dimanche 31 juillet 2011

Histoire de gazra


Ce que je vais vous raconter est authentique. Même si cela ressemble à une histoire quelconque de gazra, il faut le raconter et, pour vous, prendre la peine de le lire.
Une famille vivant sur un terrain qu’elle s’est appropriée depuis des décennies quelque part dans les dépendances de Toujounine. Il y a quatre mois – ou cinq, personne ne se rappelle plus -, la commission chargée de faire le lotissement arrive dans le quartier. Elle fait passer la route à côté de chez eux, leur arrachant deux à trois mètres mais leur laissant l’essentiel. On lui dit que le terrain qu’elle occupe lui sera attribué. La commission lui délivre même un reçu. Seulement, juste à côté, a été construite une belle demeure, preuve de l’aisance de ses propriétaires. Le tracé de la route passe par cette demeure. Rien n’arrive tout de suite.
Les semaines passent sans qu’il y ait de tracé. La semaine dernière, arrivent des gardes qui annoncent que la route a changé de tracé. Elle vire carrément à droite (à angle droit) pour passer en plein dans la gazra de la famille qui a habité là tout ce temps et qui avait déjà eu le reçu pour son terrain. La belle demeure est épargnée. L’administration ne pouvait visiblement pas casser la belle demeure et épargner quelques vieilles constructions aux toits en zinc. C’était plus facile de détourner le tracé et de le faire passer par les plus pauvres – donc les plus faibles.
Ce qu’apprenant, le Wali de Nouakchott intervient pour rétablir justice. Après plusieurs jours de pression sur le préfet, et de palabres publiques et privées, l’administration semble avoir trouvé la solution : la route s’arrête là, elle ne va nulle part. On répond ainsi aux injonctions du Wali qui tient à faire appliquer la justice et, surtout, on épargne ainsi la belle demeure. Pourquoi d’ailleurs une route là-bas ? Il y en a qui sont plus forts que toutes les lois, que toutes les autorités.

samedi 30 juillet 2011

Troublants confrères

C’est le titre d’un site d’information de chez nous qui a attiré mon attention. Il disait que la «presse malienne» a révélé que l’Armée mauritanienne ne combattrait pas AQMI sur son territoire mais des rebelles qui seraient financés par Moawiya Ould Sid’Ahmed Taya. Je suis donc allé sur Maliweb chercher la source de l’information. Je suis tombé sur un posting daté du 27 juillet 2011 signé d’un certain Baba Ould. et qui serait paru dans le Combat, un journal quelconque du Mali. Le titre : «Troublantes révélations sur les incursions mauritaniennes au Mali : Ould Abdel Aziz a piégé ATT selon la presse Mauritanienne». On peut y lire : «Nos sources sont formelles, il existe une rébellion en Mauritanie qui serait soutenue par le Président renversé par un coup d’Etat militaire le 3 août 2005, Maaouiya Ould Taya. Ces rebelles mauritaniens se réfugient souvent sur le territoire malien comme les rebelles du Mali aussi se réfugiaient en Algérie ou en Mauritanie». Et de poursuivre : «Les agissements de l’armée mauritanienne sur le territoire malien sous prétexte de lutter contre AQMI n’est donc pas une guerre contre le réseau islamiste, mais plutôt la volonté du pouvoir de Nouakchott d’anéantir totalement le mouvement rebelle auquel il fait face depuis un certain temps. La preuve, c’est que la plupart des éléments d’AQMI interpellés par l’armée malienne ont la nationalité mauritanienne. Et puis, pourquoi AQMI attaque les positions de l’armée mauritanienne et non celles de l’armée malienne ou nigérienne ?» 
Qui croire dans ce cas, les organes mauritaniens ayant fait référence à leurs confrères maliens ou l’inverse ? Vous vous souvenez certainement d’une fameuse lettre adressée soi-disant par Nelson Mandela aux insoumis de Saahet ettahrir au Caire au beau milieu de la révolution égyptienne. On en a tellement parlé que certains analystes ont fini par l’intégrer dans les facteurs de réussite de la révolution. Une lettre du symbole de la lutte pacifique contemporaine, incarnation du Mahatma, ça pèse.
Cela finit par arriver à Mandela qui exprime sa surprise, n’ayant jamais envoyé une telle lettre. Choqués, quelques chercheurs égyptiens commencent une enquête autour de la lettre qui leur parait une manipulation de la part des manifestants. Après enquête, ils retrouvent l’origine de la lettre en… Mauritanie. Le premier qui a fait état d’un tel document est un site mauritanien. Comme quoi…
La méthode utilisée jusque-là par certains de nos confrères, était de passer une information à un journal extérieur, de la reprendre en le citant, ce qui lui donnerait plus de crédit. Il y a des spécialistes de cela parmi nous. L’information est alors reprise par des parlementaires et devient «officielle». Mort à celui qui voudra la contredire. On n’arrête pas la rumeur.

vendredi 29 juillet 2011

Plus on avance...


Plus on avance vers la concrétisation du dialogue entre le pouvoir et l’opposition, plus les positions se clarifient. D’une part ceux qui ne veulent pas de ce dialogue, sans pour autant proposer d’alternative autre que le rejet du régime en place. Quand on est un citoyen lambda signant avec un pseudo – souvent par lâcheté – on peut se permettre toutes les positions, même les plus incongrues. Mais quand on est un parti politique, ou un être porteur de valeurs et qui les défend au grand jour, on n’a pas le droit de dire simplement «non», on doit pouvoir proposer.
Quand un Bou’zizi s’immole ou quand un Moussa el Baçri se fait exploser dans les rues de Nouakchott, ils expriment tous les deux un geste de désespoir. Mais la différence fondamentale entre eux, c’est que le premier a cherché à faire l’effet d’une objection de conscience à ses semblables en cherchant à se faire mal seul. C’est pourquoi il a été une interpellation à toute une jeunesse qui voulait vivre enfin et qui en était empêché par un régime à la limite de la démence.
Moussa el Baçri lui, n’entend pas laisser quelqu’un vivre après lui. Il veut entraîner dans sa mort le maximum de ses semblables parce qu’à ses yeux ils ne méritent pas de vivre. Parce que surtout, il n’a pas de projet de vie pour eux. Ni pour lui d’ailleurs. Le projet qui l’inspire est fait de carnages, de morts, de destructions… et c’est pourquoi nous combattons ce projet.
Tout projet dont l’objectif n’est pas de construire un édifice stable par la culture de valeurs humaines d’égalité, de justice, d’équité, de recherche de bien-être pour tous, tout projet qui ne se construit pas sur cette inspiration devrait être combattu. Le premier indice – à mon avis – est la vision proposée. C’est quand on n’a pas de vision qu’on n’a rien à proposer. Je trouve que la Mauritanie a toujours été à la croisée des chemins. Elle a trop hésité jusqu’à présent. Il est temps de se décider. Ça vaut pour tous les acteurs.
Quand Ould Abdel Aziz a pris le pouvoir, il a dénoncé le statu quo et promis le changement. Le changement c’est d’abord la rupture avec le passé. C’est aux termes de ce contrat qui a fini par le lier au peuple mauritanien – par la force d’une élection consensuelle quoi qu’en disent ses détracteurs qui l’ont pourtant bénie -, que nous devons le pousser à faire plus et mieux. Et pour ce faire, nous devons lui reconnaitre ses mérites. Parmi ces mérites, le fait d’avoir appelé au dialogue le 28 novembre 2010.
En face, nous avons des acteurs politiques qui étaient, pour la plupart, là quand on est venu au monde et qui resteront certainement là quand nous aurons quitté ce monde. Leur longévité défie toutes les lois. Ces acteurs nous jouent le même tour. Depuis toujours. Quand le pouvoir ne sert pas leurs intérêts, il est honni, illégitime et doit disparaître et qu’importe la voie suivie. Quand, au contraire, il les sert, il fait partie de «l’in-dit» (el meskoutou ‘anhu, le non-dit en plus sacré). Les principes, le raffermissement de la démocratie, les droits, la liberté… tout doit faire l’objet de discussion. On a le temps et on doit avoir l’ouverture d’esprit nécessaire. C’est ce qui a justifié toutes les accointances avec Ould Taya. Voilà un régime avec lequel toutes les passerelles furent ouvertes, mêmes les plus honteuses malgré 1987 (négro-africains), 1988 (baaths), 1989 (expulsions massives de mauritaniens), 1990-91( exécutions sommaires de compatriotes), 1994 (islamistes), 1995, 96, 97, 98, 99, 2000, 01, 02, 03, 04, 05… toutes les années et ces complots fictifs justifiants répressions et emprisonnements, tortures et exécutions extrajudiciaires… toute cette politique faite de corruptions, de vol et de viol des consciences… Cela ne nous a pas empêchés de fournir d’énormes efforts en explications, en conférences, pour justifier la nécessité de discuter et l’obligation morale de le faire. Plus tard de recevoir parmi nous ceux qui ont servi 20 ans durant ce régime et de les traiter comme si de rien n’était. Les ministres de l’intérieur, les directeurs des services de renseignements et de police, les tortionnaires, les prédateurs… «ouvriers», «cadres», «exécutants», tout le personnel de conception et de réalisation des années noires, des années grises, des années sombres – appelez ça comme vous voulez -, tout ce personnel a été chaleureusement accueilli avant d’être blanchi par nos soins.
…Nous sommes encore à la croisée des chemins, nous avons à choisir entre fonder un ordre nouveau qui permettrait – par le dialogue – d’impliquer la plupart d’entre nous, de continuer à se laisser berner par le désespoir, à espérer que «quelque chose tombe du ciel sur la tête de ceux qui gouvernent», quelque chose qui puisse les exterminer quitte à tout voir disparaitre avec eux. «Sans moi, le déluge»… 

