lundi 4 mars 2024

BCM : De nouvelles mesures pour assainir le système des transactions

Le Gouverneur de la Banque Centrale de Mauritanie vient de lancer deux nouveaux actes sur la voie des réformes entreprises depuis quelques temps en vue d’organiser, de réguler voire de surveiller en temps réel les transactions financières via les nouveaux moyens de paiement électronique dans notre pays.






Sujet à de nombreuses critiques pour l’absence supposée d’outils efficaces de contrôle de ces transactions, parfois pour la nouveauté que constitue ces nouveaux moyens de paiement au sein de l’écosystème financier, notre pays met les bouchées doubles pour renforcer le dispositif réglementaire et technique et rassurer ainsi nos partenaires. Qui plus est, l’un des premiers soucis des autorités a été – est encore – d’améliorer la gestion des flux financiers et de développer les outils aidant à leur traçabilité. Dans un contexte mondial marqué par l’explosion des chiffres concernant le blanchiment d’argent sale provenant d’activités illicites voire criminelles, le contrôle et la transparence sont une exigence pour tous les pays particulièrement les plus faiblement outillés pour faire face aux flots incessants d’activités dangereuses et transnationales. 

Deux instructions viennent d’être signées par le Gouverneur Mohamed Lemine Ould Dhehbi dans le but de réorganiser le système de transactions financières. Ces instructions (10/GR/2024 et 11/GR/2024) révisent et améliorent la réglementation relative aux transactions mobiles à travers les comptes de paiement appelés Wallet ou des comptes bancaires traditionnels.

Notre pays a connu une explosion d’acteurs financiers dédiés à l’offre de services rapides de paiements et de transferts de fonds. Comme souvent, ces acteurs ont rapidement dépassé les planchers fixés par la réglementation pour hisser le niveau de leurs transactions au niveau de celles des organismes financiers à part entière.

Si au début les limites étaient fixées à 6000 MRU pour les paiements et à 30000 MRU pour les retraits, ces comptes ont fini par faire faire transiter les centaines de millions dans des transactions dont l’objet n’est pas toujours suffisamment identifié et par des personnes dont le KYC (connaître son client) l’est parfois moins. C’est ainsi que les limites fixées par instruction 02/GR/2022 ont vite été désuètes. Ce dépassement des seuils  ouvre la voie à toutes les anomalies y compris la confusion entre les activités sur un compte conçu pour faciliter les paiements de factures et ne nécessitant aucune mesure particulière parce que ne présentant pas de risque sécuritaire, et un compte bancaire traditionnel qui exige une grande rigueur dans l’identification du propriétaire et le suivi de ses transactions.

Dans la perspective de l’adoption de ces comptes par de nouveaux opérateurs notamment dans les télécommunications, les paiements innovants ou les Fintechs nouvellement agréés, la nouvelle instruction 11/GR/2024 vient renforcer ce dispositif en élevant les limites transactionnelles et en simplifiant les procédures de vérification de l'identité du client (KYC), dans le but d'élargir l'accès aux services de paiement tout en assurant un niveau élevé de sécurité et de conformité réglementaire.

Contrairement aux comptes bancaires classiques, qui offrent une gamme complète de services incluant l'épargne et le crédit, les comptes de paiement se spécialisent dans l'orchestration des transactions de la vie quotidienne, offrant ainsi une solution souple et facilement accessible pour répondre aux besoins financiers immédiats des utilisateurs.

La gestion électronique des comptes bancaires traditionnels introduit le concept d’«opération bancaire digitale» qui désigne la transaction opérée à travers toute plateforme numérique ou le mobile et qui se base sur un compte bancaire ouvert exclusivement auprès d’une banque.

L’instruction 10/GR/2024 adapte la réglementation aux nouvelles donnes des transformations exponentielles de l’outil technique tout en préservant la mission qui est celle d’encadrer les opérateurs pour se conformer aux normes de sécurités, de conformité et d’efficacité requises pour protéger les intérêts des utilisateurs et raffermir la confiance dans le système financier national.

Ces deux instructions répondent à un double objectif. D'une part, elles renforcent les mesures de sécurité et de conformité réglementaire, en exigeant des informations détaillées sur les revenus des clients et en optimisant les applications bancaires mobiles pour prévenir les abus et garantir la sécurité des transactions. D’autre part elles visent à simplifier l'accès aux services financiers, en établissant des règles claires et des limites transactionnelles adaptées aux besoins des utilisateurs, tout en ouvrant la voie à l'intégration de nouveaux acteurs dans l'écosystème financier, tels que les sociétés de télécommunications, les fintechs et les établissements de paiement nouvellement agréés. Du reste, les limites ne sont en aucun cas en porte à faux avec l’objectif d’inclusion financière car les revenus modestes s’y prêtent naturellement à merveille. Ces limites n’encourageraient pas non plus l’utilisation du cash car cette dernière est réglementée et fait l’objet de restrictions rigoureuses.

D'autre part, ces réformes s'inscrivent dans un contexte plus large d'assainissement du secteur financier, reflétant la détermination des autorités à accompagner l'innovation tout en préservant la stabilité et l'intégrité du système financier mauritanien. En somme, ces textes réglementaires marquent une étape cruciale vers un système financier plus inclusif, transparent et sécurisé, capable de répondre aux attentes des utilisateurs modernes et de soutenir le développement économique du pays.

