«Toi, et toi seul, auras les étoiles, personne d’autre. Dans
l’une d’elles, je vivrai. Quand tu regarderas le ciel, la nuit, puisque
j’habiterai dans l’une d’elles, puisque je rirai dans l’une d’elles, alors ce
sera pour toi comme si riaient toutes les étoiles. Tu auras, toi, des étoiles
qui savent rire»
En citant le Petit Prince de l’ami Antoine Saint-Exupéry, la
fille de Robin Williams ne pouvait mieux trouver. Son père, cet acteur aux
mille mérites, avait la tête …ailleurs. Le détachement qui lui permettait
d’irradier sur les autres, de leur passer ce virus bienfaisant qui, au premier
abord, mettait en condition. En même temps, cet air mystérieux qui donnait une
profondeur intellectuelle à toute la gestuelle de l’acteur. Entre cette
jovialité débordante et cette tristesse sournoise, se consumait le talent
extraordinaire de Robin Williams.
Si je le commémore aujourd’hui, c’est qu’il fait partie de ces «bons
bougres» qui m’ont rendu heureux, le temps d’une trame, l’espace d’un
moment. Heureux de rire de nos malheurs, de nos mésaventures, de nos histoires
qui se ressemblent finalement. Heureux de partager avec ceux que j’aime les
films de ce «monstre du cinéma».
Le Nouakchott de mon cœur, celui de mes souvenirs les plus forts,
est insoupçonnable aujourd’hui. Parce qu’avec le recul de la joie dans ce pays
sec et chaud, on a oublié ce que nous fûmes.
Pour être bref, je rappellerai qu’il exista des cinémas à
Nouakchott, des booms à Nouakchott, des aires d’émancipation culturelle et
physique. C’est ici que je découvris Good Morning Vietnam, ici que je
vis en avant-première Le cercle des poètes disparus et toujours sur
grand écran Jumanji. Madame Doubtfire et Will Hunting ce
sera en vidéo, quand la rigueur spartiate des moines du désert refera surface,
quand la mal-gouvernance assèchera les intelligences, quand le réalisme cupide
cultivé par les SEM (structures d’éducation de masses) et le PRDS (parti
républicain, démocratique et social) tuera les rêves. La constipation des
organismes et des esprits est devenue le premier Mal du pays…
Une adaptation d’un roman que je découvrirai plus tard (Quand
Papa était femme de ménage de Anne Fine), Madame Doubtfire restera
incontestablement le chef d’œuvre le plus marquant de la carrière de Robin
Williams. L’histoire est celle d’un banal père de trois enfants qui n’arrive
pas à avoir une vie régulière et stable. Alors que son épouse est quelqu’un de
très carré et très passionné par son boulot. Légalement séparés, les parents
n’arrivent pas à s’entendre sur la garde des enfants. La mère accuse le père de
ne pas être à la hauteur et gagne facilement son procès. Incapable de se
résoudre à ne voir ses enfants que l’espace d’un weekend, le père entreprend sa
transformation. Il trouve un petit boulot de balayeur dans un petit studio,
puis se transforme en gouvernante pour pouvoir refaire son entrée dans l’espace
de ses enfants. Il répond à une annonce publiée par la mère de ses enfants qui
cherchait une gouvernante capable d’encadrer et de tenir la progéniture. Madame
Doubtfire fera plus : elle les rendra heureux. Le génie de Robin
Williams s’exprime tout au long de la trame qui ne lasse à aucun moment. C’est
un film qu’on est toujours prêt à revoir.
Good Morning Vietnam
révèle l’éclectisme de Robin Williams, ce reporter qui réussit à enfreindre les
lois du silence au sein de l’Armée américaine basée au Vietnam en pleine
guerre. En se lâchant, le reporter, parti pour être un banal personnage, se
retrouve la star d’un univers où l’odeur de la mort et l’exercice quotidien de
la violence et de l’arbitraire ont asséché les sens et interdit tout humanisme.
Tandis que Le cercle des poètes disparus… quel
film !... est l’occasion d’aller au plus profond de l’âme humaine pour
restaurer les vestiges d’une humanité disparue et redécouvrir ce que nous
sommes en vérité. Cette archéologie des sens permet de remettre en surface ce
qui est notre essence, ce qui nous différencie des autres êtres vivants, la
capacité de dire et de dire chaque fois autrement ce que les autres disent
mécaniquement et/ou simplement, sans recherche et sans intelligence.
Robin Williams nous a fait rire. Il a provoqué chez nous le sens de
la réflexion. Nous permettant de nous remettre en cause.
Il m’a
personnellement permis de passer de bons moments, de les partager avec des
êtres chers. Je l’en remercie.
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