Choisir
de signer un texte par un pseudonyme procède simplement d’une attitude de
lâcheté que peuvent expliquer l’absence de conviction (on ne croit pas à ce
qu’on va dire) et/ou de courage (on craint d’afficher ses convictions). Dans
les deux cas, il y a derrière, une couardise qui fait qu’on ne croit pas que ce
qu’on va dire mérite d’être dit ou d’être défendu. Alors on se cache.
Quand
on se cache derrière le pseudo, on croit pouvoir tout dire parce qu’on a l’impression
d’avoir bravé les censeurs. On se met donc dans la peau de celui qui peut, qui
fait, qui dit… juste le temps de caresser un clavier et d’appuyer sur un ou
deux boutons.
Mais
quelle valeur peut-on accorder à un texte signé par quelqu’un qui n’a pas le
courage d’assumer ce qu’il affirme ? En signant avec un pseudo, l’individu
révèle sa profonde nature d’affabulateur et de lâche. Deux «qualités»
cultivées continuellement par nos internautes (une grande spécialité
mauritanienne).
Au
début de la prolifération des commentaires anonymes sur les sites, il était
facile de comprendre que l’objectif n’était pas d’apporter une contribution à
un débat (lequel ?), mais d’insulter, d’exacerber les haines. Au milieu
des années 90, certains manipulateurs avaient trouvé une formule : en
choisissant de signer avec des noms à forte connotation ethnique, régionale ou
tribale, des noms qui donnaient une idée de l’origine de l’auteur. Pour
insulter sans discernement, vilipender, diffamer… Objectif : exciter le
sentiment de haine, faire en sorte qu’au sortir de la lecture on arrive à des
conclusions genre «cela ne peut être qu’untel, les untel sont…» ou
encore «ce pays est foutu, la démocratie et la liberté apportent le chao…».
C’est au fond une forme de résistance au progrès, de refus de laisser les
Mauritaniens se retrouver, de se parler les yeux dans les yeux et de panser certaines
de leurs plaies profondes.
Rien
ne se faisant par hasard, l’agressivité et la violence du ton des anonymes
participent à la culture de la haine qui, aux yeux de ses «souteneurs»,
peut mener à une confrontation dans le pays. L’attitude à exciter chez le
lecteur est celle de lui faire haïr «n’importe qui» et de le pousser à
voir en «n’importe qui» une source de malheur, une incarnation du Mal.
Tout est possible quand le but recherché est celui d’installer un climat
malsain, fait d’aigreur et de méchancetés.
Le
plus grave reste cependant, la décrédibilisation de la vérité en général, de
l’écrit en particulier. A force d’aligner les incohérences, les fausses
informations sur les uns et les autres, les insultes, les insanités…, on finit
toujours par faire mal à ce qui fait le fondement de la démocratie : la
liberté d’expression, le devoir de transparence et de vérité, l’exigence du
respect d’autrui.