Il y a lieu de féliciter Biram Ould Dah Ould Abeidi pour le prix qu’il
vient de recevoir. C’est la première grande distinction que reçoit un
compatriote.
Quoi qu’on dise ou qu’on pense de l’homme, de la cause qu’il
défend, de la méthode choisie pour déranger l’ordre établi et finalement de la
justesse du choix, il y a une vérité qui est là : même s’il n’est pas le
premier à militer, même s’il est l’objet de multiples controverses dans son
pays, Birame Ould Abdeidi a pu, en quelques années, devenir le symbole de la
lutte contre l’esclavage. A l’extérieur et à l’intérieur. Le prix vient
couronner cette stature de «combattant libérateur».
A ses détracteurs, je vais dédier cette histoire : on raconte
que quelque tribu maraboutique du Sud mauritanien fut terrorisée par les
apparitions intempestives d’un lion. Même si le lion n’avait pas encore commis
de dégâts, tous convinrent de faire appel au premier guerrier de passage pour
lui demander de le tuer.
Un guerrier de deuxième catégorie se présenta un jour. La Jemaa
tribale lui proposa quelques chamelles et vaches de traite, deux bonnes
montures et quelques tissus fraichement arrivés de Ndar, le tout contre la chasse
au lion qui menace. Très fier d’avoir été sollicité et de venir ainsi au
secours d’une tribu maraboutique, notre homme accepta. On lui indiqua la mare
où le lion s’abreuvait chaque jour en milieu de journée. Il y alla pour s’installer
en haut de l’arbre le plus imposant. Peu de temps après, le lion se présenta,
but un coup et se dirigea vers l’arbre. Mais la peur prit notre homme qui, à
force de tremblements, laissa tomber son fusil. Au moment où le fauve tournait
sa tête vers le haut après avoir senti la présence. La bandoulière s’accrocha
au cou du lion qui, pris de panique, disparut rapidement emportant avec lui le
fusil. Notre héros revint bien après au campement et quand on lui demanda s’il
avait tué le lion, il répondit : «le problème c’est qu’il est
maintenant armé».
A ceux qui ont toujours cru pouvoir «écraser» par la méthode
forte Birame Ould Dah Ould Abdeidi, il faut dire peut-être qu’il est désormais
paré d’un prix international qui l’auréole pour le distinguer de ses autres
compatriotes.
Aux amis, sympathisants et compagnons de Birame Ould Abdeidi, il va
falloir poser la question de savoir comment ce prix peut être celui d’une cause
à travers un homme. Comment le capitaliser pour faire avancer le combat
anti-esclavagiste en Mauritanie ? Comment en faire une étape de la lutte
et non son couronnement ?
L’urgence étant de «normaliser» les méthodes de lutte contre
l’esclavage pour y faire adhérer le maximum de Mauritaniens qui sont souvent
victimes de mauvaises interprétations. Amener nos compatriotes à concevoir
cette distinction, non pas comme une mise au ban ou une stigmatisation, mais
comme une prime à la volonté de faire changer les choses. C’est l’enjeu de l’après-prix.
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