La
première soirée du festival de Walata a été un flop. De tous les points de vue.
La pauvreté du contenu l’a disputé à la mauvaise organisation des prestations.
«Le
seul poème digne de ce nom est celui qui a été déclamé en langue indienne…» :
au moins on ne pouvait se prononcer ni sur la portée de son sens, ni sur la
régularité de sa métrique. Autant dire que le ministère de la culture ne semble
pas avoir fait attention au contenu qui devait être présenté dans une soirée à
laquelle assistait le Président de la République et qui devait donner le la d’une
rencontre alliant fête et intellect.
Les
présentateurs se comportaient comme s’il s’agissait de l’une de ces cérémonies
mondaines où l’objectif est d’abord de glorifier quelques individus du Mesrah.
Sans respect et sans avoir assimilé la succession des évènements. «On
avait l’impression à chaque fois que la troupe qui se produit est en train de
finir sa prestation», me confie un officiel.
Pourtant
ce n’est pas la matière qui manque. Nous sommes dans une ville qui mérite amplement
sa notoriété d’antan. Walata respire l’Histoire.
La
vieille cité rouge s’étend au flanc de la montagne et domine une vallée (bat’ha)
où les tentes ont été dressées pour accueillir les 220 touristes invités pour
faire la promotion d’une région désertée pour des questions de sécurité. Il s’agit
pour l’Officie national de tourisme et le ministère de briser le blocus né du
classement de toutes ces régions dans la «zone rouge» interdite aux
ressortissants occidentaux particulièrement français. La réussite évidente
(probablement la seule) des autorités est bien celle-là…
Chaque
maison est une histoire à elle-même, chaque espace raconte un passé florissant,
chaque nom évoque une grandeur qu’on sent dans les ruelles et à l’intérieur des
maisons. Walata est une civilisation à part. Avec une organisation de l’espace
qui n’existe nulle part ailleurs en Mauritanie. Ici on a eu la notion «d’espace
public»… Rahbit Kdennou est le souvenir vivant d’un âge où la
science et le savoir étaient dispensés gratuitement par des maîtres dont le
souci est d’abord de laisser une partie de cette richesse derrière eux, après
eux. Interpellant un jour un artisan qui s’activait à peindre les façades
environnantes, Shaykhna Mohamdi, l’un des illustres érudits qui prenaient
complètement en charge ses étudiants venus de tous horizons, a dit : «Sais-tu
que ce que tu fais et ce que je fais mènent directement au Paradis. Pour la
ferveur qu’on y met, pour l’utilité qu’ils offrent pour les autres et pour le
détachement qui nous inspire… ?» La valeur du travail bien accompli.
Walata,
c’est aussi une gastronomie bien originale avec ses boissons (deghnou, senguetti…),
ses plats (el moune, deydey…). Et c’est enfin une façon de vivre et de s’intégrer.
Le
festival aurait pu être le plus grand des rendez-vous des villes anciennes. Il aura
été le moins organisé et le moins riche.
Malgré
la présence de quelques sociétés de nettoyage, les carcasses d’animaux morts
gênaient la circulation dans la vieille ville et autour des mausolées très
visités des Chérifs et Erudits des alentours. Aucun déploiement de guides comme
ce fut le cas à Wadane il y a deux ans. Aucune mobilisation ou sensibilisation des
populations pour les préparer à l’évènement dont ils devaient profiter. Pas d’efforts
particuliers pour maitriser le déroulement des évènements culturels qui sont
restés pauvres, très pauvres.
Pour
le ministère de la culture, on peut parler d’un ratage monumental. Et c’est
dommage parce que l’objectif est noble et Walata était prédisposée à être la
plus belle des conclusions du cycle de la célébration des villes anciennes. A-t-on
constitué une commission pour sélectionner les troupes et définir la
programmation et le contenu ? Rien ne le laisse croire.
Le
festival aura été une fête mondaine qui ne traduisait même pas la diversité culturelle
de la Mauritanie, encore moins la créativité des jeunes auteurs et la
profondeur du patrimoine. La fête a été juste un survol qui a permis d’effleurer,
sans le dépoussiérer, un passé riche.
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