Dans l’attente du Président de la République, la population
venue de partout de la région du Trarza attend à l’entrée est de Rosso. Dimanche
dernier, une foule importante se massait ici en attendant de voir passer le
Président. Un crieur faisait le va-et-vient, haranguant la foule en utilisant
tantôt un mégaphone. Pour dire n’importe quoi : appeler quelqu’un,
rappeler quelqu’un d’autre à l’ordre, dire du bien de tel ou tel…
Chaque fois que le Préfet (Hakem) de la ville s’approchait
pour faire de l’ordre, le crieur s’excitait de plus belle pour dire combien
étaient vains les ordres du Hakem. «Vous n’avez pas d’autorité ici, Monsieur
le Hakem, finit-il par dire. Personne ne vous obéit. Vous n’avez pas la
personnalité d’imposer votre ordre. Dégagez administrateurs, vous avez tout
perdu…»
Un mépris qui faisait rire l’assistance et contre lequel le
Hakem ne pouvait rien. Il faisait juste semblant de ne pas avoir entendu et
continuait à vouloir imposer un ordre de préséance à l’accueil du Président. Mais
le crieur avait raison : personne ne voulait obéir au Hakem qui acceptait
enfin sa défaite après plusieurs tentatives.
Aujourd’hui, c’est jour de fête à Mederdra. Tout tourne
autour du Hakem du département. Ici le préfet donne l’impression de se gausser
de tout et de chacun. Il a décidé de laisser faire, de laisser dire. Il est
écrasé par le «Wazir» qui prend un malin plaisir à lui dicter ses ordres
en public. «Al Wazir» s’occupe de tout : des inscriptions des gens
qui doivent être reçus, de ceux qui doivent être au-devant du Président, de l’alignement,
de tout, de tout… Même le Hakem finit par dire qu’«il faut attendre le
retour du Wazir», «est-ce que tu as vu al wazir ?»…
Deux situations qui sont deux manifestations de la
faiblesse de l’administration qui est prise entre deux hostilités de
comportement. D’une part, celui des citoyens qui ont perdu tout respect pour
les représentants de cette administration, et, d’autre part, des hauts responsables
qui affichent un grand mépris, comme pour se valoriser aux yeux de leurs
concitoyens. Ne nous étonnons donc point si l’administration est si mal vue. La
«conspiration nationale» écrase aussi cette administration qui perd peu
à peu les moyens moraux et psychologiques qui lui permettaient de mener à bien
sa mission.