. Ces promesses «tardent à se concrétiser », note l’ONG. « L’arbitraire et l’absence de transparence sont souvent de mise dans les prises de décisions, notamment dans l’octroi et le retrait des accréditations», estime-t-elle.

Tunisie : multiplication des agressions contre les journalistes

La Tunisie est classée 138ème. Deux ans après la chute de Ben Ali, elle perd ainsi quatre places alors qu’elle avait nettement progressé en 2011 (+30 places).RSF explique cette régression par les agressions de journalistes qui se sont multipliées au cours du premier trimestre de 2012.
«Depuis, les autorités ont entretenu le vide juridique en retardant la mise en œuvre des décrets-lois régissant les médias », relève l’ONG qui dénonce cette pratique qui a rendu possible des nominations arbitraires à la tête des organes publics. L’ONG tient, par ailleurs, à souligner « le discours le plus souvent méprisant, voire haineux, des hommes politiques envers les médias et professionnels de l’information».

Egypte : influence politique sur la ligne éditoriale des médias publics

L’Egypte à la 158ème place a gagné 8 places. Une amélioration relative, selon RSF. L’ONG indique qu’en 2012, des journalistes et net-citoyens ont continué à être les cibles d’agressions, d’arrestations et de procès, soulignant qu’un journaliste a même trouvé la mort en décembre dernier.RSF note aussi que les Frères musulmans ont procédé à la nomination de nouveaux directeurs et rédacteurs en chef des journaux gouvernementaux peu de temps après leur arrivée au pouvoir.
«Ce qui n’a pas été sans conséquences importantes sur la ligne éditoriale de ces médias », souligne-t-elle, mettant également à l’index le projet de Constitution adopté fin 2012, qui contient, selon elle, « des dispositions trop vagues et clairement liberticides ». «Les possibilités de fermeture ou de confiscation de médias demeurent possibles sur ordre d’un juge», ajoute l’ONG dans son rapport.»

jeudi 17 octobre 2013

Mixité à défendre

L’école que fréquente l’une de mes filles a décidé de séparer garçons et filles. Désormais, les filles ont une cour à part et une porte par laquelle elles doivent entre et sortir. Sans avoir à côtoyer les garçons. Bien sûr que l’administration a réservé la cour la plus grande et la porte la plus large aux garçons. Même les salles réservées aux filles sont moins grandes. Elles sont désormais à l’étroit. Cela peut détériorer les conditions générales d’enseignement car l’administration et les enseignants pourraient être portés à ne pas accorder l’importance qui sied aux classes des filles. Nous sommes dans un pays où la chape de plomb de l’obscurantisme s’étale de jour en jour.
J’ai demandé à quelqu’un de l’administration de l’école en question, on m’a expliqué que c’est par «souci de respecter les normes de la Chari’a». Ma question était alors : «qu’est-ce qu’il y a de nouveau dans la Chari’a qui dicte la séparation de sexe dans les classes ?»
A mon avis, nos pères étaient sans doute plus pieux que nous, meilleurs connaisseurs des préceptes religieux, plus respectueux des us et coutumes, plus conservateurs des valeurs originelles…, pourtant ils n’ont jamais remis en cause la mixité dans les espaces publics (ou ce qui en tenait lieu). Alors qu’est-ce qu’il ya ? Rien sinon la volonté de certains d’imposer des règles venues d’ailleurs pour se conformer à des préceptes très discutables  et qui nous font revenir en arrière.
Grave le fait d’institutionnaliser ses «reculs» dans les relectures des enseignements qui ont toujours été les nôtres. Grave quand on essaye de les «officialiser». A l’école publique, on a mis fin à la mixité dès les années 90 : le résultat d’une lutte acharnée menée par quelques «clients» du Centre de prêche et de prédication qui a été un moule pour cette pensée u(i)nique et rétrograde. Maintenant la «révolution» arrive dans le privé…
Mais l’on oublie que le mal de l’éducation ne situe pas à ce niveau, mais bien à celui du contenu dispensé et de la manière avec laquelle il est dispensé. Et, comme sur d’autres plans, on s’attache à quelques détails «mécaniques» ou «physiques» en tout cas élémentaires pour oublier l’essentiel. Le théâtral au lieu du fondamental.
La vision de la femme comme «source de tentation et de perdition» mène nécessairement à des excès que nous devons dénoncer pendant qu’il est temps. L’autre soir, une parente à moi a été empêchée de quitter l’aéroport parce qu’elle avait son fils de sept mois avec elle et qu’elle n’avait pas d’«autorisation parentale». En fait sans l’autorisation du père – pas de la mère, du père seulement -, aucun enfant ne peut quitter le territoire mauritanien. Qu’est-ce que cette loi qui ignore les droits de la mère, le rôle de la mère dans le devenir de l’enfant ? à sept mois, un enfant a d’abord besoin de sa mère, pas de son père. Alors pourquoi on interdit à une mère d’amener son enfant sans avoir l’autorisation écrite du père ? Scandaleux parce que cela découle d’une démarche qui met en doute la moralité de la femme et en cause son rôle dans l’accomplissement de l’individu. Autre expression du mépris que nourrissent certaines sociétés vis-à-vis de la femme. Pas la nôtre. Il s’agit là d’un comportement et d’une perception importés. Comme tout.