jeudi 28 juillet 2011

Le «traitre» trahi


Abdel Fettah Younes est l’un des généraux survivants de la révolution verte en Libye. Il est le seul des compagnons de Kadhafi à avoir survécu aux multiples purges et mises à l’écart dont les autres ont été victimes. La confiance que lui accordait Kadhafi était sans faille. Younès a trahi Kadhafi dès les premières semaines de la rébellion, d’abord populaire puis militaire de la Cyrénaïque. On se souvient de l’annonce faite par les rebelles, démentie par Kadhafi lui-même qui préfère recourir au mensonge grossier en commanditant la diffusion de vieilles images comme si elle datait de la veille. Des images on voyait les deux hommes ensembles. C’est dire combien était important le ralliement de Younes. Surtout qu’il permettait à la rébellion qui s’organisait difficilement d’avoir un chef issu des rangs militaires, et à l’OTAN d’avoir à la tête de cette armée en construction, quelqu’un qui ne peut être taxé de sympathisant d’Al Qaeda ou des salafistes jihadistes formant l’ossature des forces rebelles.
C’est donc autour du général Abdel Fettah Younes que l’armée devant conquérir la Libye et chasser Kadhafi du pouvoir, que cette armée a été montée petit à petit. Très mobile sur le front, il a été effectivement le bras de l’aile civile du Conseil national de transition au pouvoir en Cyrénaïque et dans d’autres parties de la Libye.
Ce jeudi, il a été assassiné en compagnie de deux autres officiers de la rébellion. Selon les dépêches d’agences de presse, la mort «suspecte» d’Abdelfatah Younes avait été annoncée par le président du CNT Moustapha Abdeljalil. «Abdel Fetah Younes et deux de ses compagnons ont été tués à Benghazi par des individus armés», avait-il indiqué. Younes revenait de la ligne de front vers Benghazi après avoir été convoqué par une «une commission judiciaire enquêtant sur des questions militaires», selon la déclaration de Moustafa Abdeljalil. Deux explications qui s’offrent à nous.
La première voudrait que l’assassinat soit l’œuvre des sbires de Kadhafi. Auquel cas, il faudrait se résoudre à accepter que la rébellion est fortement infiltré. En effet si Kadhafi peut frapper au cœur du CNT, ce doit être inquiétant pour les amis de l’OTAN. Plus encore pour Moustapha Abdel Jelil, un autre traitre à Kadhafi qui s’est retrouvé président de la rébellion.
La deuxième indique de fortes dissensions internes au sein de la rébellion. Ces dissensions peuvent être de clans. Ce qui est plutôt simple. Mais elles peuvent, et c’est ce qui est dangereux, être idéologiques. En effet, et comme le soutient le régime de Tripoli, l’essentiel des troupes de la rébellion appartient à l’aire idéologique de la Salafiya Jihadiya. Alors que la direction des opérations est pour la plupart issue da l’école nationaliste prônée plus de quarante ans durant par le régime, sinon de la diaspora venant d’Europe et d’Amérique. Entre donc les quelques dirigeants apparents du mouvement, et les hommes d’action et de terrain, il y a un grand fossé dans la vision politique et humaine de l’entreprise menée depuis février dernier. Si les uns prétendent établir un régime démocratique allié de l’Occident sinon à son service, les autres entendent créer un Emirat islamique capable de servir de base d’épanouissement de la mouvance vers toute la région nord-africaine, et pourquoi pas au-delà. Avec les révolutions en cours en Tunisie et en Egypte, la fragilité de la situation en Algérie et plu au sud, au Tchad et au Soudan, plus à l’est l’insécurité dans l’espace sahélo-saharien, c’est tout une perspective qui est ouverte. Dans une telle perspective, Younes et ses hommes sont bien un obstacle. Il fallait donc les éliminer. C’est fait. Quel sera l’acte II ?

mercredi 27 juillet 2011

http://www.coursupreme.mr

La Cour Suprême a lancé son site électronique. Un site sert toujours à présenter l’institution et à suivre son actualité. Il est donc un signe de transparence, au moins d’un souci de satisfaire la curiosité des usagers.
Naturellement le site www.coursupreme.mr sert d’abord à faire connaitre les missions de la Cour suprême, à la présenter, à donner sa composition, et à diffuser ses publications et communiqués. Une partie est réservée au Parquet général près la Cour Suprême : sa présentation, son organisation et sa composition. Une autre à la Commission pour la transparence financière de la vie publique pour sa présentation, sa composition, ses missions, ses rapports et autres publications éventuelles. Il y a aussi un exemplaire du formulaire à remplir par les hauts fonctionnaires et dignitaires tenus de le faire. En plus, vous avez accès à toutes les publications et textes juridiques concernant l’institution ainsi que tout ce qui touche l’événement annuel de l’ouverture de l’année judiciaire.
Dans sa version en Arabe – sa version en Français n’est pas complète -, vous pouvez faire un tour dans l’histoire de la Cour à travers ses présidents. Tous les présidents, depuis 1965 (date de la mauritanisation), sont là avec photos : Mohamed Lemine Ould Hammoni (1965-1966), Bé Ould Né (1966-1971), Ahmed Ould Mohamed Saleh (1971-1972), Ahmed Ould Bbaa (1972-1979), Ethmane Ould Sid’Ahmed Yessa (1979-1981), Cheikh Ould Boyde (1981-1984), Mohamed Salem Ould Addoud (1984-1987), Ahmedou Ould Abdel Kader (1987-1988), Mohameden Ould M’Boirik (1988-1996), Mahfoudh Ould Lemrabott (1996-2003), Mohamed Kaber Ould Khattri (2003-2004), Kaba Ould Elewa (2004-2005), Mohamed Ould Hannani (2005-2009), Bal Amadou Tijane (2009-2010) et Seyid Ould Ghaylani (2010-….). Depuis 1965, la Cour a connu 15 présidents, soit 5un peu plus de cinq ans par président. Ce qui équivaut à un mandat normal. Ce qui, par contre n’est pas normal, c’est la qualité de certains des «heureux élus»… laissez-vous guider par les noms.

