Le phénomène des radios et télévisions privées me permet de faire un
constat : ce qu’on reprochait à Radio Mauritanie et à TVM en matière de
compétences à diriger les débats, à donner l’information, à présenter les
dossiers d’information, n’est pas inhérent aux institutions mais relève des
capacités intrinsèques des Mauritaniens à animer… Il suffit de suivre l’une des
émissions de débat sur n’importe quelle nouvelle chaine privée pour s’en
convaincre. Si l’on excepte Mohamed Mahmoud Ould Eoulmaaly de Radio Nouakchott,
vous êtes fatalement en face d’un journaliste qui ignore complètement et le
parcours et la personnalité de son invité et les sujets dont ils peuvent
parler. La tendance est de couvrir cette ignorance, soit par une agressivité
excessive qui prend vite l’allure d’un affrontement qui n’a pas sa raison d’être,
soit par l’effacement devant l’interlocuteur.
J’ai suivi plusieurs personnalités politiques et culturelles répondre à des
journalistes évidemment mal préparés à leur faire face. Alors que la direction
d’un débat est d’abord une question de préparation. On n’invite pas Hamden Ould
Tah quand on ne sait pas quoi lui demander. Ni Bedredine, ni Ould Maham, ni
Sarr, ni Ould Messaoud… quand on ne sait de ces gens que ce qui se rapporte à l’actualité,
quand on ne connait pas le background qui a produit chacun de ces hommes, le
parcours de chacun, l’interview que l’on espère risque de tourner au ridicule. Et
c’est souvent le cas…
Et l’on revient à cette culture de la médiocratie qui fait que tout
Mauritanien se croit spécialiste en tout (‘aalimou koulli vannin) et peut donc
parler de tout et avec n’importe qui. Cela a donné cette fameuse émission
présentée à la radio et à la télévision et où la concurrence entre le faqih et
le médecin est très forte, chacun voulant répondre à toutes les questions. Genre
de réponse fatale : «…hadha hraam ‘liik itçoum…» du médecin et/ou «…hadha
yalla t’iss min kadha biih illi mahu ma’loum viik…». La première réponse qui
relève du «licite ou de l’illicite» est celle du médecin, la seconde qui est du
domaine de la santé est du faqih. On intervertit facilement les rôles parce que
chacun se croit investi d’une compétence naturelle à répondre à tout.
Et pour revenir aux
interviews, débats et émissions d’enquêtes sur les nouvelles chaines, nos
jeunes confrères gagneraient à bien préparer leurs sujets pour pouvoir tout
dévoiler de la personnalité de leurs interlocuteurs. Sans risque pour eux.
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