C’était l’évènement, même pour certains d’entre nous. Regarder ce
genre d’exercice me permet de voir, encore une fois, où est-ce que nous en
sommes sous nos latitudes. En matière de capacités intellectuelles à pouvoir
défendre un projet, de connaissances sur le pays et sur les sujets de
gouvernance en général, de compétence en matière de prise de parole en public…
et de dire nous sommes à des années lumières du monde moderne…
Cela me permet aussi de comprendre les enjeux, les préoccupations
actuelles du monde dominant. Deux heures trente minutes de débats, parfois
passionnés, sans un mot sur le «printemps arabe» que la France de Sarkozy
déclare avoir accompagné (au moins en Libye et en Syrie). Si l’on a parlé de la
Mauritanie, c’est dans le cadre de l’échange sur le terrorisme au Sahel.
François Hollande a dit qu’il faut aider la Mauritanie et voir avec le Niger ce
qui peut être fait. Nicolas Sarkozy a déclaré qu’il faut attendre l’élection d’un
gouvernement légitime au Mali pour trouver des solutions définitives à la
question, et en passant, il s’est félicité du modèle sénégalais et noté qu’en
Mauritanie et au Niger «des élections parfaitement transparentes ont été
organisées»…
Rien sur la Libye ou la Syrie ou l’Iran ou la Palestine… Comme si
les deux candidats s’accordaient sur le fait de ne pas évoquer des sujets qui
peuvent faire dévier le débat. Ou comme s’ils étaient d’accord sur la politique
et l’approche mises en œuvre.
Sur l’appréciation des deux prestations, je retiendrai que j’avais
d’un côté un politique selon l’acception de chez nous : agressif, à la
limite de la vulgarité, prétentieux, ramenant tout à sa personne. D’un autre un
homme d’une certaine hauteur, essayant, malgré le manque de maitrise de
certains sujets, de présenter une vision globale de ce qu’il croit être les
enjeux majeurs de son programme, relativement habile, avec un sens de la
répartie qui ne lui fait pas oublier de rejeter les provocations et autres
appels à la confrontation violente…
D’un côté Nicolas Sarkozy a joué la victime, puis le rempart contre
les menaces qui pèsent sur l’identité de la France, sur son authenticité, sur
ses équilibres sociaux…
D’un autre François Hollande qui s’est présenté en rassembleur, en
homme de consensus et d’ouverture, en Président incarnant les valeurs
humanistes qui font l’exception française.
L’élite politique de chez nous a beaucoup à
apprendre de ce qui se passe ailleurs. nous ne le dirons jamais assez.