mardi 26 juillet 2011

La bataille du football

La guerre fait rage au sein des ligues régionales et autres structures chargées de la gestion du foot. Il faut élire, ce jeudi, le nouveau bureau de la fédération nationale de foot. Le président sortant, Mohamed Salem Ould Boukhreiss ne se représente pas. Deux candidats sont en lisse.
Le premier est Moulaye Ould Abbass, l’héritier du grand banquier Sidi Mohamed Abbass, longtemps président du patronat, entrepreneur citoyen, politique averti, ayant su allier intelligence et humanisme. Son jeune fils qui a hérité une bonne partie de sa fortune dont la banque BMCI, a été président de la fédération. C’est sous son mandat que sur les onze joueurs de l’équipe nationale, neuf étaient des étrangers naturalisés. On avait alors invoqué ses possibilités financières, son modernisme et son émancipation vis-à-vis des pesanteurs sociales pour lui confier la mission. Son mandat a été un échec. Pour les mêmes arguments, il veut tenter une nouvelle fois sa chance. Aidé cette fois-ci par quelques pans de l’autorité en place. Le Général Ndiaga Dieng qui a fait main basse sur le basket-ball et bien d’autres barons le soutiennent ouvertement.
Le deuxième candidat est un jeune du nom de Ahmed Ould Abderrahmane Ould Yahya. Issu du milieu de Nouadhibou, Ould Yahya a toujours évolué dans les milieux de Nouadhibou. Modernité et volontarisme sont deux de ses qualités mises en avant par ses soutiens. Et quand ses adversaires veulent le mettre hors jeu, ils vous disent : «il n’a pas d’argent». Comme s’il avait de l’argent, cela pouvait aider notre foot. Tous ceux qui ont eu à diriger le foot avaient de l’argent. Parfois trop. Mais qu’elle était la tendance chez eux ? C’est d’en rajouter dans leurs cagnottes. On a fait les quarante premières années de l’indépendance avec les mêmes noms dans le circuit du foot national : un qui remplace un, on a tourné en rond mais au sein de la même nomenklatura. Cela avait fini par ressembler à une maffia. Avec l’arrivée de Moulaye Ould Abbass, puis de Ould Boukhreiss on avait espéré finir avec cette tendance de toujours revenir vers les anciens pour répéter les mêmes échecs, les mêmes erreurs.
Si j’étais électeur, ma voix irait à Ahmed Ould Yahya. Parce qu’il n’a pas d’argent. Parce qu’il irrite dans les milieux officiels de nos sports, alors que nous savons de quoi ces milieux sont faits et ce qu’ils nous ont rapporté par le passé. Parce qu’il a «l’habitude» du football depuis son enfance. En plus de toutes les qualités humaines qui font sa force (intégration, politesse, volonté, humilité…). Malheureusement je ne suis pas électeur, j’aurai pu me taire, mais c’est plus fort que moi.
Je vois un candidat qui compte sur son pouvoir financier, qui a engagé avec lui tous les parapluies officiels et qui, pour cela, ne fait pas campagne. En face, un jeune qui mène une véritable campagne de séduction et de promotion pour un programme, autour de lui des jeunes de sa trempe… alors je choisis mon camp. Au moins de dire ce que je pense.
Et «parmi ce que je pense», la question du coût des structures sportives qui ne rapportent finalement pas grand-chose. Au plan du foot, le bilan est facile à faire : nous avons toujours été les derniers de notre classe malgré les dépenses énormes. Au niveau du volley et du basket, la Mauritanie a, jusqu’au début des années 80, occupé un rang honorable, devenant quelques fois vice-champion d’Afrique. Mais depuis plus rien. Au niveau de l’athlétisme, les sportifs de chez nous ne sont même pas classables. Et tout cela coûte. En fait, les organisations sportives sont de hauts lieux de gabegie et doivent en conséquence être concernées par la lutte contre «al mufsidiine».

lundi 25 juillet 2011

Abdel Wedoud Ould Cheikh méconnu ?


