Au
début était la volonté politique et l’ambition personnelle du Président de la
République de réformer l’Union pour la République, un parti au pouvoir qui a
fini par devenir un poids difficile à porter.
Il
y eut d’abord la création de la commission chargée d’évaluer la situation du
parti et de proposer un plan de redynamisation pour permettre d’une part de
normaliser la situation des instances dirigeantes et d’autre part préparer les
élections futures en donnant au parti toutes les chances de réussir l’épreuve.
Egoïsmes
puissants
La
composition de la Commission a d’abord été expliquée par la volonté de puiser
chez les cadres les moins engagés dans les querelles intestines, dans la
jeunesse et dans la proximité du Président de la République. Une explication
qui a sauté dès les premières manœuvres. Il s’est avéré en effet qu’au sein de
la Commission ad hoc, allaient s’exprimer les ambitions les plus folles et les
querelles les plus élémentaires.
Il
suffit de remarquer qu’au sein de la Commission siègent trois chefs de factions
de la Wilaya du Brakna : Moktar Ould Diaye, Diallo Mamadou Bathia et
Mohamed Ould Sweydatt. Il suffisait ensuite de s’attarder sur la fougue du
jeune Ould Diaye pour savoir qu’il allait immédiatement tenter de faire main
basse sur le parti en donnant à la réforme le sens qu’il voudra.
Le
ministre de l’économie et des finances tient effectivement les rênes
financières et administratives qui lui permettent de mobiliser, de
s’approprier, d’accaparer le processus ici et là. Il est le seul à pouvoir
recruter, obtenir des émoluments pour celui-là, nommer celui-ci à un poste, à
accorder des faveurs… toutes les administrations du pays ayant perdu leur
autonomie dans la gestion quotidienne au profit du ministre de l’économie et
des finances. Tout ce qui sort de ses «compétences» revient au Premier ministre
qui en use allègrement pour servir aussi ses desseins politiques.
Le
territoire national a été, ces dernières semaines le théâtre des affrontements
entre les responsables de la haute administration : le Premier ministre,
les ministres (économie, hydraulique, énergie, défense, équipements…), du
Directeur général de la Sûreté, du Chef du contre-espionnage… Comme si ces
responsables n’avaient d’autre souci que celui de s’assurer un maximum d’unités
UPR dans ce qu’ils considèrent être leurs fiefs.
Pourtant,
l’objectif de cette implantation n’a jamais été de savoir le poids de
l’enracinement de quelques hommes qui n’existent que par leurs fonctions
actuelles.
Etat
des lieux alarmant
Quand
le Président Mohamed Ould Abdel Aziz est descendu dans l’arène pour donner un
coup de main à la Commission qu’il avait nommée et à laquelle il avait confié
l’évaluation et la redynamisation de l’Union pour la République, il avait été
clair dans les objectifs fixés. Le parti revenait de loin.
Fondé
le 5 mai 2009, au milieu de la crise politique ayant déchiré le pays à la suite
du coup d’Etat du 6 août 2008, l’Union pour la République a été conçu pour être
l’un des pôles impliqués dans le dialogue de Dakar qui devait aboutir à un
accord politique entre ce pôle et les deux autres : celui du Front
national pour la démocratie et l’unité (FNDD) et celui du Rassemblement des
forces démocratiques (RFD). Accord politique aboutissant à la mise en place
d’un gouvernement d’union nationale chargé de superviser une élection
présidentielle et donc de gérer une courte période de transition.
Le
4 août 2009, le parti tenait son congrès devant lequel, le Président Mohamed
Ould Abdel Aziz, fraichement élu, annonçait solennellement sa démission comme
le stipule la Constitution. Et en juillet 2010, le Congrès ordinaire de l’UPR
se tenait. C’est ce congrès qui permit l’élection des instances du parti,
notamment de son premier président Mohamed Mahmoud Ould Mohamed Lemine. Premier
et… dernier congrès «ordinaire» d’un parti qui ne cessera de remettre à plus
tard ses rendez-vous. Vont se succéder des réunions du Conseil national
transformées pour le besoin en congrès extraordinaire.
