Quand
on nous dit que les forces françaises sont intervenues en Centrafrique «pour
éviter un bain de sang», on ne peut s’empêcher de marquer un temps d’incrédulité :
il y a plus de morts, de blessés et de déplacés depuis l’intervention
française. Selon les premières indications des ONG internationales, on dénombre
un millier de morts pour le seul mois de décembre, les déplacés se comptent en
centaines de milliers (le million est dépassé). A quoi donc sert cette
intervention à part le fait qu’elle ajoute en drame en parasitant la donne et
en justifiant les appréhensions des uns ?
Si
la France avait «serré» de près ses acolytes, genre les présidents
fantoches André Kolingba, Ange-Félix Patassé, David Dacko et plus tard Bozizé, peut-être qu’on
n’en serait pas là. Le déroulement des évènements se suit et se ressemble dans
les pays africains francophones. Les renversements de régime sont souvent le
fait de l’ancienne métropole, et si c’est un groupe «autonome» qui l’emporte,
l’ancien acolyte est réanimé. Commence alors une guerre civile qui va justifier
l’intervention franche. Le couvert de la «légalité internationale» est
vite obtenu par le truchement d’une résolution préparée et imposée depuis
Paris. Le justificatif moral – peuple en danger – sert aussi pour faire
accepter l’intervention à l’opinion publique française.
Il
est sûr que la France devra trouver au plus vite un nouveau théâtre d’opérations
pour faire passer les déboires de l’intervention en Centrafrique. Laquelle a
servi à occulter la guerre dans le Sahara central (Nord Mali). Ni au Mali, ni
en Centrafrique, la situation ne semble se stabiliser.
La
ville de Kidal est toujours en dehors de l’autorité malienne, ce qui ajoute au
désordre qu’il y a. L’insécurité règne dans tout le Nord du Mali. Largages au
quotidien, kamikazes, voitures piégées, coupeurs de route, exactions, dommages
collatéraux… La guerre continue sans couverture médiatique. Dans le silence. Assez
de vives tensions pour empêcher la stabilisation d’un régime politique qui se
cherche encore et qui peine à asseoir son autorité.
Au
Mali, on change de stratégie toutes les semaines. Les autorités françaises annoncent
un retrait proche de leurs éléments. Avant de revenir pour dire qu’il y aura un
redéploiement. Pour enfin parler de «nouveaux dispositifs plus adaptés à la
guerre contre le terrorisme». Il s’agit de mettre en place une force de
frappe capable d’intervenir au besoin et de regagner ses bases-arrières. Empruntée
aux Américains, cette méthode permettra aux Français de sortir «physiquement»
du bourbier tout en gardant la main… sur la gâchette.
En
Centrafrique, la guerre civile a naturellement été entre les communautés
musulmane et chrétienne. La Séléka contre les Anti-Balakas. Ce n’est pas la
première guerre civile centrafricaine. Il y a eu celle de 2004 à 2007, mais qui
n’a pas pris l’aspect d’une confrontation religieuse franche.
Sur
ce théâtre, les Tchadiens de la force africaine ont vite été accusés d’appuyer
les Musulmans de la Séléka. Mais d’un autre côté, le comportement des forces
françaises qui désarmaient les uns de façon plus rigoureuse, a créé une
suspicion nourrie par la proximité religieuse.
A
qui le tour après la Centrafrique et le Mali ?
La Guinée doit être inscrite sur la liste des Etats en
déconfiture. L’ethnicisme y est cultivé à outrance (Malinkés contre Peulhs,
Forestiers contre tous). Dirigisme et brutalités. Exclusion et pauvreté. Si l’on
y ajoute les ressources qui excitent les appétits, le trafic de drogue, les
guerres civiles aux frontières et le reflux des combattants vers la Guinée, on
peut dire que tous les ingrédients de l’explosion sont là. Pourquoi la France laisse-t-elle
faire ? pourquoi ne pas intervenir auprès du Président Alpha Condé pour
lui faire la leçon ? pourquoi attendre que les choses atteignent un point
de non retour ? la France a-t-elle besoin d’un autre théâtre d’intervention ?
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