Mohamed Fouad Barrada est un garçon très bien. Excellent par bien des aspects. Formidable par de nombreuses (et belles) qualités. Il a fait des études réussies et adopté une vie de chercheur. Il lit beaucoup, rate rarement les conférences, fait le tour des librairies, bibliothèques et bouquinistes du pays. Il anime une page dans La Tribune depuis fort longtemps et travaille réellement ailleurs. Il satisfait tous ceux qui l’approchent et qui savent apprécier «le frêle Chérif»…
Mais Mohamed Fouad Barrada vient de nous avouer publiquement qu’il n’a jamais entendu parler de Abdel Wedoud Ould Cheikh. L’éminent sociologue de chez nous, celui qui a fait fi des considérations locales, qui est sorti des voies consacrées, qui a défié l’idéologie sociale dominante, qui a fait appel aux théories les plus modernes pour décrire notre société, qui a fondé quelques concepts pour nous permettre de nous comprendre… ce Abdel Wedoud Ould Cheikh qui constitue, et pour raison, une source de fierté, ne serait pas connu par des générations de jeunes mauritaniens. Merci à Barrada de nous rappeler cela.
Les moins de quarante ans de chez nous ont été formés à l’école de la médiocrité. Les plus aisés d’entre eux, n’ont jamais été portés sur le savoir. Ils ont vu la réussite de l’ignorance et n’ont eu que les prédateurs comme modèles. Pensez à toute la jeunesse de Tevraq Zeina et des environs immédiats, pensez aussi – et surtout – à toute cette jeunesse qui ne connait du pays que les ascensions fulgurantes de barons PRDS et autres promus de la politique locale. Cette jeunesse n’a pas eu de modèles autres que ceux qui ont pillé le pays et qui n’ont jamais eu besoin d’ouvrir un livre pour savoir comment faire.
Les moins aisés des nôtres, de cette frange d’âge qu’on peut grossièrement situer entre 20 et 45 ans, les moins aisés parmi eux n’ont pas accès à la lecture au sens noble du terme. Ils ne lisent que ce qu’on leur propose à l’école, presque rien. Ceux-là sont les plus nombreux, même d’ils ne sont pas les plus visibles.
«La Mauritanie est un pays qui descend», une belle formule de celui qui est considéré parmi ses pairs comme «l’universitaire mauritanien qui compte». En 1999 (25 juin, La Tribune N°119, censuré ainsi que le 118 et le 117), en introduction d’une interview qu’il accordait au journal, on écrivait : «Abdel Wedoud Ould Cheikh est le plus grand sociologue et historien de notre pays. (…) Il continue, avec une patience et une discrétion toutes maraboutiques (au sens positif du terme), à construire une œuvre scientifique résolument moderne et forte. Son apport à la connaissance de notre pays et de sa culture est considérable.» A l’époque, son départ était déjà programmé. La médiocrité ambiante, la dictature qui menait la guerre au savoir, le système d’antivaleurs l’obligeaient à envisager de s’établir ailleurs.
Il nous présentait son travail comme une tentative «d’évasion». «Les chercheurs ou les handicapés sociaux de ce type-là, ce sont des gens qui ont peut-être une forme de distance, de recul, une volonté de fuite. Ce sont, si vous voulez, des types de tentatives d’évasion qui, elle, parfois prend du temps, le temps du recul probablement». Pour lui, étudier l’Histoire, «c’est probablement une manière de se réfugier aussi dans un lointain ailleurs qu’on peut juger comme étant plus fréquentable, plus pur, plus propre, plus moralement intéressant que peut-être certaines choses d’actualité. C’est une autre manière de refuser cette actualité et sans doute de la fuir».
En cherchant à choisir quelques extraits de l’interview, je me rends compte de l’utilité de sa réédition. Je le promets aux lecteurs du journal. Je me souviens quand même que, grâce à la collaboration d’un très grand politiste mauritanien – que probablement ne connait pas la génération Barrada, malgré sa jeunesse -, grâce à la collaboration de Zekeria Ould Ahmed Salem, on avait pu dresser une très brève présentation de l’homme des sciences sociales mauritaniennes. Le passage sur le lexique emprunté à Ould Cheikh est très utile : «Certains termes utilisés par Abdel Wedoud Ould Cheikh font partie d’un lexique à l’aide duquel il analyse la société et l’histoire mauritaniennes. En voici quelques exemples :
-          «La rumination» : issu de la terminologie biologique, ce terme renvoie ici aux caractéristiques du système d’enseignement traditionnel maure dont le caractère principal consiste à ingurgiter un certain nombre de connaissances, de textes, de corpus etc. et à les ressortir sur commande ou à la demande après les avoir bien mémorisés. Cet effort essentiellement de récitation reste assez spécifique et n’exclue généralement, mais pas systématiquement, la distance, la remise en cause, la réflexion personnelle, la production intellectuelle individuelle. Le contenu ruminé est évidemment de l’ordre de l’indiscuté. D’ailleurs, dans les célèbres joutes qui opposaient régulièrement les érudits traditionnels, l’exercice consistait à se «jeter à la figure» les textes canoniques ainsi ruminés, se vantant au passage de s’être limités à ce strict effort biologico-savant.
-          «L’institutionnalisation du doute» : c’est le contraire de la rumination. Il s’agit de la prise en compte dans les systèmes de pensée ou d’action de la possibilité de se tromper et surtout de reconnaitre qu’on s’est trompé, qu’on puisse se tromper, se remettre en cause, se corriger. La notion implique aussi une marge laissée à l’erreur et à sa reconnaissance. Ce qui veut dire que les pouvoirs intellectuels ou politiques ne soient pas présentés ou conçus comme étant infaillibles. De façon fondamentale, cela suppose le pluralisme des idées, la multiplication des points de vue, le débat contradictoire, la possibilité de remise en question des certitudes, des mythes, la liberté intellectuelle, la «discutabilité» des dogmes en quelque sorte etc. En somme, c’est une valeur positivement connotée.
-          «La demande despotique» : joliment inquiétante, l’expression renvoie aux prédispositions sociales à se faire gouverner de manière fortement autoritaire. Dans ce cas, la société adhère aux injonctions des régimes politiques et ne cherche pas prioritairement à les contester même s’il y a lieu. Mieux, cette adhésion se fait volontiers ostentatoire et excessive au point de devancer parfois le désir même des autorités. La demande despotique explique donc assez bien les stratégies populaires et élitistes d’accommodement, d’acceptation non conditionnelle de l’ordre institué. Il y a aussi dans cette expression, l’idée d’une pré-adéquation de ce que font les autorités avec ce que les gens attendent du pouvoir en général et à l’idée principalement coercitive qu’ils s’en font. C’est ce qui explique que dans les sociétés où existe cette demande, il y a le plus souvent un régime dit «sultano-despotique» qui jouit d’une apparente et relative légitimité».

Abdel Wedoud Ould Cheikh ne doit pas être un inconnu en Mauritanie. C’est pourquoi ce rappel est nécessaire. Même si, par ailleurs, je sais qu’il est mieux, dans notre pays, d’être un riche parvenu au terme d’une carrière faite de compromissions, de prédation, de vol, de corruptions… que d’être Abdel Wedoud Ould Cheikh. Dommage pour nous. 

dimanche 24 juillet 2011

Qui dira à Wade de ne pas sacrifier le Sénégal ?


Le Yémen est à nos portes sud. En effet, depuis samedi, le Sénégal est animé de manifestations et de contre-manifestations, les unes soutenant, les autres contestant le droit du Président Wade à briguer un troisième mandat en 2012. Chaque camp ayant chercher à rassembler les millions, comme on dit ailleurs «les manifestations millionnaires».
Côté opposition, on estime à cinquante mille personnes le nombre de manifestants rassemblés sur la place de l’Obélisque en plein Dakar. "Non à un troisième mandat de Wade", "Wade go, Wade out" (Wade va-t-en, Wade dégage), sont, entre autres, les slogans affichés ou criés par les manifestants solidement encadrés par la police. Selon la dépêche de l’AFP, les grands leaders de l'opposition, dont celui du parti socialiste (PS), Ousmane Tanor Dieng, de la société civile, mais aussi d'anciens proches du président comme son ex-Premier ministre Idrissa Seck, ont tour à tour pris la parole, saluant une mobilisation "exceptionnelle", "formidable". Tanor Dieng a estimé que "la messe est dite" et qu'il ne reste plus au chef de l'Etat "que sa propre famille, son propre camp". Il a demandé le départ d'Ousmane Ngom, ministre de l'Intérieur, obstacle à une élection "transparente". "Cette mobilisation montre la détermination du peuple sénégalais à mettre fin au régime Wade. La cause est entendue, Abdoulaye Wade ne peut pas être candidat, Abdoulaye Wade ne sera pas candidat", a pour sa part affirmé Abdoulaye Bathily, de la Ligue démocratique (LD).
Organisée par le Mouvement des forces vives dit du 23 juin (M23), la manifestation arrive un mois après les violences qui ont éclaté à Dakar à la suite de la décision prise par le Président Wade de tripatouiller la Constitution pour s’ouvrir la voie à un troisième mandat. La violence de la réaction populaire avait obligé Wade à retirer son projet de réforme de la loi fondamentale. Elle a pour but "d'attirer l'attention sur les risques et les dangers du troisième mandat" qui a créé des troubles dans plusieurs pays africains, dont le Niger, a déclaré un des dirigeants du M23, Alioune Tine. "Nous avons besoin d'institutions fortes, pas d'hommes forts", a-t-il ajouté.
En face, le camp du Président Wade a rassemblé entre 1,8 et 2 millions, selon son ministre de la communication. De partout le PDS (parti de Wade) a amené des militants pour faire la démonstration. Aux cris de «Wade président en 2012», les manifestants ont occupé toute l’artère du boulevard de la République à Dakar.
Et comme la politique n’attire plus vraiment, il a fallu mobiliser, dans les deux camps, des troupes de mbalax, de rap et autres sabar. Ce qui donnait aux manifestations un air de fête qui l’emportait nettement sur le côté politique. Sans pour autant cacher les dérives que comportaient de tels face-à-face. 
Le Sénégal est au bord de l’éclatement parce que le Président Wade refuse de comprendre qu’en cherchant obstinément à s’accrocher au pouvoir, il met le modèle sénégalais en danger. Il a oublié que la prise de conscience de l’élite sénégalaise est tel qu’elle ne peut accepter les schémas d’une dévolution monarchique du pouvoir ou ceux d’une prolongation par tripatouillage de la Constitution.
Quand c’était la Mauritanie qui avait une crise institutionnelle, le Président Wade nous disait pour justifier son ingérence, que «la Mauritanie est dans le Sénégal et le Sénégal est dans la Mauritanie, et aucun des pays n’a le droit d’ignorer les problèmes de l’autres». Il invoquait le devoir moral du «voisin de bonne volonté» qui l’obligeait à s’impliquer.
Le Mali, la Gambie, la Guinée, la Côte d’Ivoire, la Guinée Bissau et la Mauritanie doivent se remémorer ces belles paroles de Wade, pour prévenir toute dérive. Parce que toute secousse au Sénégal sera ressentie partout dans la région, l'effet d'un tsunami dans l'espace sahélo-saharien.