 

Ould Oumeir

 

vendredi 1 mars 2024

1er mars 2019-1er mars 2024: Promesses tenues

Le Président Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani n’avait pas promis la rupture d’avec le monde d’avant. Il n’avait pas non plus parlé de faire le procès de ceux qui avaient dirigé le pays et qui s’étaient rendu coupables de fautes. Il n’avait absolument pas joué sur la facilité de promettre monts et merveilles pour s’attirer la sympathie des électeurs. 

Le candidat Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani s’était engagé à mettre ses compétences, son expérience et tout son être au service de la Mauritanie et des mauritaniens pour apporter une pierre à l’édifice de construction nationale et«réparer» ce qui doit l’être. Sans fracas.

Le 1er mars 2019, il donnait à sa candidature un sens neuf et une forme nouvelle. L’organisation de l’événement est marquée par la présence de la famille y compris la mère du candidat et la future première dame. Une «intimité» dont la mise en exergue permet de créer une affinité certaine avec le candidat tout en découvrant les pans cachés de sa personnalité et qui incarnent une sociabilité qui est l’une de ses promesses dévoilées ce jour-là.

Si nous avons connu des présidents distants voire indifférents parfois même rebutants, voici le temps de celui qui fera preuve d’empathie, d’accessibilité et d’humilité pour utiliser un mot qui fait référence à une valeur quelque peu oubliée.

Celui qui utilise la première personne du singulier – d’habitude à ce niveau le nous l’emporte sur le je – parle de valeurs d’équité, de justice, de partage, de tolérance, de mesure, d’abnégation… Tout en reconnaissant le travail accompli par ceux qui l’ont précédé et dont il excuse les manquements éventuels, il s’engage à faire de son mieux en soulignant que pour lui, «l’engagement a un sens». Une formule qui sonnera comme la marque d’une grande intelligence de ce dont nous avions besoin dans l’immédiat : d’un homme qui recrée le lien qui doit nourrir la relation entre le politique et son public et auquel nous pouvons croire ou au moins avoir confiance. Pour cela, le candidat Mohamed OuldCheikh El Ghazouani a bien gagné son pari au cours de cette première sortie. La suite confortera la promesse.

De l’apaisement de la scène à la normalisation des rapports entre acteurs, la société ira au rythme du «marabout» qui entend recouvrer ce que les dérèglements climatiques, sociaux et économiques ont enseveli sous un linceul fait de sables mouvants où la débâcle générala sonné le glas d’un système de valeurs nourri par la sobriété et une perception infiniment universaliste de l’humaine condition.

La moralisation de la parole et de l’action devait «réparer» ce qui s’est cassé en nous du fait du prince. Cela commençait par la recherche d’une convergence qui devait aboutir à la proclamation solennel du Pacte républicain conçu pour être le socle sur lequel se construira l’avenir d’un pays réconcilié grâce notamment à l’éclosion d’un nouveau contrat social et d’un système politique «moins onéreux» traduisant la volonté du «vivre ensemble» et du destin commun d’une Nation à la croisée des chemins.

La caution morale du bienfondé du projet politique est apportée par l’implication de deux grandes figures de l’opposition traditionnelle. Certains y verront une tentative de la part du Rassemblement des forces démocratiques et de l’Union des forces du progrès de reprendre le train qu’ils ont dû quitter après leur débâcle lors des dernières élections législatives et locales. En réalité, il s’agissait là d’un projet du Président Ould Cheikh El Ghazouani qui a su reprendre l’ensemble des revendications de la classe politique sérieusement préoccupée par l’avenir commun. Le RFD de Ahmed Ould Daddah et l’UFP de Mohamed Ould Maouloudfont bien partie cette catégorie «sans peur et sans reproche» quand il s’agit de servir la Mauritanie. Leur onction est largement suffisante pour attester de la noblesse des intentions. Le contenu est quant à lui inclusif et reflète les intentions originelles exprimant la convergence générale. L’une des forces de l’homme est bien d’irradier sur son environnement pour donner en exemple cette attitude qui mélange la bienveillance du Shaykh vis-à-vis de ses disciples à la rigueur du leader qui impose sa démarche à ses collaborateurs. Les premiers peuvent se sentir abandonnés à un moment ou à un autre, mais ils persistent à croire que leur héros ne peut «être possédé». Du coup l’inquiétude est surtout relative à la mise en œuvre du projet initial, celui de 2019. Un projet qui passera nécessairement de l’état d’un engagement personnel à celui d’une vision partagée, la plus inclusive possible.

Grâce au leadership clairvoyant et volontariste, le Président Ould Cheikh El Ghazouani a pu traverser une forte zone de turbulence marquée par les crises sanitaire (COVID19), économique (conséquences de la guerre en Ukraine) et politique (dossier de la décennie) qui ont nécessité de grands sacrifices. Il a pu éviter le pire pour notre pays. Le pire c’est ce que vivent certains de nos frères dans notre voisinage immédiat de divisions, de violence, de manque de perspective, d’instabilité, d’insécurité…

Il nous reste beaucoup à faire face aux déchirures dans l’espace sahélo-saharien et aux conséquences des bouleversements du monde notamment en Palestine occupée. Nous devons nous préparer pour occuper une place dans le système international en construction. Notre destin dépendra de la détermination à continuer le projet qui a bénéficié d’un élan consensuel, du courage dont nous ferons preuve pour transcender les craintes de l’inconnu et de la lucidité suffisante pour comprendre que l’avenir appartient à la jeunesse.

