Ce
sera la revanche de Mahmoud Djibril, le premier Premier ministre de l’ère
post-Kadhafi qui s’est laissé démettre par les groupes révolutionnaires,
principalement ceux de tendance islamiste. Sa coalition, l’Alliance des forces
nationales (AFN), est en tête dans les résultats des premières élections libres
de Libye. Elections qui doivent désigner les 200 membres du «Congrès national
général», assemblée qui doit entre autres rédiger une Constitution nouvelle et
éviter le fédéralisme. Pour ce faire quelques 2,8 millions d’électeurs étaient
appelés à s’exprimer le 7 juillet.
Constat
satisfaisant : le taux de participation qui a dépassé 63%, indiquant ainsi
la volonté du peuple libyen de participer au jeu politique et à la démocratie. Le
scrutin s’est passé sans grands heurts, même si l’on a signalé des actes de
violence à Benghazi où des bureaux de vote ont été saccagés par les
autonomistes.
L’avance
des partis libéraux regroupés dans l’AFN sonne le glas des partis islamistes
dont le parti de la Justice et de la reconstruction des Frères Musulmans. C’est
donc la première défaite des FM à une élection faisant suite au «printemps
arabe». En effet le fait d’avoir gagné en Tunisie puis en Egypte, faisait
penser que les Islamistes seraient les grands gagnants de toutes les élections
dans le monde arabe qui connait un reflux des idéologie et un retour aux
sources qui profitent largement à une organisation dont le discours est resté
proche des populations.
En
fait de printemps, nous avons assisté à une saison «imprécise» qui a fait
souffler le chaud et le froid, mais dont l’atmosphère est restée lourde de
menaces d’orages et de tempêtes. On a été loin – on est encore loin, très loin
même – de la douceur d’un printemps normal.
Avec
la guerre civile en Libye, en Syrie, au Yémen… l’instabilité au Bahreïn, et
même en Egypte où les marques des nouvelles autorités restent à fixer, et en
Tunisie où les pressions conjuguées des salafistes et des ténors de l’ancien
régime troublent l’évolution.
Elle
est loin la «révolution arabe»… Loin de nous. Comme la première (celle qui a vu
l’identité se définir par rapport à l’Empire Ottoman) et la seconde (celle qui
a eu la bataille de l’indépendance et de l’unité comme moteur), la troisième
révolution semble avorter. Une fois de plus elle a été détournée. Et si elle a
effectivement servi à libérer certains peuples d’un joug qui n’a que trop duré,
elle n’a pas encore permis le recouvrement de la dignité et de l’autonomie complète
des peuples concernés.
C’est
à peine si elle n’a pas servi ce qu’on nous disait combattre jusqu’à présent. Elle
a permis une sorte de trêve avec Israël : la cause palestinienne est «oubliée»,
au moins temporairement, en tout cas elle n’occupe plus les esprits au moment
où Israël fait ce qu’il a toujours fait.
Elle
a permis la destruction des forces qui ont tenu tête jusqu’à présent à l’ordre
hégémonique de l’Occident en général. En effet, personne ne peut prévoir le
temps que prendra la reconstruction d’une Syrie viable après tant de
destructions.
Elle
a permis de dilapider tant de ressources financières provenant des richesses
des pays du Golf en vue de payer les services des Armées conquérantes de l’OTAN
et/ou d’armer les mercenaires et les groupes armés pour renverser tel ou tel
régime.
A
qui profite tout cela ?