C’est
une mode que de parler de l’utilité de la mise en place d’un Gouvernement
d’union nationale. Sans discernement, on veut bien croire que ce sera la
solution de tous nos problèmes. Alors que nous savons que, la seule expérience
que nous avons eue d’un tel montage, est celle de 2009. Et qu’elle devrait nous
éloigner de revendiquer ce schéma.
Au
lendemain de l’Accord de Dakar, on a vu les trois pôles politiques siéger au
sein d’un même gouvernement. On va taire toutes les dissensions qui ont failli
emporter l’expérience. Mais on ne peut passer sous silence le résultat :
les pôles n’ont pas reconnu le travail qu’ils ont pourtant conçu et mis en
pratique ensemble.
A
peine avons-nous cru sortir d’une crise parce que nous avons été ensembles pour
gérer l’étape cruciale de la présidentielle que nous sommes entrés dans une
autre, plus insidieuse, plus sourde et plus grave parce que plus difficile à
traiter. La crise de légitimité de ce qui a été fait par un gouvernement
d’union nationale dure depuis. Ça, pour l’expérience que nous en avons.
Pour
le principe aussi, la mise en place d’un gouvernement d’union comporte de gros
risques dans un pays comme le nôtre.
D’abord
pour l’harmonisation du travail gouvernemental. On a vu comment se comportaient
les ministres APP dans le premier gouvernement de l’ère Sidi Ould Cheikh
Abdallahi, puis ceux de Tawaçoul et de l’UFP : la loyauté et la solidarité
allaient aux partis et à leurs militants avant de servir l’action du
gouvernement. Ce qui avait provoqué quelques «insoumissions» de la part des
ministres vis-à-vis du premier d’entre eux (PM).
Ensuite,
et il faut le répéter, nous avons l’exemple malien qu’il faut méditer.
Qu’est-ce qui a le plus accentué la «débâcle démocratique» dans ce pays qui
avait connu une belle expérience dès 1991 ? C’est à mon avis la
constitution d’un gouvernement d’union nationale au lendemain du retour au
pouvoir de Amadou Toumané Touré. Il a ainsi tué l’opposition au nom de la
recherche d’un consensus national. Plus de contrepouvoir pour quelques années.
ATT va trouver dans la recherche du consensus la justification d’une fuite en
avant constante. Il refusera d’affronter les problèmes posés à son pays. Le
résultat est celui que nous voyons. Aucune expérience de gouvernement d’union
nationale ne peut nous servir de modèle, ne peut donc nous emballer.
Il
y a lieu, il est vrai, d’ouvrir le jeu, de faire sentir aux différents acteurs
qu’ils peuvent – qu’ils doivent – concevoir une convergence leur permettant,
tout en se reconnaissant mutuellement, d’agir de concert pour améliorer les
conditions de ce jeu, mais aussi les conditions de vie en général :
raffermir la démocratie et renforcer les structures de l’Etat. L’on comprend
aisément que le passé des Mauritaniens leur fait craindre la situation de
«tributaires» (etzangui). Qu’ils ne veulent pas rester à l’écart. On sait que
la relation avec la politique a été conçue comme une démarche commerçante. En
ce sens que la politique rapporte sans demander des compétences particulières.
Tout comme la proximité ou, mieux, l’exercice du pouvoir. Et c’est, je pense,
le mal profond du pays.
Où
est-ce que nous en sommes ? Les relations entre les différents acteurs
sont exécrables. Le rejet est la caractéristique première. La priorité n’est
pas à les mettre côte à côte dans un gouvernement, mais de les rapprocher et de
les amener à se reconnaitre les uns les autres. De les amener à réfléchir à la
situation du pays et comme disent les Américains, à se poser la question de
savoir ce qu’ils peuvent donner à la Mauritanie et non seulement ce qu’elle peut
leur offrir. Surtout en ce moment où les menaces pèsent lourdement sur toute la
région.
Dernière
trouvaille des Américains : ils disent qu’il faut être prudent quand on
demande, parce qu’on peut avoir ce qu’on demande. Quoi faire avec ?
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