 

vendredi 23 février 2024

Horizon second mandat :

En avant toute !






Février 2019, la Mauritanie est gagnée par la frénésie de l’attente d’une campagne électorale dont tous les contours restaient inconnus. Même le candidat du pouvoir restait un inconnu. La crainte d’une tentation de faire passer l’idée d’un troisième mandat était très forte…

Les choses se précipitent et le ministre de la défense se porte candidat… ce qui rassurait une population qui s’est déjà exprimée sur la personne.

Cinq ans après, le «candidat du consensus» doit se lancer dans la course de la présidentielle 2024. Comment peut-il convaincre qu’il est reste le meilleur d’entre tous ? Devra-t-il appuyer sur le bouton reset pour annoncer le projet qu’il va lancer pour avoir le soutien populaire requis ? Se contentera-t-il de reprendre les fondamentaux de son projet, de renforcer le camp des loyaux inconditionnels ?

Analyse.  

 

Quand il annonce sa candidature le 1er mars 2019, Mohamed Ould Cheikh Mohamed Ahmed Ould Cheikh El Ghazouani est loin d’être un inconnu du grand public. Celui qui a dirigé la sûreté nationale après avoir été l’un des principaux artisans du changement du 3 août 2005, puis l’Armée, est connu pour avoir joué le rôle de «régulateur» dans un système construit sur des relations empestées par les clivages et le radicalisme dans les attitudes.

Avec lui, la sécurité et la défense ont connu une révolution aussi bien dans la réorganisation que dans l’équipement et la formation. Ce qui a permis de faire face aux périls d’alors avec notamment la maitrise de l’environnement sécuritaire de la Mauritanie partie pour être le maillon faible d’une zone sahélo-saharienne en prise à de nombreuses menaces. «L’exception mauritanienne» a été bâtie sur un solide socle construit sous le commandement du Général Ould Cheikh El Ghazouani.

Malgré l’atmosphère faite de craintes, d’agressions et de vindictes verbales, le chef militaire a su garder son calme et est même devenu une sorte de «mur des lamentations» vers lequel affluent toutes les victimes de la mal gouvernance du moment. Il réconforte, corrige s’il y a lieu, réconcilie, soutient et rassure. Tout en préservant les relations qui le lient avec le Président Mohamed Ould Abdel Aziz, son compagnon d’il y a longtemps. Nous saurons plus tard que ce dernier ne connaissait de lui que la seule face qui lui convenait visiblement : celle du «marabout» qui se confond avec «mollesse, laisser-aller, paresse, insouciance…» qui, dans l’esprit de Ould Abdel Aziz sont les attributs de tout marabout.

En fait, quand on refait le film des événements, on se rend facilement compte que «le Maitre des horloges» n’était pas celui que l’on croyait. La nomination du Général Ould Cheikh El Ghazouani fraichement retraité, au poste de ministre de la Défense, a été l’occasion pour des milliers de citoyens mauritaniens d’affluer vers sa maison située dans l’enceinte même de l’Etat Major général des Armées, comme pour prêter allégeance à celui qu’ils espéraient déjà voir candidat alors qu’il était encore un chef militaire. Ce mouvement de foules sans précédent a duré trois jours. Préparant ce thème de campagne qui se résume ainsi : «le candidat du consensus». Le discours du 1er mars est venu rassurer sur les préjugés favorables qui ont accompagné sa candidature et qui vont se concrétiser dès les premières semaines de son accession au pouvoir.

 

Convergences

 

Lancer le chantier politique au lendemain de la nomination d’un gouvernement qui avait toute la latitude d’exercer dans le cadre général des engagements du Président consignés dans le document Ta’ahoudaty. Première démarche : apaiser les relations voire les normaliser.

Le Président Ould Cheikh El Ghazouani rencontre les chefs politiques, d’abord de l’Opposition en commençant par ceux qui s’étaient présentés contre lui. Cette pacification de la scène est vite décriée plus ou moins ouvertement par les caciques du système Ould Abdel Aziz qui tient encore le pays. D’ailleurs, l’ancien président ne tarde pas à rentrer avec la ferme intention de tout renverser : le parti UPR (Union pour la République) au pouvoir en reprenant sa direction et même le pouvoir en tentant la reprise en main des affaires. D’où l’urgence de procéder au toilettage du parti au pouvoir. Suivra une procédure parlementaire qui devait fatalement aboutir à la procédure judiciaire qui a duré un peu plus de trois ans. Empêchant le nouveau pouvoir de se concentrer sur l’essentiel.

