mercredi 14 janvier 2015

Ce printemps qui n’en finit pas

Quand la Tunisie s’est enflammée à la suite du geste désespérée d’un jeune chômeur, vendeur à la sauvette de Sidi Bouzid, on en a parlé tout de suite de «la révolution du jasmin». Le romantisme caractérisait le mouvement spontané de la jeunesse tunisienne qui se soulevait et qui revendiquait plus de liberté, plus de dignité, plus de participation… Alors les formules pour désigner ce mouvement populaire reflétaient nécessairement le côté affectif de l’insurrection.
L’Egypte suivit de près, la Libye, le Yémen, la Syrie, le Bahreïn… tout l’espace arabe est rapidement touché par la flamme de l’Espoir avec des fortunes diverses. Alors on choisira le terme de «printemps arabe» pour désigner l’embrasement provoqué par la révolte populaire qui gagnait les pays arabes un après l’autre.
D’abord insurrection sociale, le mouvement est vite récupéré par les forces politiques les plus dynamiques comme les Frères Musulmans fortement appuyés par le Qatar et, incidemment, par les Américains. Chaque pays vivra son printemps à sa manière.
Si la Tunisie finit par plutôt bien s’en tirer, c’est en partie parce que la classe politique tunisienne, y compris les Islamistes de Nahda auront refusé le maximalisme d’une part et d’autre part le recours à l’étranger pour retrouver les équilibres nécessaires à la stabilisation d’un pays déjà menacé par le terrorisme et l’extrémisme laïc.
Mais que dire de l’Egypte, de la Libye, de la Syrie, du Yémen, du Bahreïn, de l’Irak… ?
En Libye, la France de Sarkozy devait pousser l’OTAN à participer avec elle dans une guerre dont l’objectif était de tuer Mouammar Kadhafi et détruire le pays et ses infrastructures. Le leader libyen était devenu une menace pour les pouvoirs occidentaux surtout pour le Président Nicolas Sarkozy avec lequel il avait entretenu une amitié particulière et dont il était devenu un soutien.
Mais la France emportée par son élan guerrier ne s’était pas souciée de l’avenir d’une Libye détruite par les bombardements qui ne faisaient pas de différences, explosée sur le plan social déjà fragilisé par l’absence des structures étatiques. Parce qu’elle avait besoin de combattants locaux, l’agression extérieure a fait feu de tous bois. C’est ainsi que les combattants d’Al Qaeda ont été réinsérés pour devenir les chefs de milices qui se battaient pour le pouvoir. Ils pouvaient désormais se targuer d’une légitimité révolutionnaire grâce justement à cet opération de blanchiment.
Le Président Nicolas Sarkozy et son administration n’entendirent que les conseils de la diplomatie parallèle incarnée par l’un des idéologues du sionisme français, le philosophe Bernard-Henri Lévy (BHL). Rien des propositions de l’Union Africaine, rien des avertissements des services français, rien n’arrêtera la guerre française en Libye.
En Syrie, la situation prit vite la tournure d’un complot international visant à balayer rapidement le régime honni de Bachar Al Assad. Les Occidentaux, la France la première, fermèrent les yeux sur le départ de milliers de combattants musulmans de leurs pays. En les laissant partir, les gouvernements occidentaux et leurs alliés de la région espéraient avoir les forces combattantes sur le terrain et éviter l’envoi de troupes au sol. On sait aujourd’hui ce qu’il en est. Les échecs répétés de ces Jihadistes et leur hyper-radicalisation ont provoqué leur retour sur le champ européen. Et cela fait mal, très mal.
Au moment où les Américains décident d’envoyer des instructeurs au sol, environ 400 pour encadrer et former les milices devant combattre l’Etat islamique constitué essentiellement de combattants venus de l’extérieur, surtout d’Europe et d’Amérique.
Ne parlons pas de l’Irak, du Yémen, du Bahreïn, de l’Egypte… où l’on continue de mourir gratuitement et en masse. Parce que la politique occidentale dans ces pays avait pour souci principal la sécurité d’Israël… Il fallait détruire tous les pays qui pouvaient menacer cette sécurité. C’est fait, ou presque.
Et le printemps arabe ?