Si
l’on compte la guerre Iran-Irak (1980-88) qui a fait entre 500.000 et 1.200.000
victimes, la guerre du Koweït (1990-91) qui a vu une coalition de 34 pays se
liguer pour bouter les forces irakiennes hors du Koweït et la guerre contre
l’Irak menée par les Etats-Unis et le Royaume Uni en avril 2003 et qui n’en
finit pas de ne pas finir, on peut considérer que la guerre menée au Yémen par
une coalition de pays arabes est la quatrième guerre du Golfe. Elle n’est en
fait que le prolongement des guerres américaines, par pays arabes interposés.
Mais
cette guerre risque de radicaliser les positionnements et les clivages dans la
région. Elle sonne le glas des systèmes dirigeants jusqu’à présent les
monarchies de cette région riche en ressources naturelles. Elle est déjà une
matérialisation des clivages confessionnelles entre Sunnites et Chiites dans la
région. Un affrontement voulu depuis longtemps par Israël et ses alliés
américains. Mais au-delà des raisons invoquées ici et là, au-delà des analyses,
il y a une situation contradictoire à relever immédiatement.
En
Irak, les Américains apportent leur soutien militaire et politique aux forces
régulières appuyées par les milices chiites contre l’Etat Islamique qui a fait
main basse sur une grande partie du territoire irakien. Au Yémen, la coalition
et ses alliés américains, combattent des milices, chiites pour l’essentiel, qui
se battent contre les groupes sunnites jihadistes comme Al Qaeda et Da’esh.
Comment expliquer cette contradiction ?
En
fait dans le jeu des puissances régionales, chaque cas est considéré à part,
quitte à l’intégrer plus tard dans une stratégie globale visant à affaiblir tel
ou tel camp. Dans le cas du Yémen, l’Iran est le premier visé. Il s’agit
d’affaiblir ce pays au moment où il entame le dernier round des négociations
avec l’Occident à propos de ses projets nucléaires. Lui créer un foyer de
tension au Yémen, c’est le divertir un peu afin de le déséquilibrer.
Si
le dessein américain est réalisé, on peut entrevoir une nouvelle Fitna qui
opposerait Chiites et Sunnites cette fois-ci dans une guerre qui sera longue et
destructrice pour tous. Autour de l’Arabie Saoudite, se constitue déjà une
coalition de pays sunnites et en face, il faut s’attendre à un front chiite
dirigé nécessairement par l’Iran. Pour aboutir à une situation où le bourreau
et la victime font la profession de foi qui fait de nous des Musulmans :
laa ilaaha illa Allah, Muhammad rassoul Allah (il n’y a de Dieu qu’Allah,
Mohammad est l’Envoyé d’Allah). Qui doit en supporter les conséquences ?
qui en portera la responsabilité ?
Quelques
jours de bombardements contre le Yémen, des dizaines de victimes civils, des
destructions, des avions abattus… qui y gagne ? Pas les peuples dont les
forces sont engagées en tout cas. Pas les Arabes, pas les Musulmans.
J’ai
demandé à un faqih de chez nous, quelle position prendre face à cette
guerre ? Il m’a dit que du temps des premières conquêtes musulmanes, un
naçrani, voyant que l’un des compagnons avait déjà son épée dirigée vers sa
tête, prononça la profession de foi des Musulmans : «laa ilaaha illa
Allah, Muhammad rassoul Allah». Et le Prophète d’intimer l’ordre à son
disciple de s’abstenir de faire du mal à cet homme qui vient de faire cette
profession de foi. Le compagnon de protester : «Il le dit pour être
épargné, ce n’est vrai en lui…» Le Prophète (PSL) de répliquer : «as-tu
cherché dans son âme pour savoir s’il s’agit d’un acte sincère ?»,
d’expliquer ensuite combien la profession de foi protégeait son auteur, combien
il était grave pour un Musulman de s’en prendre à un autre Musulman, combien il
était dangereux pour le croyant de décider de tuer…
Le
Faqih devait conclure, sans doute en interpellant le journaliste : «il
faut s’abstenir de participer à l’assassinat d’un Musulman, même par un mot justificatif
ou provocateur, sinon c’est le châtiment divin éternel qui vous poursuivra…»
Il
est clair que le contrôle de Bab-al-Mandab est l’élément moteur de cette
guerre, que le leadership dans la région en est l’enjeu principal, que le monde
arabe en est la victime, qu’Israël en est le bénéficiaire… Alors ?
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