Une autre grande crise devait intervenir pour détourner les efforts et peser lourdement sur le mental : la pandémie du COVID19. Même si cette pandémie a détruit des vies, elle a permis d’alerter rapidement sur l’état calamiteux de notre système de santé et de parer au plus pressé. Ce qui a été rondement mené dès les premiers mois de la pandémie. Mais plus important pour le pays et pour la société, l’engagement très solennel du Président Ould Cheikh El Ghazouani a permis de réconcilier «l’Etat bienveillant» avec ses citoyens. C’est bien l’Armée nationale qui a pris en charge la distribution des aides aux plus démunis : pour la première fois de l’histoire du pays, les populations recevaient une aide de l’Etat sans qu’on leur demande une contrepartie (adhésion à un parti, participation à une manifestation de soutien, voter en faveur d’un candidat déterminé…). Un «petit» geste qui prend l’allure d’une «révolution».

La guerre en Ukraine a eu des conséquences catastrophiques sur les pays comme le nôtre. Les déséquilibres économiques qu’elle a engendrés avec notamment les dysfonctionnements dans la production de céréales et surtout dans les circuits d’approvisionnement, ont pesé sur les économies les plus faibles et ont révélé la fragilité de leurs structures ainsi que leur dépendance très forte. Le Président Ould Cheikh El Ghazouani en a tiré la leçon en décrétant que la sécurité alimentaire est l’un des fondamentaux de «la sécurité nationale».

Trois crises – politique, sanitaire et économique – qui ont au moins «modéré» le rythme des transformations promises à l’avènement du pouvoir le 1er août 2019. Obligeant parfois à composer, souvent à une «trop» grande prudence et toujours à chercher à subir le moins les effets du choc en cherchant des équilibres sans provoquer de rupture.

 

Divergences

 

Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani réussit à donner l’image de l’homme politique qui prend en compte les attentes des populations. Le chantier social est rapidement lancé à travers l’Agence nationale de solidarité appelée Taazur pour garder ce fondement philosophique du nouveau pouvoir qu’est le partage. Tout comme «Al inçaf» entre dans la vision du Président qui entend ainsi cultiver la valeur de l’équité dans le partage du bien national. L’une des grandes réussites de ce mandat aura été le volet social pour ce qu’il a apporté aux plus démunis en termes d’aides directes et indirectes et surtout de couverture sanitaire qui tend aujourd’hui vers l’universalité.

Mais le souci d’inclusivité visant à embarquer toutes les classes politiques dans cette œuvre de construction, va créer des problèmes sur lesquels vont surfer les plus caciques des opposants. En effet, les «hommes du passé» emmèneront avec eux leurs querelles et leurs ressentiments accumulés au cours de leurs précédents exercices. Très rapidement, des clivages vont apparaitre au sein de l’équipe gouvernemental : le premier Premier ministre se crée un clan et cible le cabinet présidentiel, puis certains des ministres supposés être ses collaborateurs. C’est de cette situation qu’hérite son successeur et dans laquelle il va nager. Ces clivages s’intensifient avec l’entrée dans la sphère gouvernementale de personnalités à très grandes ambitions. Cette réhabilitation-promotion de certains acteurs controversés et très décriés pour avoir été des figures de proue de «la décennie des affaires» va faire craindre le pire aux premiers soutiens du Président Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani.

D’abord parce qu’il s’agit du retour en force de fortes têtes ayant parfois été tout durant l’époque jugée devant les tribunaux et considérées comme l’antithèse de la nouvelle gouvernance. Ce qui menace le projet initial et met en péril le soft power qui est la marque déposée du Président Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani. Effectivement, la violence verbale qui fait rage sur les réseaux sociaux est bien le fruit de ces clivages qui ne peuvent s’expliquer que par les réminiscences d’un passé construit sur l’exclusion et nourri de vulgarités et de règlements de compte insidieux.

Ensuite parce que l’élection présidentielle en vue cache l’essentiel et peut donc donner des idées aux plus audacieux quant à la perspective de 2029. Pour beaucoup d’entre les acteurs politiques, l’échéance de 2024 annonce celle de 2029 qu’il faut donc préparer dès à présent.

Aussi la plupart des acteurs sont restés prisonniers des enjeux locaux. C’est pourquoi ils s’occupent plus de leurs cousins, de ceux de leur environnement immédiat que de la gestion globale de leurs départements. Incapables qu’ils sont d’incarner la première volonté du Président qui est celle de l’inclusion. Aussi bien au niveau du gouvernement que celui du parti (Insaf), les premiers responsables ont été incapables de transcender leurs «environnements réduits» pour voir la Nation dans sa globalité et incarner le projet défini dans «Mes Engagements».

 

Relancer le projet

 

A plusieurs reprises, le Président s’est exprimé solennellement pour rappeler à ses hommes les principales orientations. Les discours de Wadane, de Tichitt, de Djewol, des anniversaires de l’indépendance, ou ceux à l’occasion de sorties de promotions des grandes écoles… ces multiples sorties ont sonné comme un rappel à l’ordre. Mais la résistance au changement et aux réformes est restée forte, très forte. Par paresse peut-être, par malveillance parfois et souvent par incompétence, les premiers concernés – membres du gouvernement ou des instances dirigeantes du parti au pouvoir – ont refusé de servir le projet de refondation d’un système porteur de valeurs. Le déni de responsabilité a finalement eu raison de la moralisation du système de gouvernance que le Président a continué de promouvoir.