samedi 23 juillet 2011

Le fondamentaliste fou de «là-bas»


Il s’appelle Anders Behring Breivik, il est norvégien et âgé de 32 ans. Il vient d’entrer dans l’Histoire pour avoir massacré près d’une centaine de personnes. D’un coup. Au nom, visiblement de ses choix politiques et idéologiques.
Les enquêteurs le décrivent comme un extrémiste affichant au grand jour son islamophobie et sa haine farouche pour le «multiculturalisme qui mine la Norvège». Il anime des pages sur les réseaux sociaux Internet où il défend ses idées et s’explique. C’est ainsi qu’il définit ses ennemis : «l’Islam qui a provoqué la mort de 300 millions de personnes», «le Communisme qui en a tué 100 millions» et «le Nazisme responsable de 6 à 20 millions de morts». L’amalgame qui fait le caractère premier des fascistes, des illuminés en général. En décembre 2009, il écrivait qu’il «n’existe pas un seul pays au monde où les Musulmans ont réussi à vivre pacifiquement avec des non-musulmans».
Vendredi, Anders Behring Breivik se rend sur l’île d’Utoya où se tiennent les réunions d’été du parti travailliste norvégien et commet un véritable massacre.
Déguisé en policier, il paraissait rassurer les participants qu’il invitait à venir à lui avant de les abattre avec son fusil d’assaut M16 et son pistolet Glock qu’il rechargeait régulièrement. Le monde de l’image retiendra cette scène où un jeune homme l’implorait en vain de le laisser en vie.
En même temps que le massacre se déroulait sur l’île paradisiaque transformée en enfer, le temps pour le tueur d’accomplir sa «mission», il faisait exploser un bâtiment en plein Oslo. Etaient visés, les bureaux du Premier ministre norvégien et les locaux d’un journal libéral (comme toujours).
La personnalité du tueur intéresse les enquêteurs qui ont découvert un fasciné par les jeux vidéo violents, militant de causes extrémistes, se définissant comme «un chrétien conservateur», «un protestant en croisade». Fan de Conan le Barbare, il a été militant du parti norvégien d’extrême droite, le Parti du Progrès (Fremskrittpartiet, FrP) au discours populiste.
Selon l’écrivain Stéphane Bourgoin (58 ans, spécialiste reconnu des tueurs de masse et tueurs en série), interrogé par Le Parisien, «le tueur de masse avance toujours de faux prétextes religieux, politiques, ce qui semble être le cas ici. Cet homme s’est défini comme un fondamentaliste chrétien. Depuis la tragédie de Columbine aux Etats-Unis en 1999, le crime de masse est devenu un crime d’imitation. Les tueurs sont souvent habillés de noir, vêtus d’un treillis ou d’un costume de l’autorité. Ils postent de nombreux messages sur des forums Internet annonçant leurs actes. Le réseau Internet où ils se mettent en scène est l’occasion pour eux de laisser un testament numérique.»
Là-bas quand un homme commet un tel acte, une telle barbarie, il est l’objet de toutes les analyses. Qu’en est-il chez nous ? Savez-vous ce qui a poussé quelques-uns des jeunes de Nouakchott à devenir des kamikazes au service de AQMI ? Pourquoi deux ou trois jeunes marabouts, ressortissants du Ksar, ont assassiné froidement un américain qui rendait des services à leurs compatriotes ? Pourquoi trois jeunes d’origine sociale diverse ont-ils froidement assassiné des touristes qui ne faisaient que passer ?
Nous n’avons pas cherché à savoir. Ce genre de cas, nous préférons le taire. Oubliant qu’il s’agit d’un traumatisme social qu’il va falloir un jour traiter.

vendredi 22 juillet 2011

Communiquer, communiquer…


C’est seulement ce mercredi soir que les autorités ont enfin daigné expliquer l’objectif, la philosophie et la méthodologie de l’opération d’enrôlement des populations lancée en mai dernier. Autour du journaliste Cheikh Ould Zein Lessem, il y avait là le secrétaire général du ministère de l’intérieur, Mohamed el Hady Macina, l’Administrateur Directeur général de l’Agence Nationale du Registre des Populations et des Titres Sécurisés, Mohamed Vadel Ould Hadrami, le directeur général de l’ANAIR (agence chargée des réfugiés), Ba Madine, d’un conseiller au ministère de l’intérieur, Mohamed Ould Salek, de deux conseillers juridiques de la BCM, Diango Diagana et Baha Ould Hmeida. L’originalité ne consistait pas seulement à expliquer cette opération objet de sérieuses controverses, mais aussi le fait de les avoir fait parler dans toutes les langues nationales en plus du français et de l’Arabe.
Selon Macina, l’objectif de l’émission était bien de «mettre un terme aux rumeurs d’une campagne d’intoxication qui a dérouté les citoyens, qui a semé le doute dans certains esprits.» Rappelant la nécessité de refonder un état civil dont la situation est «déplorable» : «non sécurisé, exposé à toutes les manœuvres ou manipulations, aux falsifications». C’est pourquoi les pouvoirs publics ont donc décidé de «mette en place un nouveau système d’état civil sécurisé, moderne, basé sur la biométrie». Ces explications ont été accompagnées de propos rassurants de la part des responsables de l’agence chargée d’effectuer l’enrôlement. Il y a une procédure à suivre pour tous et personne, absolument personne ne sera oublié ou exclu, a affirmé l’A-DG de l’agence. Précisant que l’objectif ici n’est pas de déterminer la nationalité mais d’enrôler tous les habitants du pays et ceux de nos ressortissants qui sont à l’étranger.
Cette opération de communication fait suite à des controverses soulevées par les politiques et certaines des organisations de la société civile plus ou moins «intéressées» par le champ politique. Des insuffisances, des excès notamment dans certains bureaux où les agents posaient des questions «bizarres», ont suscité de craintes justifiées, mais amplifiées pour des raisons politiques évidentes.
Mais la seule séance de mercredi ne suffit pas. Il faut la faire suivre d’autres et surtout d’une campagne de sensibilisation dans toutes les langues nationales autour des procédures. En même temps l’agence se doit de rappeler certains des agents pour leur repréciser leurs missions. C’est seulement ainsi qu’on peut éviter les dérives mais aussi les instrumentalisations en cours.

