Le
24 août, c’était la mise en place dernier au Sénégal de l’Observatoire des
acteurs non étatiques pour la lutte contre la non transparence, la corruption
et la concussion. L’occasion pour le Premier ministre qui a ouvert les travaux
d’exprimer la volonté du nouveau gouvernement de recouvrer les biens mal acquis
durant l’exercice du président Wade. D’ailleurs, une Cour de répression de l’enrichissement
illicite avait été créée à cet effet. La Banque Mondiale a fini par exprimer
son soutien et sa disponibilité à aider à cela.
On
peut toujours, comme le fait Wade et son camp, rétorquer que l’opération doit
couvrir toutes les époques, de l’indépendance du pays à nos jours. Après tout,
les responsables actuels, y compris le Président Macky Sall, ont eu à gérer les
affaires publiques. Mais là n’est pas la question pour moi.
Imaginons
un moment qu’au lendemain du 3 août 2005, la junte arrivée au pouvoir ce
jour-là, avait décidé de permettre aux Mauritaniens et à la Mauritanie de
recouvrer les biens mal acquis des trois dernières décennies… si elle avait
décidé de poursuivre les fauteurs en matière de gestion des affaires du pays…
si une commission ou une cour spéciale s’étaient intéressées aux achats à l’intérieur
comme à l’extérieur de biens, meubles et immeubles, par les hauts
fonctionnaires de l’époque… si on avait poussé pour déceler les connivences et
complicités entre les nouveaux riches, ceux dont l’enrichissement s’est fait
trop rapidement, et les hauts fonctionnaires, entre cet enrichissement et le
blanchiment de l’argent destiné au développement des infrastructures, du
secteur agricole, de l’élevage, des mines, des banques, de l’administration, de
l’enseignement, de la formation technique…
Nous
aurions collecté certainement de quoi financer toutes les périodes de transition,
l’évolution politique du pays, son retard… Mais, plus important pour nous, la
plupart de ceux qui devaient «raser les
murs» pour reprendre l’expression du président du CMJD à l’époque de l’affaire
Zeidane Ould Hmeyda, n’auraient pas occupé la scène aujourd’hui, nous
assourdissant de leurs propos dont l’objectif premier est de blanchir leur
époque après l’avoir volée et violée.
Les
milliards détournés et/ou tout simplement offerts ont manqué quand il s’est agi
de construire des routes, des écoles, des points de santé, des puits… quand il
s’est agi de moderniser le pays et de l’équiper, de faciliter la vie des
citoyens, de promouvoir leur bien-être…
Si
nous en sommes encore à nous vanter d’avoir désenclavé quelques-unes de nos
capitales départementales, c’est parce qu’il y a eu des ministres de l’équipement
et du transport, des secrétaires généraux de ces ministères, des directeurs des
Travaux Publics, de l’ENER, du Laboratoire des TP, des délégués régionaux… qui
ont trouvé des formules pour détourner les financements destinés à cela.
Si
l’on court encore derrière l’autosuffisance alimentaire, c’est bien pour la
même raison. Tout comme pour l’amélioration de notre système éducatif, de notre
système de santé… si les Mauritaniens continuent à aller dans les pays voisins
pour se soigner, c’est parce que des ministres de la santé, des secrétaires
généraux, des directeurs centraux et ceux des établissements, ont volé les
financements… Il en va de même pour l’administration où ministres, gouverneurs
et préfets ont perpétué la gestion coloniale marquée par le pillage des
ressources.
Heureusement
que ce ne sont pas tous les hauts fonctionnaires qui ont été indélicats. Mais les
plus exigeants parmi eux, les plus bruyants, les plus présents sur la scène…
ceux qui donnent le plus de leçons aujourd’hui l’ont été… et la cabale, comme
celle ouverte au Sénégal, aurait pu servir à les calmer, le temps pour le pays
d’asseoir un système démocratique acceptable et une des règles durables de bonne
gestion.
«’ava
Allahu ‘an maa salav» (qu’Allah pardonne ce qui est passé), ce fut le
leitmotiv, la grande prière de l’époque, le temps de faire oublier ce qui s’est
passé, de faire pardonner ses hommes et ses actes. Réussi jusqu’à présent.