Même si la dernière année d’un mandat ne peut être celle du travail, il y a lieu ici de relancer le projet initial en renouant avec le volontarisme originel. Avec le Pacte républicain signé entre certains partis d’opposition et le ministère de l’intérieur, il faut construire le futur pacte social et politique dans lequel tous les mauritaniens se reconnaitront. La réforme de l’éducation doit annoncer des choix forts pour le futur proche notamment en termes de formation et de construction d’une identité mauritanienne authentique et résolument tournée vers l’avenir. Les réalisations dans les domaines de la santé, des secteurs productifs et des infrastructures doivent être audités et mises en exergue pour en faire le socle de développement qui ouvrira la voie à l’émergence et confortera la résilience.

Cela ne doit pas nécessiter d’appuyer sur le bouton reset pour réinitialiser le projet, mais un sérieux coup de barre pour redresser le navire et accélérer le rythme de la marche sur la voie du progrès.

dimanche 18 février 2024

Union Africaine 

La Mauritanie à l’épreuve du continent

 


C
e n’est pas la première fois que notre pays se retrouve propulsé au-devant de la scène continentale en assurant, pour une année, la présidente tournante de l’Union Africaine. Mais cette fois, la présidence de l’UA nous tombe dans les bras dans des circonstances particulières.

Elle est d’abord le fruit d’un consensus solennellement exprimé par les pays de l’Afrique du nord à un moment où il est pratiquement impossible de faire converger ces pays vers une décision commune.

Elle est aussi un «coup de chance» pour la Mauritanie qui entend reprendre l’une de ses vocations originelles qui consistait à être «le trait-d’union» entre le nord et le sud du Sahara. A un moment où cette vocation sera certainement l’un des éléments de langage de la future campagne présidentielle.

Elle est surtout un moment d’accomplissement qui arrive après quelques grandes émotions vécues par les Mauritaniens (parcours de l’équipe nationale de football dans la dernière CAN notamment) et à un tournant dans le projet de société et de gouvernance lancé le 1er août 2019 par le Président Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani.

Quelles attentes et quelles opportunités s’ouvrent devant le pays à cette occasion ?

 

Lucidité dans le discours

 

En se référant à feu Moktar Ould Daddah, le Président Ould Cheikh El Ghazouani, nouvellement investi par ses pairs à la tête de l’Union Africaine, rappelait sans doute le poids de l’Histoire et la grandeur de la mission qui incombe à l’organisation en ces temps où la morosité semble dominer.

Inspiré comme à son habitude, il soulignait que le Président Ould Daddah «croyait en la nécessité de promouvoir l’action africaine commune, fermement convaincu que son pays (la Mauritanie, ndlr) qui constitue un lien historique et culturel, entre le sud et le nord du continent, devait être l’un des piliers de cet édifice africain naissant».

Où en est l’UA ? certes l’Agenda 2063 ambitionne d’arriver à «une Afrique intégrée et prospère, gouvernée pacifiquement, dirigée par ses citoyens, et une force dynamique sur la scène internationale». Mais l’organisation panafricaine est loin de satisfaire les attentes de ses peuples.

La situation de pauvreté dans laquelle vivent les peuples du continent en général contraste scandaleusement avec les potentialités du continent. Richesses du sous-sol et halieutiques, abondance de sources d’énergie renouvelable, dynamisme de la démographie, position géopolitique… tout concourt à faire du continent une promesse permanente de futur. Ce qui est loin de changer le présent.

Le manque d’éducation, de démocratie, l’exclusion, l’iniquité dans le partage des ressources, la mauvaise gouvernance du potentiel sont autant de causes d’instabilité endémique voire structurelle. Cette mauvaise gouvernance est à l’origine des guerres civiles, des rébellions, des coups d’Etat et de la propagation du crime organisé sur notre continent.

«Notre continent abrite plus de 50% de l’extrême pauvreté dans le monde, possède 25% des terres arables mondiales et ne contribue qu’à 10% de la production agricole mondiale, ce qui menace de continuer à détériorer sa sécurité alimentaire», reconnait le nouveau Président de l’UA. Les images se succèdent de jeunes africains fuyant leurs terres d’origine pour des raisons économiques, climatiques, sanitaires, ou politiques, souvent à cause de la conjugaison de tous ces facteurs.

 

Promesses d’avenir

 

Si, à un moment les regroupements régionaux ont été perçus comme solution en perspective d’une intégration africaine plus large, nous en sommes aujourd’hui à les regarder se décomposer l’un après l’autre. L’une des premières préoccupations du nouveau Président en exercice de l’UA sera certainement d’endiguer le phénomène et de ramener l’unité sur la base du partage et de la tolérance. Les questions de savoir que fera-t-on du G5 Sahel, ou comment éviter la dislocation des organisations régionales comme la CEDEAO, comment rapprocher les pays du Maghreb, régler les différends de la Corne de l’Afrique, arrêter les changements anticonstitutionnels du pouvoir.

Dans une étude publiée à l’occasion de la tenue du 37ème sommet de l’UA, l’organisation internationale Crisis Group explique la nécessité d’agir vite et fermement pour résoudre les multiples conflits qui ravagent actuellement le continent et prévenir ceux qui sont latents. Pour ce faire, l’organisation déclare qu’en 2024 «l’UA devrait explorer de nouvelles façons de traiter les crises de gouvernance ; s’engager pour sauver le Soudan ; résoudre les conflits en Éthiopie et stabiliser la RDC ; maintenir ouverts les canaux diplomatiques dans le Sahel central ; mettre le conflit anglophone du Cameroun à l’ordre du jour ; réactualiser son partenariat avec la Somalie et contribuer à préparer le Soudan du Sud pour les élections».