Le
congrès extraordinaire du 5 mars 2014 permet la désignation de Isselkou Ould
Ahmed Izidbih à la tête du parti. Puis celui du 6 septembre de la même année
qui ouvre la voie à Me Sidi Mohamed Ould Maham. Trois présidents dont un seul
est issu d’un processus «ordinaire». Plusieurs tentatives de «normalisation»
sans résultat. Entre la défiance du Président vis-à-vis du parti et
l’indiscipline voire l’hostilité du gouvernement à son égard, l’UPR est
incapable de jouer le rôle de locomotive politique lors des grands rendez-vous
comme le référendum du 5 août 2017. C’est le gouvernement qui lui ravit la
vedette à la suite du camouflet qu’on sait.
Pour
ratisser large, la Commission lance des journées de réflexion ouvertes par le
Président de la République qui fixe les termes de référence de l’opération. Sur
la situation, tout le monde est d’accord pour dire que le parti est un corps
malade. Sur la redynamisation, deux axes sont prioritaires : celui du
discours politique et celui du renouvellement des instances pour leur donner la
légitimité nécessaire. Bien sûr un atelier sera consacré au financement du
parti, un autre au fonctionnement…
Recherche
Redynamisation désespérément
Le
temps pressait parce qu’il fallait tout finir dans les délais permettant de
bien préparer les échéances électorales futures. C’est naturellement le
processus d’implantation qui s’enclenche immédiatement parce que le parti
l’avait envisagé en 2016 et, pour ce faire, avait déployé les outils techniques
nécessaires.
Les
deux premières phases de l’implantation viennent de se terminer et à chacune de
mauvaises surprises attendaient.
A
la phase adhésion, l’UPR a dû faire face à une affluence qui a donné un
résultat inattendu : la barre du million d’adhérents est dépassée alors
qu’on attendait 300.000. Cette affluence allait aussi «actualiser» d’anciennes
querelles tribales savamment manipulées par les marionnettistes qui opèrent
depuis les bureaux de la haute administration à Nouakchott.
Mais
c’est la phase de l’implantation des structures de base (unités) qui allait radicaliser
les hostilités. Les deux phases apparaissant comme une primaire au sein de
l’UPR. C’est que le discours entretenu par le ministre Ould Diaye sur les
réseaux sociaux, affirmait que tous les choix qui seront faits le seront
désormais en fonction de «la représentativité effective» de chacun sur le
terrain. Dans une atmosphère délétère caractérisée par la possibilité de
s’affronter «sans oublier qu’on appartient au même parti». Affrontez-vous,
rappelez-vous après que vous êtes de la même formation politique…
Les
divergences n’ayant pas de fondement «intelligent» - ce n’est pas la différence
dans les points de vue, ni dans les orientations politiques, ni dans les choix
économiques, ni dans la vision des problématiques sociales et de leurs
solutions -, ce sont les ressentiments personnels et donc les égos qui les
nourrissent.
Le
discours politique ? Personne n’en parle. Le programme pour les futures
élections ? Personne n’en parle non plus. Ce sont les guerres de
positionnement qui l’emportent et qui occupent. Si bien qu’on peut conclure à
un échec de l’entreprise d’assainissement engagée il y a quelques mois.
Même
le déroulement des opérations d’implantation ne satisfait personne. Du coup, la
légitimité voulue au début par la volonté affichée de transparence, est
altérée.
Le
cafouillage occasionné par les querelles de factions empêche de voir clair dans
le poids électoral des acteurs. A quelques mois des premières échéances, l’UPR
risque fort de faire le pire des choix. Et d’en récolter les conséquences.
Lors
de sa réunion de samedi dernier (26/5), la Commission ad hoc a décidé de
reprendre les opérations de désignation des structures seulement au niveau de
Nouakchott et Nouadhibou, de laisser l’intérieur jusqu’au 20 juin. Elle aurait
aussi décidé de commencer tout de suite à faire ses choix pour les candidatures
aux élections. Selon certains de ses membres, cela permettrait de vider
immédiatement les querelles et de savoir qui est effectivement avec le parti
quelque soient ses choix.
Dans
quelques jours donc, l’UPR sera obligé de finir ce qu’il a commencé. Il gagnera
au moins le pari d’avoir organisé un Congrès ordinaire. S’il y arrive.
Ould
Oumeir
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire