Ce
nouveau scandale du baccalauréat doit servir d’électrochoc aux structures du
ministère pour apporter des correctifs à même de garantir l’équité, la
transparence et la régularité de l’examen. Reprendre l’épreuve de
physique-chimie est certes une bonne décision, mais il faut plus.
D’abord
l’enquête. Une enquête doit être immédiatement lancée pour savoir d’où vient la
fuite. Ne pas hésiter à remonter les filières jusqu’à aboutir à la source de
cette fuite grave et dangereuse. Assurer ensuite le maximum de publicité aux
résultats de l’enquête et frapper fort les coupables s’il en existe.
Dans
l’immédiat, proposer des solutions pour éviter l’intrusion des moyens modernes
dans le trichage. On parle beaucoup de l’utilisation excessive des réseaux
sociaux et des applications permettant de diffuser informations et solutions
concernant les épreuves. Si le gouvernement peut assurer l’installation de
brouilleurs de réseaux dans tous les centres de l’examen, ce serait une
solution à tester. Sinon, renforcer et systématiser le contrôle au téléphone.
Dans
le long terme, envisager une profonde réforme de l’examen lui-même. Si dans
beaucoup de pays, il n’existe pas de baccalauréat, dans d’autres, cette épreuve
est étalée sur deux ans : les anticipés permettent aux candidats de
l’année suivante de passer les épreuves des matières secondaires pour ne
laisser que les matières principales. Ce qui facilite quelque peu la tâche.
Mais le mieux, serait de faire du baccalauréat une composition de passage et
rien de plus. Comment ? C’est aux spécialistes de l’éducation de faire des
propositions.
On
ne peut pas continuer à lier l’avenir d’un enfant à un examen qui se déroule en
trois jours et qui est destiné, dans sa forme et dans son fond, à sanctionner
un cursus qui aura duré treize ans (six pour le fondamental, quatre pour le
collège et trois pour le lycée). D’autant plus que l’examen a perdu, depuis le
scandale de 2000, toutes ses lettres de noblesses.
Il
permet encore de distinguer qui des étudiants a droit à une bourse, à
l’étranger ou à l’intérieur, de freiner quelque peu le gonflement de la masse
des demandeurs d’emplois. Pas plus.
C’est
bien cette hantise de réguler la masse des chômeurs qui a dicté aux pouvoirs
publics (sous pression de la Banque Mondiale) de rallonger le cursus pour
retarder le plus l’arrivée de dizaines de milliers de jeunes Mauritaniens sur
le marché de l’emploi. Aujourd’hui que la formation technique est remise sur la
sellette, deux mesures s’imposent.
La
première est de faire de l’école mauritanienne un outil de formation et de
perfectionnement professionnels. Multiplier pour cela les établissements
techniques secondaires, diriger les élèves de plus de quinze ans vers ces
établissements au lieu de ceux de l’enseignement général, imposer dès le
concours d’entrée en sixième des moyennes d’orientation vers l’un ou l’autre
des enseignements (professionnel ou général)…
La
deuxième mesure est d’instituer un service national qui, dans sa philosophie,
doit être perçu comme un palliatif à l’absence des internats qui étaient un
lieu de convergence pour les Mauritaniens de toutes origines. Un service
national permettra aux jeunes Mauritaniens de servir leurs compatriotes dans
leurs terroirs, de connaitre ces terroirs et leurs habitants, de les préparer à
la vie active et aussi …retarder leur arrivée sur le marché du travail (si cela
importe tant).
Les sous doués passent le bac, c’est le titre d’un film qui a eu un succès énorme à
Nouakchott au début des années 80. C’est un peu une parodie de ce qui se passe
aujourd’hui : parents et élèves multipliant les procédés et méthodes pour
trouver le moyen de faire parvenir à leurs enfants les solutions des épreuves.
Y compris les messages par tamtam utilisé par le fils d’un ambassadeur africain
qui disait à ses copains : «bac ou pas bac, je serai ministre»…