jeudi 15 décembre 2011

Du vote des étrangers en France


C’est un débat ouvert par le vote d’une loi autorisant le vote des étrangers, que le Sénat français a ouvert un débat sur la scène publique française et ce à la veille d’une présidentielle dont la campagne est déjà lancée.
Je suivais l’autre soir une émission de France 2, «Mots croisés», où l’on débattait du sujet. Etaient invités sur le plateau : Thierry Mariani, ministre de l’actuel gouvernement, cofondateur de la droite populaire ; Rama Yade du Parti Radical, ancien secrétaire d’Etat, conseillère municipale et régionale dans les Hautes-de-Seine, d’origine sénégalaise et naturalisée française au milieu des années 90 ; Julien Dray, député PS, membre de l’équipe du candidat François Hollande ; Arno Klarsfeld, avocat franco-israélien, membre du Conseil d’Etat, président du Conseil d’administration de l’Office français de l’immigration et de l’intégration ; Serge July, cofondateur du quotidien Libération, éditorialiste à RTL. J’ai retenu quelques attitudes.
La première – et sans doute la plus radicale - est celle du président de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui disait en substance qu'«une vague fondamentaliste touche la France» car «une grande partie des Tunisiens de France a voté pour des listes fondamentalistes lors des dernières élections tunisiennes». Qu’il n’était pas exclu, même qu’il était probable, de voir des fondamentalistes prendre les conseils locaux dans certaines régions de Paris. «Selon moi, le moment n'est donc pas venu de donner le droit de vote aux étrangers alors qu'il existe encore des problèmes d'intégration : beaucoup de gens qui viennent d'Afrique du Nord et d'Afrique subsaharienne ne sont pas encore intégrés et n'ont pas encore intégré les valeurs de laïcité et d'égalité hommes/femmes». Mais «si la plupart des étrangers était intégrée, s'il n'y avait pas cette vague fondamentaliste. Cela n'a rien à voir avec la provenance des étrangers. Mon point de vue repose sur les valeurs que certains étrangers n'ont pas encore acquises», peut-être aurait-il été favorable aux étrangers.
Pour le juif d’origine roumaine, «si une grande partie des Tunisiens de France a voté pour des listes islamistes alors que beaucoup d'entre eux vivent en France depuis plusieurs années, c'est bien la marque que l'intégration n'a pas été une réussite!».
Noyant Rama Yade qui tentait de faire entendre sa voie tout en gardant ses distances vis-à-vis de la partie à gauche de la table, Arno Klarsfeld ne tempéra son ardeur que lorsque Serge July lui sortit le concept «la France est une idée» qui a fondé selon lui la première Constitution française.
La Constitution de 1793 qui reconnaissait déjà les droits des étrangers vivant en France. En son article 4, elle stipulait : «Tout homme né et domicilié en France, âgé de vingt et un ans accomplis ; - Tout étranger âgé de vingt et un ans accomplis, qui, domicilié en France depuis une année - Y vit de son travail - Ou acquiert une propriété - Ou épouse une Française - Ou adopte un enfant - Ou nourrit un vieillard ; - Tout étranger enfin, qui sera jugé par le Corps législatif avoir bien mérité de l'humanité - Est admis à l'exercice des Droits de citoyen français».
Même si cette Constitution n’a jamais été mise en œuvre, l’argument était de taille.
Les hommes de droite présents ont continué cependant à agiter l’épouvantail de l’immigration et de l’islamisme menaçant, à l’absence d’intégration de gens «qui ne parlent même pas français» (sic). Le Klarsfeld allant jusqu’à douter de la maturité des peuples qui ont pu choisir, au terme des premières élections libres, les islamistes pour les diriger. C’est dire combien la bêtise peut être incommensurable.
Ils termineront le débat, en rappelant qu’au Royaume Uni, ce droit de vote est reconnu pour les ressortissants du Commonwealth, pourquoi la France ne le reconnaîtrait-elle pas aux ressortissants de ses anciennes colonies en attendant ?  
Malgré tout ce qui a été dit par les représentants de la droite au pouvoir, l’idéal français originel est bien la fondation d’une appartenance universelle. La citoyenneté est liée, non aux droits du sol qui sont reconnus, mais à l’adoption de valeurs humaines qui appartiennent à cet ensemble de l’Universel.