P.S. (qui n’a rien à voir) : (AFP, Bamako) Quinze personnes soupçonnées de soutenir Al-Qaïda au Maghreb islamique(Aqmi) ont été arrêtées dans la nuit d'hier à aujourd'hui par l'armée malienne à la frontière avec la Mauritanie,a-t-on appris de source militaire. 
"
Nous avons arrêté dans la nuit de jeudi à vendredi quinze personnes soupçonnées d'être des soutiens d'Aqmi dans le Sahel à la frontière entre le Mali et la Mauritanie", a déclaré le lieutenant Karim Coulibaly, joint au téléphone dans cette zone du nord-ouest du Mali. 
L'armée malienne, en patrouille dans cette zone, a également "
découvert de nouvelles mines posées par des terroristes qui peuvent détruire des chars", a-t-il précisé, ajoutant que les patrouilles doivent se poursuivre "au moins" jusqu'à la semaine prochaine. L'armée malienne contrôle à présent cette zone de l'ouest du pays où Aqmi a récemment été empêchée d'établir une base dans la forêt de Wagadou. 
Le 24 juin, l'armée mauritanienne y a attaqué un campement d'Aqmi abritant de l'armement lourd qui menaçait directement la Mauritanie, selon l'état-major de l'armée de ce pays. Ce raid appuyé par les soldats maliens, selon le même état-major, avait fait 15 morts côté Al-Qaïda, deux côté mauritanien.

jeudi 21 juillet 2011

Shipeko encore


Pour les besoins de l’actualité, je vous propose en relecture un papier écrit le 14 novembre 2010 dans l’édition N°522 :
««Shipeko»… c’est un mot qui apparait comme sont apparus, il y a quelques décennies, des mots comme la gazra ou le thieb-thiib. Premières expressions du non-Etat, ces mots ont été à la base d’une culture faite de faux, de vols, de viols, de corruptions… Une culture vite adoptée par l’Appareil sécuritaire et administratif de l’époque, devenant du coup la règle dominante et même régissante. Aujourd’hui c’est autour d’un nouveau mot d’apparaître. C’est quoi donc ce mot «shipeko» ?
A la racine, il faudrait chercher le verbe en Arabe «shebeka», en Hassaniya «ishabak» qui veut dire grossièrement «croiser». Il s’agit d’un exercice qui consiste à contracter une dette auprès de quelqu’un avec engagement de la lui rembourser dans un délai donné et avec une «plus-value» déterminée à l’avance.
Une deuxième formule consiste à vous vendre un produit à crédit trois à quatre fois son prix, de vous le racheter à son prix réel ; par exemple vous céder une voiture qui coûte trois millions au prix fort de neuf millions, vous la racheter à trois millions que je vous donne immédiatement quitte à ce que vous remboursez les neuf millions dans dix mois. A la première échéance, si vous ne pouvez payer, la somme est multipliée par deux, trois, quatre… vous pouvez donc vous retrouver avec cent millions de dettes pour un montant de cinq millions à l’origine. Comme garantie de bonne foi, les demandeurs remettent souvent des chèques aux «créditeurs». Des chèques qu’ils prennent la peine de ne pas dater pour pouvoir les présenter à n’importe quel moment. C’est que la loi envoie le titulaire du chèque en prison s’il s’agit d’un chèque en bois, comme on dit. Un moyen de faire pression sur le débiteur le moment venu.
Des circuits mafieux d’usuriers se sont donc construits ces dernières années. Ce sont des banques qui pratiquent en toute illégalité le vieux métier de l’usure, pourtant interdit ici et ailleurs. Un système financier parallèle et malsain est ainsi né. L’usure devient l’activité principale de quelques-uns de nos jeunes entrepreneurs.
L’avant août 2005 a été marqué par la circulation d’un argent facilement acquis avec pour origines : les malversations dues à la mauvaise gestion des affaires publiques, le pillage de l’économie nationale par la distribution de prébendes aux dignitaires du régime de l’époque, le blanchiment de l’argent de la drogue, de l’Etat, de l’aide au développement, la profusion du charlatanisme… du coup l’enrichissement rapide et «flamboyant» a caractérisé cette période. On se rappelle encore ces «fortunés» qui occupent un moment l’espace public – mesrah - de Nouakchott pour devenir le centre de tous les intérêts. Thuriféraires, soirées animées et même chefs religieux… les heureux «gagnants» se construisent une cour qui dure le temps de flamber la fortune mal acquise.
On se souvient de toutes les histoires – construites ou réelles – qui ont entouré ce phénomène. Puis de certains procès qui ont fait date. On se souvient même que ces «coups» avaient fait des victimes à l’extérieur : le député Omanais qui avait été déstabilisé avant d’être déplumé par un groupe de faux investisseurs, les Emirs du Golf dépouillés par des charlatans…
Aujourd’hui, c’est le phénomène «shipeko» qui fait des victimes. Il ne se passe pas un jour sans qu’une nouvelle affaire n’éclate. Avec toujours le même profil : un type que l’on croyait à l’abri, vivant il est vrai au-dessus de la moyenne, mais affichant la possibilité de le faire, est traîné en prison par un ou plusieurs créanciers. On parle de dizaines de millions, parfois de centaines. Les solidarités tribales sont sollicitées pour sortir le prisonnier et payer à sa place… tellement de cas qui interpellent.
D’abord cet exercice illégal de l’activité de la banque, l’usure ensuite et enfin l’origine de l’argent crédité. Ce sont jusque-là les «victimes» qui payent, jamais les auteurs des «coups».
Ensuite la facilité pour la solidarité tribale d’être engagée. Malgré tout ce qu’on peut en dire, la tribu – quelle qu’elle soit – a toujours interdit l’expression de la solidarité en cas de faute grave. Pas question de payer pour celui qui a fauté. Cela se traduit dans l’Etat moderne par des chartes intérieures qui interdisent l’élan tribal dans les cas suivants : si l’individu a tué en conduisant une voiture non assurée ou sans permis, s’il a détourné des deniers publics, s’il a volé… en fait tout ce qui peut s’apparenter à un viol des préceptes moraux et religieux ne peut faire l’objet d’un effort collectif. Une manière de préserver la société et de ne pas encourager la forfaiture. Où en est-on aujourd’hui ?
Je ne sais pas si légalement il faille espérer une intervention de la force publique, mais si c’est le cas, il en est temps. Moralité : Arrêter de vivre dans l’informel et réhabiliter certaines valeurs. La refondation commence par là».

mercredi 20 juillet 2011

Qui veut le dialogue ?

