Dans
une lettre datée du 22 décembre adressée au ministre des pêches de Mauritanie,
le directeur général des affaires maritimes et des pêches de la Commission de
l’Union Européenne, a réitéré son «entière disponibilité à poursuivre la
négociation en vue du renouvellement (du) protocole (de pêche)».
C’est
la première correspondance depuis l’expiration, le 15 décembre, du Protocole
couvrant la période 2012-2014. Une expiration qui fait suite à l’échec des
négociations entre les deux parties. Le dernier round qui s’est déroulé à
Bruxelles en novembre dernier n’a pas permis d’aplanir les obstacles nés de la
divergence autour du niveau de la compensation. Pour les Européens, la somme de
47 millions devrait être le point de départ de la négociation, alors que pour
les Mauritaniens, il n’était pas question de descendre en-deçà des 67 millions
du dernier Protocole.
«Il
est tout particulièrement souhaitable qu’un point de convergence puisse être trouvé
sur les aspects financiers de cette négociation. Notre première offre faite à
la Mauritanie demeure ouverte à discussion», poursuit le responsable
européen. Tout en souhaitant «continuer à nous engager à vos côtés pour le
développement d’une pêche durable et appuyer les orientations stratégiques du
Gouvernement mauritanien». Allant jusqu’à noter «avec satisfaction que
votre initiative visant à renouveler la stratégie sectorielle des pêches
progresse de manière efficace en concertation avec les acteurs et partenaires
du secteur».
La
lettre remet sur le tapis la première proposition qui vise à prendre sur
l’enveloppe de la compensation pour gonfler le volet «appui sectoriel».
Si la compensation entre directement dans la trésorerie mauritanienne, l’argent
de l’appui sectoriel est sujet à d’innombrables tracasseries bureaucratiques. Ses
destinations et son décaissement restent soumis à l’assentiment préalable de la
partie européenne et aux procédures qu’elle impose.
C’est
ainsi que les Mauritaniens sont en droit de revendiquer six millions euros
inscrits au chapitre «appui sectoriel» au titre du Protocole qui vient
d’expirer. Alors que sur le Protocole précédent (2008-2012) l’apurement de
cette enveloppe doit coûter plusieurs millions à l’UE. C’est naturellement,
cette problématique qui doit dicter aux négociateurs mauritaniens leur
comportement en la matière. La Mauritanie ne devant accepter de discuter les
termes d’un nouveau Protocole que si le contentieux est entièrement apuré.
En
fait, la partie européenne se trouve doublement piégée à cause des hésitations de ses négociateurs. D’abord en voulant imposer son diktat à la Mauritanie, on
est passé par la remise en cause des procédures qui se limitaient à un échange
de lettres après la paraphe du Protocole pour permettre à la flotte européenne
de pêcher dans la zone mauritanienne. Conséquence : on en est venu à
négocier l’effectivité du Protocole qui commence désormais avec la ratification
par le Parlement, c’est-à-dire à la fin du processus. Deuxième conséquence :
même si le Protocole avait été signé en novembre, il aurait fallu attendre
plusieurs mois pour le voir ratifié par le Parlement, donc la date d’expiration
aurait été inchangée (15/12).
Le
deuxième piège est celui qui consiste à insister sur le gonflement de
l’enveloppe «appui sectoriel». Si une telle option est bénéfique pour la
Mauritanie, il va falloir solder les comptes des deux Protocoles précédents.
Sinon, on aura hypothéqué une enveloppe nécessaire à l’instauration d’un
commerce équitable entre les deux parties.
La
réponse du ministère mauritanien devra nécessairement comporter des éléments
opposables aux avances européennes qui continuent à faire fi – ou presque – de
l’intérêt de la Mauritanie en se donnant une marge de manœuvre considérable.
Il
est sûr que la démarche européenne ouvre la voie à la reprise de la
négociation. Le futur round devant se tenir à Nouakchott, il s’agira pour les
deux parties de chercher réellement des points de convergence, un terrain
d’entente qui ne lèsera en rien leurs intérêts.
Entre David et Goliath, les rapports ne sont pas
fatalement ceux qui se terminent par l’extermination de l’un ou l’autre des
protagonistes. La raison du plus fort n’est pas toujours la meilleure, surtout
quand on trouve le point d’équilibre qui tienne compte de l’intérêt de chacun.