vendredi 13 décembre 2013

Pour une cause ou pour un homme ?

Il y a lieu de féliciter Biram Ould Dah Ould Abeidi pour le prix qu’il vient de recevoir. C’est la première grande distinction que reçoit un compatriote.
Quoi qu’on dise ou qu’on pense de l’homme, de la cause qu’il défend, de la méthode choisie pour déranger l’ordre établi et finalement de la justesse du choix, il y a une vérité qui est là : même s’il n’est pas le premier à militer, même s’il est l’objet de multiples controverses dans son pays, Birame Ould Abdeidi a pu, en quelques années, devenir le symbole de la lutte contre l’esclavage. A l’extérieur et à l’intérieur. Le prix vient couronner cette stature de «combattant libérateur».
A ses détracteurs, je vais dédier cette histoire : on raconte que quelque tribu maraboutique du Sud mauritanien fut terrorisée par les apparitions intempestives d’un lion. Même si le lion n’avait pas encore commis de dégâts, tous convinrent de faire appel au premier guerrier de passage pour lui demander de le tuer.
Un guerrier de deuxième catégorie se présenta un jour. La Jemaa tribale lui proposa quelques chamelles et vaches de traite, deux bonnes montures et quelques tissus fraichement arrivés de Ndar, le tout contre la chasse au lion qui menace. Très fier d’avoir été sollicité et de venir ainsi au secours d’une tribu maraboutique, notre homme accepta. On lui indiqua la mare où le lion s’abreuvait chaque jour en milieu de journée. Il y alla pour s’installer en haut de l’arbre le plus imposant. Peu de temps après, le lion se présenta, but un coup et se dirigea vers l’arbre. Mais la peur prit notre homme qui, à force de tremblements, laissa tomber son fusil. Au moment où le fauve tournait sa tête vers le haut après avoir senti la présence. La bandoulière s’accrocha au cou du lion qui, pris de panique, disparut rapidement emportant avec lui le fusil. Notre héros revint bien après au campement et quand on lui demanda s’il avait tué le lion, il répondit : «le problème c’est qu’il est maintenant armé».
A ceux qui ont toujours cru pouvoir «écraser» par la méthode forte Birame Ould Dah Ould Abdeidi, il faut dire peut-être qu’il est désormais paré d’un prix international qui l’auréole pour le distinguer de ses autres compatriotes.
Aux amis, sympathisants et compagnons de Birame Ould Abdeidi, il va falloir poser la question de savoir comment ce prix peut être celui d’une cause à travers un homme. Comment le capitaliser pour faire avancer le combat anti-esclavagiste en Mauritanie ? Comment en faire une étape de la lutte et non son couronnement ?

L’urgence étant de «normaliser» les méthodes de lutte contre l’esclavage pour y faire adhérer le maximum de Mauritaniens qui sont souvent victimes de mauvaises interprétations. Amener nos compatriotes à concevoir cette distinction, non pas comme une mise au ban ou une stigmatisation, mais comme une prime à la volonté de faire changer les choses. C’est l’enjeu de l’après-prix.

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