mardi 19 mars 2013

Ainsi va la vie


Il y a quatre jours, je reçois un coup de téléphone. La voix m’est familière, surtout le «R» prononcé en «ghayn» arabe (ce qui est correspond à l’originel). Mon interlocuteur me demande si j’ai reconnu la voix en ajoutant : «c’est normal que tu ne la reconnaisses pas, ça fait longtemps. Je me demande même si tu vas te rappeler le nom, je suis Mohamed Abdallahi Ould Babana…»
Oui, bien sûr que c’est la voix d’un camarade de classe qui fut plus tard Procureur, puis ministre de la culture, puis Ambassadeur. Je suis enchanté de le retrouver après tant d’années sans contact direct. Même si on se respectait, sans doute parce qu’on s’appréciait, nous n’avons jamais été très liés au point de savoir chacun où en était l’autre. Je lui exprime mon réel sentiment de disponibilité et lui rappelle que nous avons partagé des moments qui méritent d’être revisités.
«Justement, je vais t’inviter à prendre un thé. Ce sera l’occasion de discuter d’un papier que je prépare pour le journal à propos de la Cour pénale internationale qui vient d’arrêter les poursuites contre le nouveau président kenyan alors qu’elle continue ses démarches contre le soudanais Oumar al Bachir, deux poids deux mesures…»
Je comprenais les préoccupations du diplomate qui fut représentant de la Mauritanie au siège de l’Union africaine en Ethiopie. Et je présumais qu’il allait s’agir d’un bon papier d’analyse. Je m’empressais donc de lui exprimer mon enchantement à l’idée de voir un cadre mauritanien s’exprimer sur des sujets d’actualité tel celui-là.
«Je vais t’appeler dès que j’en termine, comme ça on va en discuter, ce sera peut-être le weekend prochain, Inchaa Allah». J’étais naturellement d’accord.
Il est onze heures ce matin. Je suis en conférence quand quelqu’un me glisse qu’un certain Mohamed Abdallahi Ould Babana a décédé. «Qui ça ?» Il me répète le nom en ajoutant : «Je pense qu’il s’agit d’un ancien ministre de la culture, c’est lui qui a rallié le parti de Boydiel…».
C’est justement la seule personne à laquelle je crois devoir téléphoner à cette occasion. Je ne le trouve que plus tard et il me confirme qu’il s’agit bien de mon ami. Je lui raconte mon échange téléphonique avec lui. Il lui en avait parlé. Il semble même qu’il était pressé de finir le papier pour le publier dans l’édition qui suivait. Allah en a voulu autrement…
Qu’Allah l’agrée en Son Saint Paradis, qu’Il allège la douleur de ses proches, parents, amis et compagnons. Ainsi va la vie…
Inna liLlahi wa inna ilayhi raji’oune.

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