Chercher des solutions multilatérales aux crises et aux menaces est aussi une nécessité à l’heure où le monde, particulièrement le continent, est traversé par le repli sur soi des Etats au nom d’un souverainisme désuet et dangereux. Mutualiser les ressources et les compétences en matières de partenariats techniques et financiers extérieurs est aussi nécessaire pour accéder aux financements peu onéreux et réaliser les projets structurants, y compris ceux qui visent l’exploitation commune des ressources naturelles. L’exemple de l’exploitation gazière dans le bassin sénégalo-mauritanien doit faire école.

L’UA verra s’ouvrir devant elle l’occasion de participer au forum du G20 qui rassemble les plus grandes économies du monde. En septembre prochain, la nouvelle présidence ne manquera de présenter un plaidoyer voire un plan de financement au profit des pays du continent. Si le maintien de la paix dans le monde, la lutte contre la pauvreté, et si la peur de l’immigration sont des préoccupations réelles pour le monde riche, il va falloir faire un effort supplémentaire pour aider les pays à prendre en charge leurs populations et éviter les grands bouleversements.

Apaiser les tensions, rapprocher les points de vue pour préparer l’avènement d’une nouvelle équipe en 2025. En effet, le sommet prochain doit élire un nouveau président de la Commission de l’UA à la place du tchadien Moussa Faki Mahamat, du vice-président et des six commissaires dont celui Paix et Sécurité, toujours objet de forte concurrence entre nos deux grands voisins immédiats du Maghreb (Maroc et Algérie).

La nouvelle présidence tournante aura pour tâche d’insuffler un engagement plus fort des dirigeants et des Etats pour soutenir l’organisation d’une part sur le plan politique et d’autre part sur l’aspect financier. En effet rien que les opérations de maintien de la paix sont supportées à 25% par l’UA (les 75% sont supportés par l’ONU).

Le Président Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani arrive à la tête de l’UA à un moment crucial pour le monde arabe. La guerre de destruction menée par Israël à Gaza et dans les Territoires occupés de Palestine, exige de notre pays un effort supplémentaire en vue d’assurer à la cause palestinienne, arabe en général, le soutien des frères africains. C’est cela qui avait donné un sens à la présidence mauritanienne sous feu Moktar Ould Daddah et qui avait permis à la Mauritanie de jouer pleinement son rôle d’interface entre ses deux versants africain et arabe.

lundi 2 mars 2020

Coronavirus & Consorts


Le coronavirus – dénommé désormais COVID19 – fait des ravages. La peur voire la terreur accompagnant les épidémies s’intensifie. Dans un Monde déjà affecté par les plaies causées par les dérèglements climatiques, économiques et sociaux, la méfiance est à son paroxysme. Cette maladie impose une sombre atmosphère où l’individualisme se confond fatalement avec l’égoïsme, parce qu’elle engendre le réveil des instincts primitifs et des replis mortifères. Il en naît une sorte de chao dans l’intelligence des choses et dans les comportements des moins audacieux qui y voient l’«opportunité» de se défaire de toutes les réserves morales qui régulent leurs propos et leurs actes.
Dans notre espace, l’effet de l’épidémie – pandémie – est là : la culture des clivages, des sectarismes, l’appel aux instincts primaires dans les «identités meurtrières», l’excès dans les paroles dites souvent sans discernement, la violence dans les actes irréfléchis… cela arrive quand la Raison dérive.
Quoi qu’on dise cependant, rien ne justifie cette hystérie qui se déchaîne à travers les réseaux sociaux, par messages audio, visuels (et audiovisuels) si ce n’est l’incompétence et la mauvaise foi.
L’incompétence parce qu’il s’agit du refus d’imaginer un monde meilleur, de le proposer ensuite de façon intelligible et acceptable pour la plupart d’entre nous. Une incompétence qui délégitime les revendications parfois les plus «normales» parfois les plus «justes». Une incompétence qui pousse à choisir la paresse comme attribut de la démarche suivie. Réduisant le champ de l’intelligence au strict appel au premier degré du sens, celui qui marque la régression de l’humaine condition.
La mauvaise foi sert à couvrir l’incapacité à produire un discours rationnel, un plaidoyer puissant développant un argumentaire imparable. La force de la vérité s’inscrit toujours dans la justesse des propos. La mauvaise foi est aussi une parade au refus de reconnaître les manquements du passé récent, «les absences» répétées sur le champ de bataille quand ce ne sont pas les complicités avec les forces réactionnaires et maléfiques qui ont fait peser une chape de plomb sur cet espace d’infinies plénitudes.
L’incompétence et la mauvaise foi empêchent certains parmi nous de voir tous ces feux au vert. Ils préfèrent alors freiner des quatre fers au risque de causer des embouteillages et des accidents constituant ainsi des goulots d’étranglement dans la marche inexorable du Progrès.
Non ! Non ! et non !
La Mauritanie d’aujourd’hui a besoin de consolider le front intérieur. Les Mauritaniens, plus que par le passé, doivent se donner la main pour préserver ce climat de sérénité où les promesses d’une équité sont réelles, où une gouvernance neuve et nouvelle s’installe, et où il fait mieux de vivre quelles que soient par ailleurs les appréhensions que nous pouvons avoir les uns et les autres.
Le rendez-vous de l’Etat de droit, de la citoyenneté solidaire, de la justice sociale vivante, de la tolérance active, de la culture innovante et productive, bref le rendez-vous de la Modernité dans tous ses états ne peut être gagné que si nous avons conscience du moment et de son caractère exceptionnel.
La rupture avec le passé pesant – et clivant – commence par le rejet des discours haineux, la condamnation des relents racistes et des revendications sectaires (ethnicistes, tribalistes et/ou régionalistes).
La refondation exige le calme parce qu’elle a besoin de savoir raison garder. Elle a besoin de chacun de nous pour endiguer «les inspirations contagieuses» du moment, celles qui, comme le coronavirus (Covid19), semblent s’étendre inexorablement, produisant une atmosphère chaotique où la musique est un bruit, où les mots sont des flèches empoisonnées, où le dialogue est une cacophonie.

