La désignation de Mohamed Ould Boilil, ancien ministre de l’intérieur,
à la tête de la nouvelle Assemblée nationale n’attend plus que la réunion de la
session extraordinaire de mercredi. Cette nomination/élection est le fruit d’une
longue gestation qui exprime elle-même le manque de consensus autour de la
question qui a dû être tranchée par le Président de la République. Reste à
savoir ce qu’on fera de l’allié de circonstance qu’a été le Président Messaoud
Ould Boulkheir.
Malgré toutes les dénégations de ses concurrents et toutes les
tentatives de le dépasser, Messaoud Ould Boulkheir a encore le charisme
nécessaire à paraître comme le leader incontestable de la cause haratine
anti-esclavagiste. Son parcours plaide en faveur de cet homme qui a joué un
rôle fondamental dans le refus de laisser les situations déraper. A chaque
summum de crise et de tension, Ould Boulkheir a été celui qui a refusé l’acte
ultime de rupture violente. Nonobstant toutes les accusations dont il a été l’objet.
Si l’on ajoute à cette image d’homme de consensus qu’il s’est voulu forger avec
plus ou moins de réussite, son expérience de président de l’Assemblée, on peut
dire que l’homme politique a joué et gagné sur bien des tableaux. Preuve son
score à la dernière présidentielle d’où il est sorti bon deuxième avec près de
19% des suffrages. On dira toujours que le score est celui du candidat du FNDD
(front pour la défense de la démocratie qui réunissait anciens PRDS, soutiens
du Président Sidi Ould Cheikh Abdallahi, nostalgiques de tous les régimes,
ennemis de Ould Abdel Aziz…). Mais le tour de force de Ould Boulkheir aura été
d’être le candidat de ceux qui l’ont diabolisé pendant longtemps, de l’élite
arabe issue de l’Appareil du régime qu’il a le plus combattu, de quelques
dignitaires (nouveaux et anciens)… Pour être bref, on consentira à Messaoud
Ould Boulkheir le statut d’icône incontournable et inévitable malgré le dernier
résultat de son parti aux élections législatives et municipales et malgré
surtout la montée en puissance de jeunes leaders qui veulent plus ou moins
ouvertement son éviction.
Le pouvoir actuel, tout comme la scène publique, a besoin de Ould
Boulkheir pour «équilibrer», «temporiser», «faciliter» (c’est
selon les interlocuteurs)… On dit qu’une grande Institution sera créée pour l’accueillir.
Ceux qui le disent parlent d’un super ministère d’Etat qui prendrait les prérogatives
et le rôle du Médiateur de la République, de celui du Commissaire aux Droits de
l’Homme, de celui du président du Conseil économique et social, organe vers
lequel seront transférées les agences de développement et d’insertion comme
Tadamoune. Une sorte de mégastructure dont le rôle sera de capter toutes les
problématiques des droits humains et de leur trouver solutions.
Si les tenants d’une telle thèse semblent sûrs de ce qu’ils disent,
ils évitent de répondre à la question de savoir si oui ou non Messaoud fera
alors partie de l’Exécutif. Auquel cas son parti APP ne rejoindra pas l’Institution
de l’Opposition Démocratique. On ne répond pas non plus à la question de savoir
comment faire avec la présidentielle dont l’échéance est toute proche. Est-ce
que Ould Boulkheir va se présenter ? Si oui, comment éviter d’être
comptable de ce que le pouvoir en place fait du moment que lui-même dirige une
Institution de l’Exécutif ?
Quoi qu’il en soit, l’énigme autour de ce que sera Messaoud Ould
Boulkheir dans les jours qui viennent, cette énigme cristallise de nombreuses
interrogations.