Il
était une fois un mercredi 12 décembre 1984, le «12/12». Il s’est passé
quelque chose ce jour-là en Mauritanie. Voilà comment je vous le racontais le
12/12/2011 :
«Il y a 27 ans, le 12
décembre 1984, les Mauritaniens découvraient les nouveaux maîtres du pouvoir à
Nouakchott. Le nouveau CMSN (comité militaire de salut national) arrivait. Avec
les mêmes promesses de lendemains meilleurs : démocratie, bonne
gouvernance, refondation de l’Etat…
La «rectification» de ce jour-là mettait fin à quatre ans de
répressions continues et d’errements diplomatiques. Plusieurs milliers de
citoyens étaient en prison ou en exil. Ce qui expliquait en partie la ferveur
qui a accueilli le putsch.
Encore une fois, les officiers composant le CMSN avaient choisi celui
qu’ils croyaient le plus faible, le plus malléable d’entre eux, et, toujours
selon eux, le moins «marqué politiquement et socialement».
Moawiya Ould Sid’Ahmed Taya aura raison de ses compagnons qu’il écartera,
puis de ses ennemis qu’il éliminera un à un, jusqu’à fonder un pouvoir qui
durera 21 ans. Plus que le fondateur du pays Mokhtar Ould Daddah (18 ans).
21 ans… assez pour marquer profondément le pays et pour asseoir les
fondements d’une culture nouvelle : celle qui marquera deux décennies et
dont nous vivrons, encore quelques temps, les effets. L’important n’est pas de
juger présentement cette période, surtout si cela avait été fait en son temps.
L’important c’est d’en tirer quelques leçons.
Au lendemain du discours de Kiffa (printemps 2004), nous écrivions :
«Ould Taya a parlé de la lutte contre la gabegie. Terme qu’il n’a pas utilisé
depuis près de 20 ans. Mais quand il parle aujourd’hui de gabegie au sein de
l’administration, le Président Ould Taya semble oublier qu’après 20 ans passées
à la tête du pays, cette administration décriée est la sienne, que le pays
actuel a été façonné à partir de la vision qu’il en a et qu’il est finalement
responsable et comptable de la situation actuelle. Nonobstant le jugement qu’on
peut porter sur cette époque, les excuses qu’on peut trouver à tel ou tel
manquement, les explications qu’on peut avancer, une chose reste : Moawiya
Ould Sid’Ahmed Taya est l’unique responsable du choix des hommes. La guerre aux
compétences et la promotion de la médiocrité relèvent de sa responsabilité.
Toute révolution sur soi commence donc par inverser cette loi.» (La Tribune
N°237 du 12-19 décembre 2004).
Cette révolution n’aura pas lieu. Ould Taya en payera le prix. Par son
départ. Par la non reconnaissance de son apport (s’il en a eu).
Et s’il n’y avait pas eu le 12/12 ? Je crois qu’on aurait bien vu cet
anniversaire remplacer celui de l’indépendance (28/11). Comme on avait entendu
certains de nos éminents «intellectuels» chanter, faire la promotion d’idées
idiotes, en contrepartie voler, exclure leurs protagonistes, détourner les
moyens de l’Etat…
La grande leçon de tout cela aurait été le danger pour tout pouvoir de
continuer à recruter parmi les moins outillés, les moins performants, de
continuer à cultiver la médiocrité, la flagornerie, l’égoïsme, l’indignité et
l’indélicatesse…
Parce que les anciens serviteurs du régime du 12/12 l’ont oublié,
servons-nous en pour méditer.»