Certains partis de la Coordination de l’Opposition démocratique (COD) s’apprêtent
à commémorer le deuxième anniversaire de «l’éclatement de la révolution»
exigeant le départ du Président Mohamed Ould Abdel Aziz. Un peu à l’image de ce
que font Tunisiens chaque 14 janvier pour célébrer le départ de Ben Ali, et
Egyptiens le 25 janvier pour le départ de Moubarak…
En Mauritanie la campagne «dégage !» a été contreproductive pour
différentes raisons. La première raison est qu’elle a découlé d’un calcul qui
ne mettait pas en perspective le rapport de force existant. Loin de pouvoir
mobiliser la rue, les adeptes de cette position de refus de discuter avec un
régime qu’ils jugent désormais illégal, ceux-là ont vu la mobilisation s’effriter
de jour en jour : le premier meeting n’a rien à voir avec le dernier en
termes de présence et de virulence du discours.
La seconde raison est une méconnaissance certaine – sinon un mépris – des réalités
sociologiques mauritaniennes et le refus de comprendre que nous sommes encore,
et pour quelques temps, plutôt portés sur la recherche de la stabilité et de la
sécurité. Une réalité «sociologique» et culturelle, on va dire mentale, qui
domine en Mauritanie et qui empêche l’aventurisme. Quand en juin 2003, le
pouvoir le moins populaire de Mauritanie a été secoué par la tentative de
putsch et que le pouvoir est resté deux jours durant dans la rue, aucun
mouvement de foule n’est venu accompagner le mouvement de rébellion. Même les
plus caciques des opposants et des soutiens du pouvoir ont été incapables de
réaction. Tout comme quand le Président actuel avait été victime d’un accident
de tir, son opposition s’est contentée de se mettre en mode «veille» en attendant.
Avant de verser dans les rumeurs et la manipulation qui a fini par se retourner
contre elle.
La troisième raison est liée aux parcours et aux positionnements plutôt «intrigants»
des acteurs qui sont là, depuis toujours pour certains, depuis «assez» pour les
autres. Les plus récents parmi eux ont pris un coup de vieux à force d’adopter
les mêmes rapports au politique que leurs ainés. Quelles différences entre les
plus âgés de nos hommes politiques et les plus jeunes, entre ceux qui ont fait
l’école des groupuscules politiques (Nassériens, Kadihine, Baaths, Islamistes,
Nationalistes négro-africains, El Horr…) et ceux qui ont été moulés dans les
partis uniques au services de pouvoirs souvent corrompus et corrupteurs, il n’y
a pas grande différence dans les conceptions de l’exercice de la politique qui
reste un moyen utilisé pour prendre part au festin, celui du pillage de la
Nation.
Le peuple mauritanien l’a compris depuis longtemps, depuis que les carriéristes
des groupuscules ont commencé à envahir les bureaux de l’administration et à
changer de discours dès qu’ils y arrivent. D’où la désaffection du politique et
toutes les désillusions qui ont affecté ce vaillant peuple. Ce n’est pas la
société qui est malade d’incapacité mais ses élites qui n’arrivent pas à
imaginer un bel avenir pour elle.
En 1992, l’attitude de rejet et de refus de reconnaitre les résultats qui
dont donné Ould Taya gagnant aux présidentielles a marginalisé l’opposition. Son
entêtement a fini par l’amener à boycotter les législatives qui ont suivi. C’est
un peu ici qu’il faut situer le péché originel de notre opposition. Elle ne s’en
relèvera pas.