2011…
2012… 2013… et maintenant 2013. Je choisis de vous faire relire quelques
passages d’écrits postés ici. Le 31
décembre 2011 : «Une année de plus est passée. Les années s’égrènent,
une à une sans qu’on se rende compte que nous perdons un temps précieux.
La politique reste
l’occupation première de l’élite mauritanienne. Elle le restera tant qu’elle
est une source de revenu, de sécurisation de carrière et de promotion sociale.
Les pratiques PRDS (parti-Etat, 1991-2005) ont fait que 98% de l’élite ont
trouvé dans l’exercice de la politique la voix la plus aisée et la plus courte
pour gravir les échelons, accumuler les biens et profiter de l’impunité
ambiante. La politique est devenue un exercice permanent d’indignité et de
mensonges. Sans risques pour ses auteurs.
Le jeu politique reste
un exercice pour les plus doués dans l’irrespect du code de la route et autres
réglementations sociales. Ceux qui clignotent à gauche et virent à droite. Ceux
qui ont toujours un objectif déclaré, un objectif caché et un autre qui leur
permet de ne jamais être stable dans le positionnement, ni constant dans les
engagements.
L’école est toujours
un dépotoir social, une sorte de fabrique de la nullité à ciel ouvert. C’est
vraiment le Mal, avec un grand M. Et parce que l’ascension professionnelle et
la promotion sociale ne sont pas le fruit d’un effort particulier, encore moins
la conséquence de qualités particulièrement positives, l’école fournit la
médiocrité ambiante et la cultive.
Malgré la
multiplication des festivals, des émissions spécialisées dans la promotion de
la musique ou de la poésie, malgré toutes les gesticulations, nous ne
retrouvons pas le chemin de la prospérité, de la créativité et du rayonnement.
Le «recul de la joie» - c’est comme ça qu’un ami à moi appelle la tristesse
ambiante et qui est la cause, selon lui, de nos déboires – règne toujours,
faisant de nous l’un des peuples les plus constipés sur terre. L’expression du
bonheur est une condition de l’accomplissement individuelle et commun. Le
Mauritanien n’est jamais satisfait et ne fait rien pour l’être…
Pas la peine de parler
d’économie, de la fracture sociale, de la menace sécuritaire, de
l’administration… cela nous attristera encore plus. Alors que nous sommes déjà
trop tristes».
Le 1er janvier 2012 : «Je sais… je sais… j’ai appelé ainsi l’année 2003 et toutes celles qui l’ont
suivie. Sous nos cieux, toutes les années sont celles du dragon (‘aam elghoul).
Une manière de dire la fragilité d’un pays qui se cherche, un pays qui n’en
finit pas de se chercher et qui n’arrive pas à se retrouver. D’une société
émiettée et déstructurée qui n’arrive pas à réhabiliter ses valeurs originelles
tout en refusant de s’adapter au monde auquel elle est sensée appartenir.
Le grand évènement de
l’année 2012 aura été cet accident malheureux dont a été victime le Président
de la République le 13 octobre dernier. Malheureux pour ce qu’il a failli
causer – la mort du Président en exercice -, mais aussi pour ce qu’il a causé
de …dommages collatéraux.
L’accident, comme tout
accident du genre, nous a révélé quelques-uns de nos défauts les plus
prononcés. D’abord la propension au mensonge et la décrédibilisation de la
vérité. Ensuite la vacuité du discours politique qui se trouve réduit à son
expression la plus triviale. Enfin la méchanceté – parfois gratuite si ce n’est
pas souvent – des protagonistes.
L’accident a aussi
révélé que le pays pouvait fonctionner normalement malgré l’absence du chef
qu’on qualifiait d’absolu, que le système est assez consistant pour fonctionner
dans les pires des conditions et que la population n’est pas prête à suivre
tous les «appels d’air» qui se créent avec vocation d’aspirer le pays et de
l’entraîner au milieu d’un tourbillon.
Les ennemis du régime
auront tout essayé pendant cette épreuve, mais rien n’a été ébranlé. Quelles
leçons faut-il en tirer ?
Il faut adopter une
approche plus raisonnée, plus réfléchie, finalement plus politique pour
permettre à la Mauritanie d’affermir le processus démocratique et de renforcer
l’Etat de droit. Pas travailler continuellement et inlassablement pour
conquérir un pouvoir dont on ne saura pas quoi faire le jour où il vous échoit
entre les mains».
Retour sur les souhaits
en 2012 pour les renouveler, comme je l’ai fait en 2013, pour 2014 :
«Que 2014 soit pour nous la fin d’un
monde fait de paresses, d’injustices, d’inégalités, d’ignorance…
Que 2014 soit le début
véritable des refondations. Refondation mentale. Au niveau de l’Appareil de
l’Etat, au niveau des populations où l’on a besoin de recouvrer notre système
de valeurs, de retrouver nos réflexes de solidarité, de réactiver les soupapes
sociales de sécurité, d’ouvrir les vannes du partage, de reprendre le sourire
les uns face aux autres…
Refondation d’un Etat de droit avec le respect des institutions, des
lois et textes réglementaires. Une justice plus forte, plus impersonnelle pour
mettre fin à la règle de l’impunité. Une école plus performante pour former le
Mauritanien de demain (celui d’aujourd’hui est un peu perdu pour nous). Une
santé de proximité. Une administration plus soignée, plus efficace, plus
convaincante… Une classe politique plus exigeante pour elle-même, plus engagée,
plus claire dans ses engagements, plus forte dans ses choix… Un gouvernement
plus à l’écoute des gémissements, plus proche du peuple… Un débat plus serein…
Une économie plus dynamique… Une société plus créative…»