Il
faut dire que la mort – le départ plutôt – de Nelson Mandela a porté chance au
Président Hollande qui recevait à ce moment-là une bonne partie des dirigeants
africains dans la capitale française. Une chance bien saisie quand il a eu la
présence d’esprit de placer les travaux sous la présidence «symbolique»
de l’absent-présent, de celui qui a incarné une Afrique qui gagne et qui
inspire. Nelson Mandela est donc le président d’honneur de la rencontre des
chefs d’Etats venus à Paris essayer de relancer la coopération avec l’ancienne
métropole.
Oublions
le président égyptien, Mohamed Morsi qui devait initialement coprésider, aux côtés
de François Hollande le sommet. Il n’est plus président depuis le coup d’Etat
de juillet dernier. Une chance pour le Président français de pouvoir occulter
le souvenir de l’engagement pris pour le premier président élu «démocratiquement»
en Egypte. C’était au moment où les Occidentaux célébraient encore l’arrivée au
pouvoir de gouvernements islamistes élus dans la foulée des «printemps arabes»
et qu’ils les recevaient en grande pompe dans leurs palais de Paris, Berlin et
ailleurs. Aujourd’hui, ces présidents sont abandonnés à leur sort… mais
revenons au sommet, car le Président François Hollande n’a pas besoin de
chance, mais d’efficacité et de détermination.
Il
ne faut pas que le présent sommet soit une «variété» de ceux qui se
tiennent depuis quarante années. Il ne faut pas non plus qu’il soit une
tentative de combler les insuffisances de la politique intérieure du
gouvernement de gauche et de son président. Ce président qui descend dans tous les
sondages et qui trouve dans ses sorties à l’extérieur le moyen de renverser la
tendance.
Parce
qu’il répond à une exigence «morale» pour cette France qui a créé des
Etats pleins de contradictions meurtrières, qui a ensuite interféré dans leur
gestion en leur imposant des hommes qui lui sont dévoués, et dont les groupes d’influence
ont commencé à agir sans considération dans ces pays, créant des réseaux qui
ont fini par s’apparenter à des maffias, la France qui a laissé sévir des
dictateurs barbares, qui a fermé les yeux sur toutes les dérives pourvu que les
intérêts soient préservés, qui a imposé une idéologie autour de «pas de
démocratie sans développement, pas de développement sans démocratie» et qui
a vite oublié ce que cela insinuait… Cette France a besoin de se racheter aux
yeux des Africains face auxquels elle tente de dresser un mur pour empêcher l’immigration.
Ne
nous leurrons pas. Si la France a effectivement besoin de pousser nos pays à
avoir leurs propres forces d’intervention rapide, c’est bien pour éviter d’avoir
à intervenir comme elle l’a fait au Mali, comme elle le fait en Centrafrique. Les
deux interventions, somme toutes acceptables pour les raisons avancées
officiellement, apparaissent comme un réflexe d’un autre âge. Elles font
apparaitre la France comme «le Gendarme de l’Afrique», vieille posture
que les Socialistes ont toujours combattue… au moins tant qu’ils n’étaient pas
au pouvoir.
Ne
nous leurrons pas. Si l’on revient à une autre «sagesse» qui consiste à
dire : «Pas de développement sans sécurité, pas de sécurité sans
développement», c’est plutôt parce que la France, l’Europe en général, n’a
pas vu que l’Afrique change et qu’elle devient attractive pour tous les
concurrents du vieux continents et des vieilles puissances coloniales.
Le
ministre français des finances reconnait que le continent connait un taux
important de croissance (plus de 5%), que ses échanges ont doublé cette
dernière décennie atteignant 16% du mondial, que par sa «vigueur»
démographique, il est appelé à être l’un des plus grands marchés de
consommation dans les années à venir (avec 2 milliards d’individus en 2050).
Cette
Afrique dynamique et attractive intéresse déjà la Chine qui organise un sommet
chaque année : en 2012, elle a mobilisé 20 milliards dollars pour le
développement du continent. Même démarche chez le Japon qui a sa conférence
internationale sur le développement en Afrique (TICAD) et qui vient de
mobiliser 25 milliards dollars pour le même objectif. Ne parlons pas de l’Inde,
de la Turquie, du Brésil… Même nos cousins Arabes s’en mêlent avec notamment la
récente conférence du Koweït. Le plus important reste cependant cette volonté
américaine de s’ouvrir les espaces africains. Pour ce faire le Président Barack
Obama prépare une conférence en 2014 à Washington pour y réunir les chefs d’Etats
africains.
La
conférence de Paris est d’abord une tentative de rattraper le temps et les
occasions perdus.