Le président de l’Assemblée nationale, président de l’APP (alliance populaire progressiste) doit être fatigué de faire la navette entre le Président de la République et ses amis de la Coordination de l’opposition démocratique (COD). Il ramène des propositions d’ici pour les voir récuser par là. Il revient avec des réserves émises par ses amis, les voit acceptées par le Président Ould Abdel Aziz, le temps de revenir parmi ses amis et un nouveau processus est lancé. Le dernier en cours est celui de la commission quadripartite composée pour étudier les modalités du dialogue tant attendu.
Messaoud Ould Boulkheir qui se trouve ici un rôle de facilitateur qui lui sied bien, arrivera à un seuil où il ne pourra qu’être exaspéré par le jeu qu’on entend lui faire subir. Il n’est pas dupe et sait parfaitement que peu de politiques – dans la Majorité comme dans l’Opposition – acceptent de le laisser jouer ce rôle de premier plan.
Au sein de son camp, il est en train de ravir au chef de file de l’Opposition son rôle, et à l’UFP (union des forces du progrès) «sa vocation». C’est en effet, le rôle de l’Institution de l’Opposition démocratique représentée par son chef de file, en l’occurrence Ahmed Ould Daddah, c’est ce rôle d’interface (institutionnel) qu’occupe Ould Boulkheir aujourd’hui.
Le refus de reconnaitre à Messaoud ce rôle de facilitateur, peut expliquer le malaise existant au sein des deux ensembles que sont la Majorité et l’Opposition.
Au sein de la Majorité, on sent l’exclusion des appareils politiques. On sait aussi que dans une situation d’apaisement, les petits partis n’ayant pas de signification seront en dehors du jeu. Que les compétences politiques feront leurs (ou non) quand le dialogue sera engagée. Rares, au sein de la Majorité, les hommes et les femmes qui peuvent discuter, négocier, conclure… Rares aussi sont ceux et celles qui peuvent se prévaloir d’un poids ou d’une épaisseur politique à même de leur permettre de se rendre utiles, à plu forte raison indispensables.
Au sein de l’Opposition et en plus des ressentiments personnels toujours vivaces, l’établissement d’un dialogue signifie nécessairement la normalisation politique. Alors que la stratégie des plus en vue – RFD, UFP – consiste à amplifier la crise pour provoquer la chute du régime. Ce qui compte ici étant l’organisation d’une élection présidentielle anticipée et, au moins, la chute de Ould Abdel Aziz. Ce n’est absolument pas là l’objectif de partis comme l’APP de Messaoud, El Wi’am de Boydiel Ould Hoummoid ou de Tawaçoul de Jemil Ould Mansour. Pour lesquels, la participation dans le jeu politique passe par l’apaisement des rapports entre le pouvoir et l’opposition.
Au fonds personne ne veut vraiment le dialogue. Alors on tuera le temps en mettant en place des commissions sans but précis, en restant dans le flou… Après tout, nous parlons d’un dialogue dont l’idée a été lancée le 28 novembre 2010… c’est seulement en juin 2011 qu’on a pensé y répondre.

mardi 19 juillet 2011

Stabilité impossible

Moins de sept mois après sa prise de fonction, alpha condé a-t-il vécu la première tentative de coup d’Etat contre son pouvoir ? Probablement. Vers 3 heures du matin, ce mardi, des tirs nourris ont été entendus à Conakry où l’on est habitué aux insurrections militaires et à l’indiscipline des hommes en arme.
La Guinée qui a connu une ère d’instabilité comparable à celle que nous avons vécue en Mauritanie – avec un CMRN d’abord, puis un long régime autocratique, un coup d’Etat et une transition consacrée par une élection à deux tours -, la Guinée ne semble pas «de retour» comme le promettait l’opposant historique Alpha condé arrivé au pouvoir à la suite d’un deuxième tour qui l’a opposé à Cellou Dalein Diallo. Lequel avait accusé son adversaire d’avoir bénéficié – pour des raisons ethniques – du soutien de la junte. Tout en reconnaissant les résultats, ce qui devait être à son actif. Mais le vieux Condé a préféré lui faire la guerre et d’ailleurs la faire à toute l’opposition. Si bien que la nouvelle Guinée prenait l’allure de celle de Sékou Touré où s’opposer était un crime. Ce n’est donc pas par hasard que des soulèvements aient lieu.
Les coups d’Etat dans nos jeunes Etats sont certes condamnables, mais sont largement explicables par la mauvaise volonté de l’encadrement politique national à renforcer les institutions démocratiques et à sortir des querelles pour le pouvoir personnel.
Si les évènements de ce matin prenaient de l’ampleur, ou s’ils venaient à se répéter, l’expérience guinéenne sera sérieusement menacée. Ce sera, en partie, à cause du manque de sérénité dans l’exercice du pouvoir chez alpha Condé qui pense déjà à un second mandat. Tout le malheur de nos présidents est là : dès que l’un d’eux arrive au pouvoir, sa première préoccupation est de chercher les voies et moyens de se maintenir. Parfois en trafiquant son âge, parfois en «liftant» la constitution ou tout simplement en éliminant les éventuels prétendants.

lundi 18 juillet 2011

Serge Daniel de retour de Wagadu

Sur la question de l’insécurité dans l’espace sahélo-saharien, il y en a un qu’il ne faut jamais rater : Serge Daniel qui officie pour RFI et AFP à partir du Mali. Sa relation des faits, toujours amusante, souvent fallacieuse, est intéressante. Elle donne une idée de ce qu’est une presse quand elle ne sait pas auquel de ses saints se vouer.
Après avoir vu les voitures de AQMI «parader» à la frontière mauritano-malienne, et donner un bilan des lus négatifs pour l’Armée mauritanienne de la bataille de Wagadu, tout en se basant cependant sur les confidences de quelques officiers mauritaniens sur le terrain, Serge Daniel revient ce matin des lieux où se seraient déroulé les combats. Sur RFI et sur AFP. Nous reproduisons ci-après la dépêche de l’AFP dont il est l’auteur.
Vous remarquerez l’amalgame entretenu autour des voitures calcinées (huit selon lui, alors que l’on a parlé jusqu’à présent de quatre seulement), ont-elles été détruites par les «quinze obus» balancés par l’Armée malienne ou par les Mauritaniens ? A vous de lire et d’en tirer la conclusion.

Forêt du Wagadou (Mali), 18 juil 2011 (AFP) - Al-Qaïda au Maghreb islamique 
(Aqmi) venait d'y établir une base d'où elle comptait agir en Mauritanie: trois semaines après d'intenses combats, la forêt du Wagadou, à la frontière Mali-Mauritanie, est aujourd'hui sous contrôle des soldats maliens.
"Les tranchées abandonnées que vous voyez là étaient en construction depuis cinq mois par les combattants dAqmi", affirme à un journaliste de l'AFP le colonel malien Gaston Damango, chef des opérations dans cette zone de la forêt du Wagadou, à environ 500 km au nord-est de Bamako. Ces tranchées, profondes d'environ deux mètres, étaient destinées à "approvisionner cette position en munitions" et permettaient aux "terroristes" de se déplacer "facilement sans être vus", explique le colonel qui note: "il y a parmi eux de véritables stratèges militaires".
A la ronde, quelques grands arbres au feuillage touffu dans cette forêt longue de 80 km sur 40 de large, pour le reste essentiellement composée d'arbustes et de buissons, servaient de postes d’observation à Aqmi pour surveiller l’arrivée d’éventuels ennemis. Sur le lieu des combats du 24 juin, les restes de huit véhicules calcinés et des milliers de douilles au sol témoignent de l'intensité des affrontements entre l'armée mauritanienne, soutenue par celle du Mali, et la branche maghrébine d'Al-Qaïda.
"Le jour de l’attaque, affirme le colonel Damango, le chef des opérations de l'armée mauritanienne nous a demandé de bombarder vers le sud-est de la forêt une position d’Aqmi. Larmée malienne a envoyé au total quinze obus sur les positions ennemies". Selon lui, peu importe que les membres d'Aqmi soient partis d'eux-mêmes ou bien aient été délogés: "le résultat c'est qu'ils ne sont plus là aujourd'hui, qu'ils ont subi une défaite".
Le raid contre cette base qui n'était pas complètement achevée, mais abritait de l'armement lourd menaçant directement la Mauritanie, selon l'état-major de l'armée de ce pays, a fait 15 morts côté Al-Qaïda, deux côté mauritanien, a affirmé le même état-major.
Les armées malienne et mauritanienne ont mené pendant plusieurs semaines des opérations de sécurisation avant et après le raid, action conjointe appelée "Benkan", mot bambara qui signifie "Unité". Les Mauritaniens sont retournés chez eux il y 15 jours, mais ils ne sont pas loin, à quelques kilomètres seulement.
Le contrôle de la forêt du Wagadou incombe désormais aux Maliens: trois compagnies y participent et chaque jour, deux avions de surveillance, don de la France au Mali, survolent la forêt, ainsi que deux hélicoptères de combat. Des soldats maliens campent dans la forêt, l'objectif étant d'empêcher coûte que coûte le retour des djihadistes.
Il faut également déminer la zone, "une priorité", selon le commandant Baïdi Diakité du génie militaire, car les membres d'Aqmi y ont dissimulé des mines anti-char de fabrication tchèque "très dangereuses".
La venue de l'armée malienne dans la région de la forêt du Wagadou a en outre profité aux populations locales, avec des soins et des distributions de vivres. "En quelques jours, nous avons fait ici une centaine de consultations et quatre opérations", explique le médecin-colonel Sidiki Bérété, à l’hôpital de la localité de Niono. Des "soins gratuits" pour les maladies ou blessures bénignes, se réjouit Amadou Tounbé, conseiller municipal. "Dans les cas graves, il faut évacuer", dit-il. Non loin de Niono, dans le village de Diabali, deux camions se garent et
des militaires en bermuda en descendent pour distribuer une partie des 100 tonnes de vivres, don de la présidence de la République malienne qui profitera également aux premiers villages mauritaniens de l’autre côté de la frontière.

