dimanche 31 mars 2013

Le Président Hollande se trompe


Dans une récente sortie, le Président français, François Hollande s’est dit satisfait de la guerre menée au Mali. Il considère qu’il avait «atteint ses objectifs» parce qu’il avait pu «arrêter l’offensive terroriste», «reconquérir les villes occupées par les terroristes» et aller dans «le réduit des terroristes, dans leur sanctuaire». Le Président Hollande qui est au plus bas dans les sondages, en profite pour dire que «la France a été regardée comme le pays de la délivrance» et que «chaque Français doit en être fier et les soldats français doivent en être remerciés».
Dans cette partie du propos, le Président Hollande se trompe énormément. La guerre des terroristes, celle qu’ils affectionnent et qu’ils savent mener, vient de commencer. Avec les kamikazes, les terrains minés, les attaques surprises… Ils sont désormais ici et nulle part. Ils frappent quand ils veulent et où ils veulent. S’ils arrivent à maintenir le rythme des attaques actuelles encore quatre semaines, on commencera alors à parler d’enlisement. Ce n’est pas parce que les soldats français ne tombent pas en nombre qu’il faille parler d’une réussite militaire. Les Maliens et les Tchadiens meurent en nombre eux. Les civils aussi.
Pour ce qui est de la fierté «légitime» des Français, elle devrait être tempérée par ce qui se passe sur le terrain en matière d’exactions, de répressions et de règlements de compte sauvages. Assassinats, enlèvements, tortures, expropriations, chasse à l’homme…, les forces maliennes avec lesquelles l’Armée française partage tout, sont coupables du pire en terme de représailles et de punitions collectives. Que dire des dizaines de victimes civiles innocentes maltraitées, dépossédées, parfois exécutées sans discernement sous le couvert de la reconquête du Nord ? L’Armée française est la première à savoir, à voir directement parfois s’exercer l’arbitraire contre des populations isolées (Peulhs, Touaregs, arabes, Songhaïs). Qu’a-t-elle fait pour arrêter cela ?
Sur le calendrier des opérations, le Président François Hollande a promis que le processus de retrait commencera en avril et qu’en juillet, il n’y aura plus «que 2000 soldats français au Mali dans le cadre sans doute d’une opération de maintien de la paix de l’ONU». Que faire de l’exigence onusienne d’avoir des forces parallèles à celles destinées au maintien de la paix, des forces qui auront vocation de continuer la guerre aux groupes terroristes ? Le secrétaire général de l’ONU a bien dit la semaine dernière que les forces qui seront mobilisées dans le cadre d’une mission des casques-bleus, seront assistées par d’autres qui auront pour mission de faire la guerre. Le Président Hollande a fait semblant d’ignorer cela.
Son envolée l’a amené à se dire «intraitable» sur la question de l’élection présidentielle en juillet prochain. Et de demander «deuxièmement» un «dialogue avec toutes les composantes de la société malienne». On doit en comprendre que la France tient d’abord à l’organisation d’une élection présidentielle qui permettra de légitimer le pouvoir qui en sortira à Bamako. Mais lequel des Mali va choisir «son» Président ? celui qui est sur la route de l’exil ou celui qui est terrorisé par les perspectives ouvertes depuis l’effondrement de l’Etat malien ? Qui est, au sein de la classe politique malienne actuelle, apte à diriger en temps pareils ? où est le charisme nécessaire à cela ? Et, grande question, à quoi sert une légitimation par les urnes si le Mali dont doit hériter le futur pouvoir est exsangue, atomisé et occupé ?
Ce dont le Mali a besoin aujourd’hui, c’est d’abord de se retrouver et de renouer les liens entre les différentes communautés, d’imposer un dialogue à toutes les composantes du paysage politique et social et de les amener à imaginer une porte de sortie qui pourrait assurer la reconstruction de l’Etat et la restauration (réhabilitation) de la démocratie. L’élaboration d’une vision d’ensemble dont l’objectif premier est la réconciliation nationale et la création de refondations assurant un avenir commun, sur la base de la recherche de compromis possibles…, il n’y a que ça pour assurer un avenir viable et stable au Mali. Et certainement pas les affirmations d’un Président français en proie à de nombreuses difficultés et qui veut atténuer la désaffection de son opinion publique en imposant sa volonté à des peuples certes pauvres mais libres quand même de concevoir par eux-mêmes ce qu’il leur faut…