mardi 4 juin 2013

En route pour Nouadhibou

Prendre la route, quitter Nouakchott, cela relève toujours pour moi du registre de la décompression. Surtout quand je vais à Nouadhibou, une ville qui est pour moi ce que la Mauritanie aurait dû être : un espace d’intégration, un melting-pot, un lieu où l’on reconnait la valeur du labeur, où l’on se dépense pour gagner sa vie, où l’on se regroupe par centre d’intérêt et par corporation…
Aller à Nouadhibou, c’est aussi, espère-t-on du moins, fuir la fournaise de Nouakchott pour la clémence d’une presqu’île où la douceur règne en permanence. Même si l’on oublie qu’on doit passer par Tijirit et surtout Tasiast… un espace qui ne finit pas de finir… la monotonie dans toute sa plénitude…
Agneytir, il ya quelques semaines grouillant de cheptels et de campements heureux, est triste aujourd’hui. La plante «oum mourekba» qui verdoyait fièrement début avril sur tout l’espace, exception faite des grandes dunes, cette plante a noirci par ses racines et n’attire plus les bêtes qui continuent quand même de chercher désespérément quelques bouts comestibles pour leur tendresse.
Le mois de mai est triste sous ces latitudes. Les vents d’est apportent poussière et chaleur. Le soleil, chaque jour plus chaud que la veille, frappe avec ardeur. Il se lève très tôt pour se coucher très tard. Et garde la même force, la même chaleur… ici le midi règne en roi toute la journée. Il faut que le soleil tombe pour espérer un souffle supportable…
Au kilomètre 200, j’avais prévu trouver le mirage de restaurant qui était là il y a quelques années. Des ruines de baraquement, c’est la seule chose qui en subsiste. Je continue vers la «gare du Nord» appelée ici «bell Wul Bouamatou» pour rappeler l’investisseur Didi Bouamatou qui a mis des moyens pour participer à la rentabilisation de cette route longue de 470 kilomètres en proposant aux voyageurs éreintés une halte moderne à son milieu. Une aire de repos qui permet de s’approvisionner et de profiter pour manger, boire, prier, dormir…
Non loin de là, les autorités ont décidé de construire une nouvelle ville : Chami qui sera le chef-lieu d’un département rattaché à la Wilaya de Dakhlet Nouadhibou. Effectivement, une ville moderne a poussé au milieu de nulle part. Sur le lieu qu’on appelait «’adheym el marraar», haut-lieu de souvenirs de grands poètes…
A quelques cent mètres de la ville, un casernement dont l’emplacement intrigue. Pour son exposition et la facilité avec laquelle il pourrait être neutralisé en cas d’attaque ennemie. Pour son exposition aux vents qui soufflent tout le temps sur la zone.
Avant de descendre «dans» la plaine de Tasiast, on est frappé par une activité de recherche minière juste au bord de la route. De grosses pelles et des engins s’activent à creuser des tranchées. Le produit est déversé aux abords de ces tranchées pour former de gros amoncellements. Ça ne doit pas être un projet de construction au regard de la taille des tranchées. S’il s’agit d’un permis de recherches, ce doit être pour une surface infime : juste de quoi importuner Tasiast Mauritanie (Kinross).

La monotonie de la route est rompue par les postes de contrôles qui dépassent la dizaine si l’on compte la douane. C’est, encore une fois, le lieu de rappeler l’inutilité de tels contrôles qui sont des messages inquiétants pour le visiteur. Pour être la preuve de l’insécurité. Pour être de hauts-lieux de magouilles et d’arnaques. Pour être la preuve que quelque chose ne va pas dans ce pays…