C’est
un peu l’autre bout du monde ou si vous voulez une formule usitée, prête à
servir n’importe où l’on va dans le nord de la Mauritanie, c’est «le milieu
de nulle part». Vous ne savez jamais d’où vous arrivez en entrant à Choum.
Vous avez tellement attendu le moment d’y venir, que vous y entrez sans vous
rendre compte. Et comme toutes ses entrées se ressemblent, vous finissez par
oublier de quelle direction vous venez.
La
ville – m’enfin ! le village n’a pas changé. Ou presque pas. A peine on
essaye de se retrouver et on est déjà sur la place centrale, le marché, les
quelques boutiques qui proposent tout et rien. Et les hommes qui s’agglutinent
à cette heure de la journée autour de deux ou trois jeux de «dhamet», le
jeu de dames traditionnel de chez nous. De jeunes écolières rentrent de l’école
en s’amusant, «dans la joie et l’allégresse» comme dirait un reporter de
chez nous. La base de la SNIM qui donne vie à la localité. En fait, c’est
autour de la gare du train qui passe ici au moins deux fois venant de Zouératt
et deux fois revenant de Nouadhibou, c’est autour de cette gare que s’organise
la vie. Toute la vie : l’économie, le social, voire le politique…
Le
bruit du train m’interrompt. Une tranche de Modernité en plein désert. Des
techniciens supérieurs, parmi lesquels des ingénieurs bien formés et ayant un
grand sens de la responsabilité ont eu à gérer la «base de vie» de la
SNIM à Choum. Mais ils l’ont ait à la manière des explorateurs et autres
conquérants qui ne font qu’effleurer le monde qu’ils ont côtoyé.
Choum
voit passer toutes les heures, des camions poids-lourds transportant d’autres
poids-lourds en direction des environs, et surtout du Nord. On entend ici
parler d’une multitude de prospecteurs dans les environs. De toutes les
nationalités.
C’est,
sur une trentaine de kilomètres sur la route de Choum, que l’on voit une série
de tranchées creusées à partir des contreforts de l’Adrar vers l’ouest. On ne
sait pas qui fait ça, pourquoi il le fait et où les tranchées se dirigent. On a
comme l’impression que quelqu’un va installer des canalisations. Oudey el
Kebsh, Oum Ghreyd, ‘Aggi… tous ces lieux sont traversées par ces tranchées qui
obligent les usagers de la route à suivre une seule voie par moment…
On
parle encore ici de cet accident récent qui a coûté la vie à un géologue
mauritanien travaillant pour le compte d’un privé associé à des opérateurs
turcs. Leur voiture s’est renversée non loin de Choum à 16 heures par une
journée bien froide. Les secours ne sont arrivés qu’à 20 heures. C’est l’équipe
de la SNIM qui a découvert la voiture recherchée depuis l’après-midi par la
Gendarmerie avertie à partir de Nouakchott mais ayant reçu de fausse indication
sur l’emplacement. L’infirmier de la SNIM a prodigué les premiers soins en
attendant l’arrivée d’une équipe médicale de l’Armée et le transfert des
blessés graves par avion militaire le lendemain.
On
en parle encore pour dire la nécessité de construire la route Atar-Zouératt,
une route qui désenclaverait toute la région et qui contribuerait à
tranquilliser les dizaines d’étrangers venus chercher les minerais dans la
région. Une région qui est en ébullition…
Seulement,
cette hyperactivité dans la région, ne cache pas la misère des populations.
L’année a été dure ici. «Si la boutique Emel a allégé la souffrance des
habitants, ceux parmi eux qui ont du bétail n’ont pas eu de facilités pour
alimenter leur bétail pendant toute la saison passée…», nous raconte
l’habitant. Qui poursuit : «Ici, les gens semblent avoir l’habitude de
souffrir en silence. Le labeur d’antan et les expériences acquises au travers
des sécheresses du passé permettent aux populations de cacher leur dénuement,
mais la famine menace sérieusement ici».
Si
le futur de la région est celui qu’on espère avec toutes ces activités de
prospection, son présent est fait de maladies liées au froid et à la
malnutrition. Leur venir en aide eu plus vite.