Parce que je suis au Maroc depuis un certain temps. Parce que les soins et le coût du séjour sont plutôt lourds. J’ai dû me résoudre à chercher le moins cher pour résider. J’ai trouvé un petit hôtel, à la limite de tout. Juste confortable pour sécuriser ses affaires et être dans le centre-ville.
Ma première nuit, j’ai très mal dormi, à cause des bébés, des va-et-vient, des discussions à haute voie, des entretiens téléphoniques… Quand je suis sorti pour me plaindre, j’ai découvert que l’hôtel était peuplé de Mauritaniens. Tous cherchaient visiblement le moins cher comme moi. Mais j’ai été un peu surpris de voir qu’il y avait là des avocats de renoms, des personnalités tribales en vue, de grands marabouts, de hauts cadres de la République… JE me rendrai compte plus tard que ce qu’ils cherchent ici, ce n’est pas seulement l’économie, mais aussi la vie dans le désordre… c’est la possibilité de créer ce désordre-là, de ne pas être tenu de respecter des règles de vie humainement acceptables, c’est cela qui attire nos compatriotes dans cet hôtel. Et cela m’a rappelé une blague qu’n se racontait au début des années 80.
Un homme devait finir en enfer. Les anges lui présentaient chaque compartiment de l’enfer et lui expliquaient quelle torture s’y pratiquait. Dans chaque compartiment, une torture particulièrement douloureuse. Chaque compartiment portait un nom. Dans le dernier compartiment, on lui explique qu’ici s’exerce toutes les tortures déjà présentées. Ce compartiment s’appelle «Mauritanie».
A la fin du tour, notre homme devait choisir le compartiment – et donc la torture – qui lui convenait. Il choisit le compartiment …Mauritanie. Mais pourquoi ? «Parce que je suis sûr que ceux qui sont chargés de me travailler ici seront en retard, n’auront pas tous leurs instruments, perdront beaucoup de temps à discuter entre eux, s’accuseront mutuellement de m’avoir confié l’un à l’autre… je suis sûr de passer plus de temps à ne rien subir de mal…»