Certains diront : «une traduction de plus» du «Petit Prince» de Saint-Exupéry. D’autres
diront : «enfin une traduction du
Petit prince !». Et tous auront tort de marquer leur surprise. Les
premiers devraient se rappeler qu’il s’agit là d’une œuvre dont la traduction est
toujours un fait nouveau, un fait qui mérite l’attention ; les seconds,
que cette œuvre, vendue à 135 millions d’exemplaires, a été traduite en 220
langues et dialectes. Ce qui en fait un véritable phénomène de l’édition. Mais
c’est surtout ce qui en fait l’œuvre majeure de l’écrivain Antoine de
Saint-Exupéry. Si ce n’est de la littérature française.
Alors pourquoi cette traduction (de
plus) ? et pourquoi notre compatriote Mohamed Vall Ould Abdel Latif a-t-il
décidé de traduire une œuvre qui n’est pas forcément la plus connue chez nous
de ce qui a été écrit par Antoine de Saint-Exupéry ?
Nous connaissons mieux «Terre des hommes» qui a été l’une des
appellations de la Mauritanie, ou «Vol de
nuit» qui a fait partie des classiques inscrits dans les programmes
scolaires des lycées et collèges du pays. Mais Mohamed Vall Ould Abdel Latif a
choisi «Le Petit prince»… une façon
de rendre hommage à ce conte d’enfants devenu livre de chevet des adultes.
La rigueur et l’austérité de l’administrateur
auraient pu empêcher Ould Abdel Latif d’avoir le temps d’apprécier et de
pratiquer tout ce qui ne parait pas utile aux gens d’aujourd’hui, tout ce qui n’est
pas «nourriture terrestre» et qui n’intervient
pas dans la croissance physique de l’individu (et de la communauté).
C’est oublier que Mohamed Vall Ould
Abdel Latif est le produit d’une culture ancrée dans la tradition qui a fait de
l’héritage gréco-romain l’un de ses fondements. Avec la promotion de l’abstrait
et l’enseignement d’une philosophie de soi qui donne plus d’autonomie de pensée
à l’individu et lui permet l’utilisation de l’intelligence pour se faire une
idée du monde et des interprétations que les autres en font.
C’est ici qu’il faut probablement
chercher cette propension à se jouer des mots pour les immortaliser dans des
formules qui prennent immédiatement – dès qu’elles sont prononcées – l’allure
de sagesses éternelles. C’est ici aussi qu’il faut trouver une des explications
à ce qui fait qu’en chacun de ce milieu vit un exégète, un grammairien, un
homme de sciences, un mathématicien, un astronome… et bien sûr un poète.
Mohamed Vall Ould Abdel Latif incarne
parfaitement le milieu dont il est issu. Il est une perle, même s’il est une
perle parmi d’autres, il reste la plus scintillante de toutes. Dans ce milieu
où la fulgurance est cultivée au quotidien, la célébration de la belle œuvre –
d’où qu’elle vienne – est une attitude normale.
Il y a deux, trois ans que cet écrivain –
on peut dire sociologue, historien, grammairien, poète, journaliste… -, que cet
écrivain m’a présenté sa traduction du «Petit
prince». Je paraphrase André Gide en disant qu’on se saura jamais les
efforts qu’il nous faut faire aujourd’hui pour nous intéresser à la culture, à
la culture de l’intelligence, «mais
maintenant qu’elle nous intéresse, ce sera comme toute chose – passionnément».
Il s’agit de la traduction à partir du
Français vers l’Arabe, deux langues que Ould Abdel Latif maitrise parfaitement.
Et parce qu’il maitrise ces deux langues, et parce qu’il apprécie et savoure
toutes les facettes de l’écrit, il a réussi une traduction qui n’a pas d’égal
dans tout ce que j’ai pu lire depuis.
Et comme dit le héros du conte : «C’est véritablement utile puisque c’est joli».
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