dimanche 17 juillet 2011

Breiga, encore «Lebreiga»

La dernière nouvelle du front libyen, c’est l’incursion «d’une petite unité de rebelles libyens» dans la ville-port de Breiga. Une opération présentée comme une avancée considérable sur le front de la guerre et comme une preuve de l’effondrement du camp Kadhafi qui perd ainsi une position stratégique dit-on. Ça s’est passé le 15 juillet et cela a été relayé par tous les médias depuis.
Moi je croyais que Breiga, tantôt appelé «Lebreiga», était sous contrôle rebelle depuis mars dernier. C’est du moins ce qu’on nous avait martelé. RFI, al Jazeera, Al Arabiya, l’AFP pour ne parler que des organes de presse engagés sur le terrain – ou presque -, ces organes nous ont dit à plusieurs moments de la crise et surtout au début, que ce port est aux mains des rebelles. Vers la mi-mars, des dépêches ont même fait état du début d’exportation du pétrole par les rebelles à partir de Breiga.
Je me rends compte aujourd’hui qu’il n’en était rien. Les rebelles sont incapables de pénétrer la ville, comme ils sont incapables de tenir une position conquise ailleurs. Sans les frappes de l’OTAN, ces rebelles auraient été vaincus depuis les premières semaines. Ce qui pose de sérieux problème.
Au début, le prétexte utilisé par la Communauté internationale – en fait la France, Les Etats-Unis, le Royaume Uni et quelques tirailleurs de l’époque moderne (Qatar et Emirats Arabes Unis) -, ce prétexte était de protéger les populations civiles. Aujourd’hui, on voit clairement que l’action militaire de l’OTAN a pour objectif de renverser un régime, celui de Kadhafi, en inversant le rapport de force en faveur d’une rébellion armée dont on ne connait ni les inspirations idéologiques encore moins les objectifs.
Breiga, Lebreiga est aujourd’hui la preuve de l’enlisement dans lequel on s’installe de ce côté. On dit occuper, on recule, on dit reprendre et à la fin on se retrouve au même niveau de conquête qu’au tout début des opérations. Avec des milliers de morts, des morts qui ne sont finalement que des libyens. Ces libyens qu’on voulait protéger. Soi-disant.

samedi 16 juillet 2011

La fête des dattes

Ce n’est pas exactement la Guetna, c’est une fête, la deuxième du genre que la Mairie de Tijikja organise pour célébrer la saison. L’occasion pour la ville d’être, le temps de la fête, un centre de convergence nationale. Pas une formation politique, syndicale et/ou sociale n’a décliné l’invitation de la Mairie de Tijikja. En plus quelques ministres ont fait le déplacement. En plus de nombreux amis de la ville et amoureux de la région.
Expositions de manuscrits, visites guidées de la ville et de ses principaux centres d’intérêt, des ateliers sur le développement de la région et de la ville en particulier, une foire aux dattes… trois jours durant, la ville grouillait de monde et d’activités.
En plus des Mauritaniens, il y avait là partenaires au développement et amis étrangers : l’UNICEF, la Banque Mondiale, les Ambassades du Japon, du Mali, des USA…
Il faut dire qu’en quelques années, la ville a vraiment changé avec notamment un réseau routier en plein essor, et des activités économiques en plein développement.

vendredi 15 juillet 2011

Sur la route du Tagant

Had açiil vtagaanet shaam
Naavid ha laagi ‘anha ‘aam
U’mal bilyaaliih u layaam
Layn el hag minha bell mnayn
‘aadu ibaanulu ruuç akhhaam
Kda tagaanet methadiine
Yanbaaw u yarbaaw vleghmam
U huma zaad ellaa mashyuviin
Maa yabga shawq edress ma gaam
U laa yabga vil’aynine khziin
U laa yabga mandhuum vlefhaam
Maa jawau el faadhu mandhumin
U yabga maa wadda haq traab
Maahi kiif traab khra zayn
U yabga maa wadda haq ahbaab
Maa yinjabru viblaad khrayn

Il y a mille façons de réciter ce poème. La plus usitée est celle-là. Quelle que soit la récitation qu’on en fait, le poème de Sidi Mohamed Ould Gaçri ne pouvait pas mieux décrire ce pays aux contreforts abrupts et envoûtants. Peu importe la route qu’on prend, on ne peut rester indifférent à l’approche des grands plateaux auxquels font concurrence des dunes démesurément grandes, éternellement belles. A la vue de ces paysages contrastés, on comprend pourquoi le Tagant a produit les plus belles compositions dédiées aux lieux. Nulle part dans le Trab el Bidhâne on enregistre autant d’attachement à la terre, autant de célébrations des lieux. Pas parce qu’on y a aimé, pas pour le souvenir d’un moment passé dans le lieu, mais tout simplement pour la beauté du lieu, pour le lieu lui-même.
Le pays de la pierre, «trab el hajra» comme on dit en Hassaniya, cet espace qui englobe aussi une partie de l’Adrar dont il est presque le prolongement et une partie de Rgueyba dont il reste le lieu d’enracinement, ce pays a produit un caractère fait de labeur, de sensibilité, de prévoyance et de forte rationalité. C’est ce que l’homme du Tagant incarne aujourd’hui.
Le labeur a donné la mentalité du «compter sur soi». La sensibilité, l’amour de la belle parole. La prévoyance, le sens de l’hospitalité. La rationalité, la rigueur dans la vie.
Je suis à Tijikja depuis la veille. Je viens célébrer avec les autochtones le festival des dattes. Dans sa deuxième édition. Les festivités doivent commencer dans la journée par la visite guidée de l’ancienne ville.
Dans tous les ksours anciens, il y a toujours ce quartier appelé localement «leqdima», l’ancienne. Il est le noyau de la première ville. A Atar le Garn el Gaçba a été en partie détruit par la Mairie qui a construit un marché sur une partie du vieux quartier. A Wadane, la ville ancienne a été conservée pour être un haut lieu du tourisme local. A Tijikja, on a l’impression qu’on encourage la disparition des vestiges anciens. Quand ce ne sont pas des constructions modernes en lieu et place des maisons de pierre, c’est le délabrement qui en arrive à bout. Une restauration pourrait être envisagée par la très active mairie de la ville. Espérons-le.