Il
a marqué les esprits dans le microcosme de l’Iguidi, cette entité culturelle et
civilisationnelle plutôt que géographique. En arrivant de sa Eddakhla (baie de
Nouadhibou) natale dans un milieu difficile à conquérir, Sidi Ould Mahfoud
avait déjà fait l’expérience de plusieurs cercles administratifs de Mauritanie.
On l’imagine, jeune Garde Républicain, débarquant dans le petit bourg de
Mederdra du début des années 50, avec ses rêves de guerrier ayant voué sa vie
au métier des armes, avec sa candeur, son sens de l’observation, de la
solidarité, de l’abnégation… Des valeurs qui font l’homme des contrées
désertiques hostiles.
Après
la Garde Républicaine, il regagne la Gendarmerie au moment de sa création en
1965 et porte le matricule 048 de ce prestigieux corps qui allie rigueur,
compétence, sens du droit, le sens aussi de la proximité des populations et de
leur satisfaction.
Sidi
Ould Mahfoud appartient à une classe de la Gendarmerie qui savait dresser les
P-V dans les pures formes de l’art qui faisait la classe des Gendarmes, une
classe de gendarmes pour lesquels «l’armoire-type» qui résume toutes les
procédures n’a pas de secret. Ils sont Officiers de police judiciaire, ce qui
leur donne des compétences en droit – grande spécificité du gendarme – et Autorité
administration et policière. Ils sont des GENDARMES, ce qui les auréole
d’une prestance, d’un respect finalement mérité. Ils sont l’incarnation de l’Autorité
de l’Etat en ces moments où cette entité était en construction et où elle avait
besoin de courage dans l’application des textes, d’intelligence dans l’exercice
quotidien, de rigueur dans les rapports avec la société.
Aux
valeurs de son milieu, il ajoutera celles du Corps de la Gendarmerie, lui qui
croyait profondément à l’Etat. Les amis de Beddah (Habib), ce
fils prodige, se souviennent de celui qui a été un père attentionné pour tous. Les
enfants que nous étions ne décelaient pas de différence entre ce qu’il leur
réservait comme traitement et ce qu’il réservait à ce fils unique (à l’époque).
Aucun de nous ne peut se souvenir aujourd’hui d’un moment d’indisposition
exprimée à l’encontre d’une bande de jeunes aussi insouciants, aussi rebelles
que nous à cette époque-là. Jamais de remontrance, jamais d’impatientes
postures pour nous dire que «ce n’est pas le moment de crier, de s’amuser,
de faire du bruit».
Dans
les années 70, le MDLC (Maréchal de Logis Chef) qu’il devint, fut affecté à
Mederdra. On le voyait passer de la brigade à sa maison comme s’il s’agissait d’un
fils de la ville et de la culture locale très particulière. Il était déjà l’homme
des gens de l’Iguidi (raajil Ehl Iguidi), celui qui avait imposé aux
habitants de l’adopter sans manière.
Il
eut ici Tislim et Habib, tous deux aujourd’hui disparus. La retraite,
le retour au bercail et la nouvelle famille pour lui donner Mghayli et Atiq
qui nous restent de cet homme de grande envergure.
Il
part sans déranger, comme il a vécu les 90 ans (environ) d’une vie pleine d’enseignements,
de don de soi à la communauté, de vérité, de dignité, de grandeur… Sidi Ould
Mahfoud a vécu ce que vivent les croyants sincères, les élus parmi eux, une vie
pleine faite d’abnégation, de valeurs humanistes qui font cet ancrage dans le
substrat culturel originel.
Que
tous ceux qui l’ont connu, que les gens de partout, de Nouadhibou, de Mederdra
et d’ailleurs, que Mghayli (la grande), que Khadijetou, que Maghayli (la
petite), que Atiq, que Toutou, Bodde, Kelthame (filles de Habib), que Moumme,
Mana, Mint Balla (ses petites-filles par Tislim), que tous agréent ici l’expression
de nos condoléances les plus attristées.
Inna liLlahi wa inna ilayhi raji’oune.
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