Ould Oumeir
(Horizons quotidien du 2 mars)

jeudi 9 mai 2019

PRESIDENTIELLE 2019 : Un cycle politique qui n’en finit pas de finir


Nous arrivons évidemment à la fin d’un cycle politique qui a commencé à la veille de l’indépendance nationale et qui a survécu jusqu’à présent aux multiples bouleversements que le pays a connus. Le système politique mauritanien est en train de muter pour donner, espérons-le, quelque chose de neuf et de nouveau. De «neuf» dans la forme et de «nouveau» dans le contenu.

Si l’on prend comme référence le Congrès d’Aleg de 1957, on peut considérer que la première phase de ce cycle a été la plus longue parce qu’elle s’estompe avec la libéralisation de l’espace politique public qui a donné les partis (1991).
Cette phase se caractérise par le monopole exercé par l’Autorité publique sur la vie politique et, conséquence de cette mainmise, l’obligation pour les voix «discordantes» à s’exprimer dans la clandestinité. Les outils et supports de cette expression sont le tract, le graffiti, les chants anonymes, la mobilisation «au noir»… ce qui a donné les groupuscules politiques qui ont animé les frondes des années 60, 70 et 80 : les nationalistes arabes et/ou négro-africains, les gauchistes d’obédience communiste (staliniens, maoïstes, trotskistes…), les islamistes…
C’est l’époque de la floraison des courants monolithiques qui ont imprégné la scène et qui ont fini par en être l’idéologie nourricière. Le travail politique s’est alors limité à une lutte frénétique pour la proximité du pouvoir. Le jeu consistait à approcher, pour les manipuler, les apparatchiks du pouvoir en place. Et pour ce faire, œuvrer pour éloigner voire éliminer toute velléité concurrente. Le rapport violent de la relation entre acteurs est né de cette volonté de tout prendre à soi en excluant – en «mettant hors d’état de nuire» - tout autre acteur politique concurrent. Chaque mouvement a ainsi participé à la répression des autres en la justifiant et même en jouant le rôle de l’indic.
Quand survient la démocratisation en 1991, les mouvements et groupuscules sont tous passés par la case de victime d’une répression et par celle de commis de l’appareil répressif. La scène publique était devenue un champ de recyclage d’anciens prisonniers torturés qui reprenaient du service, le temps de se venger sur les autres en manipulant l’Appareil d’Etat. C’est d’ailleurs parmi les acteurs politiques – les leaders et activistes de mouvements clandestins – que se recrutaient les hommes de renseignements. Cela permettait à l’Appareil de suivre «de l’intérieur» et aux mouvements d’investir les officines pour pouvoir les manipuler.
La naissance des partis, conséquence de l’ouverture politique imposée par la situation internationale, devait aboutir à la disparition progressive des méthodes et des logiques qui ont marqué les trente premières années de la République. Une période de transition va suivre caractérisée par la cohabitation entre le système totalitaire et ses méthodes et une démocratie limitée à l’existence de partis politiques réduits à des faire-valoir pour un régime qui ne lâche finalement rien.
Les dérives autoritaires laissent des blessures profondes : 1989, 1990 et 1991… avec leur lot de tristesse, de massacres, de déportations et d’emprisonnements… La démocratisation, loin de régler les contentieux, donne raison aux expressions extrémistes avec la naissance des discours particularistes se basant sur l’instrumentalisation des tares sociales (esclavage) et des injustices nés des exactions commises durant les années de braise (89-91).
Les acteurs politiques, adeptes du «tout ou rien», adoptent le boycott comme forme de résistance. Ce qui contribue à les marginaliser et consacre la fin du processus de démocratisation.
Le blocage, la détérioration des conditions de vie des populations, l’échec évident des programmes d’ajustement dont l’expression marquante fut l’utilisation excessive des faux chiffres par le pouvoir, la destruction des mécanismes traditionnels de solidarité sociale, le dressement des communautés les unes contre les autres, la promotion des particularismes, la privatisation des biens communs au profit d’une minorité qui a fini par «acheter» (s’approprier) le pays, et, plus grave, la fragilisation de l’Appareil de défense et de sécurité qui a provoqué l’attaque de Lemghayti signe précurseur d’un effondrement planifié par le régime en place… tout cela va justifier – amplement justifié – le coup d’Etat d’août 2005.

La période de transition (2005-2007) devait servir à asseoir un système politique nouveau, mais les résistances de l’ancien monde ont obligé à passer par les secousses qui ont suivi : la fronde de 2008 puis le coup d’Etat, la logique de confrontation qui a marqué les dix dernières années, les boycotts et les participations ratées, les déchirures au sein des formations politiques…
Ce parcours cahoteux pour les acteurs politiques va leur imposer de subir le cours des événements sans jamais réussir à le changer, même pas à l’influencer. L’Opposition avait fini par parier sur le troisième mandat. Préférant mobiliser autour de cette éventualité au lieu de préparer l’échéance. Incapable d’identifier ce qui peut l’unir, elle est réduite aujourd’hui à aller en rang dispersé.

 Le plus grand des partis d’opposition, Tawassoul, a choisi le candidat par défaut après avoir refusé le principe de la candidature de l’intérieur de l’opposition. Pari risqué quand on sait que l’aventure va nécessairement prendre la forme d’une réhabilitation d’un passé par le biais du recyclage de ses hommes. Elle comporte aussi des risques pour ce parti qui se retrouve à la manœuvre dans cette opération de lifting. Le candidat du parti Tawassoul aujourd’hui incarne tout ce que les militants de ce parti prétendaient combattre.

L’Union des forces du progrès (UFP) réussit à légitimer l’absorption de l’héritage du Président Ahmed Ould Daddah et à s’allier ainsi au Rassemblement des forces démocratiques (RFD) à un moment où les deux partis venaient d’accuser un retard substantiel par rapport à Tawassoul notamment. Le boycott systématique des dialogues et des scrutins a affecté l’exercice politique et l’influence populaire des deux partis. En se lançant, comme ils l’ont fait, à l’aventure, les deux partis risquent leur survie : au cas où ils arrivent derrière le candidat de Tawassoul et/ou celui de Sawab/Ira, c’est une fin assurée qui attend cet attelage qui fait oublier, le temps d’une campagne, tout ce qui a pu opposer ces deux formations.

Le mariage contre-nature entre IRA et les Baaths de Sawab est une troisième variante des déviances qui caractérisent l’espace politique traditionnel et qui ne sont finalement que le signe précurseur d’un effondrement programmé. Même si le candidat Biram Ould Abeid peut se prévaloir d’être le premier candidat à s’être déclaré, le refus de ses compagnons de l’adopter comme «candidat principal de l’Opposition» en fait déjà l’expression d’un marginalisme évident. Le discours populiste aidant, le candidat Ould Abeid est condamné à jouer contre tous pour se présenter comme la promesse d’avenir. Tout dépend de comment va-t-il trouver le point d’équilibre entre le discours violent et revanchard et l’attitude raisonné de l’homme d’Etat rassurant pour une bonne partie de la population.

Il y a enfin, la candidature de Kane Hamidou Baba qui se présente comme étant «le candidat des communautés négro-africaines». Avant de créer son Mouvement pour la Refondation, il avait été un soutien inconditionnel du Président Ahmed Ould Daddah qu’il a suivi de l’Union des forces démocratiques (UFD), à UFD/Ere nouvelle puis au RFD qu’il a quitté au lendemain du coup d’Etat du 6 août 2008 qu’il avait soutenu avant de se porter candidat en juillet 2009.
Certains observateurs estiment qu’il va pêcher dans le même électorat que convoitent les candidats Mohamed Ould Maouloud (UFP/RFD) et Biram Ould Abeid. D’autres rappellent plutôt son résultat en 2009 quand il a eu 11.568 voix soit 1,49% des suffrages exprimés arrivant 7ème après Mohamed Ould Abdel Aziz (52,58%), Messaoud Ould Boulkheir (16,29%), Ahmed Ould Daddah (13,66%), Mohamed Jemil Mansour (4,76%), Ibrahima Moctar Sarr (4,59%) et Ely Ould Mohamed Val (3,81%).

Jusqu’à présent les «aventures» électorales ont été «passées» au registre des «pertes et profits». Ce qui explique le comportement quelques fois «incalculé», pour ne pas dire «irréfléchi», des acteurs politiques constamment à la recherche de la confrontation sans prise en compte du rapport de force sur le terrain.
Cette fois-ci, ceux parmi eux qui auront perdu la bataille devront se résoudre à quitter définitivement la scène politique. Ils ne pourront point s’accrocher au sempiternel argument de «la manipulation des élections».
Aucun de ceux qui se présentent aujourd’hui face au candidat de la Majorité, ne survivra au temps de l’échéance. Seul le candidat Biram Ould Abeid pourra faire partie du paysage futur, s’il réussit à gagner ce pari de la modération et donc de «l’utilité» pour une cause unanimement prise en compte, y compris par le candidat Mohamed Ould Ghazouani qui lui a consacré une partie de son discours.
Tous les autres mènent ici leur dernière bataille. C’est la survie des partis qui est ici en jeu.