On
a longtemps attendu (trop attendu) cet instant. Et voilà que les «trois pôles politiques» (comme en 2009 à
Dakar) acceptent de se faire face à face.
La
Majorité a envoyé Mohamed El Mokhtar Ould Zamel et El Moudir Ould Bouna, tous
deux députés de l’Union pour la République (UPR), comme quoi c’est bien ce
parti qui dirige dans ce pôle. Ould Zamel est le président du groupe
parlementaire UPR à l’Assemblée nationale.
Le
Forum national pour la démocratie et l’unité (FNDU, pas FNDD) a délégué Ahmed
Ould Lafdhal du RFD et Kane Hamidou Baba du MPR (mouvement pour la rénovation).
Aucun syndicaliste, aucune personnalité de la société civile.
La
Coalition pour une alternance pacifique (CAP) est représentée par Abdessalam
Ould Horma de Sawab et Idoumou Ould Abdi, secrétaire génaral du Wiam. Sawab qui
a participé aux dernières élections n’a pas un siège, mais il préside
actuellement la CAP.
On
n’a pas vraiment besoin de voir le parcours de chacun de ces hommes, sa
position réelle sur l’échiquier qu’il représente, sa disponibilité à voir s’apaiser
les relations entre les partenaires politiques, ses engagements antérieurs pour
la démocratie, l’égalité, la justice, l’unité et la démocratie…, pas besoin de
faire l’évaluation. On se connait assez. Il suffit juste de savoir qui
représente quoi pour savoir qu’en mettant en avant ces hommes-là, on a, de part
et d’autre, donné la preuve qu’on se moque un peu de l’opinion publique et du
pays en général, en tout cas qu’on n’attend pas grand-chose de ce dialogue.
On
nous dira qu’il s’agit là d’«éclaireurs»
qui ont pour mission de «jauger» l’adversaire
en attendant de passer le cap de l’observation. Qu’au premier couac, les trois
parties dénonceront leurs envoyés tout en corrigeant le tir et en sachant jusqu’où
on peut aller. Si vous connaissez l’histoire du papillon (bouverteta) qui
disait à ceux qui l’auscultaient maladroitement pour savoir de quel sexe il est :
«le temps pour vous de savoir, je serai
mort». La fragilité de ct insecte est légendaire et il est absurde de le
retourner dans tous les sens pour savoir s’il est mâle ou femelle.
Avec
nos politiques, il est nécessaire de parler vrai : nous n’avons plus le
temps parce que nous en avons déjà trop perdu à savoir si le «b» était chimique (sorcier), s’il
fallait composer avec le pouvoir ou chercher à le faire dégager, s’il fallait
participer ou pas aux élections législatives et municipales, s’il fallait subir
les événements et attendre qu’une «ouverture
vienne du Ciel»…
Ceux
parmi eux qui n’ont pas compris que l’occasion de reprendre la route de la
démocratie est peut-être là, vont tout rater. Ce peut-être l’occasion d’approfondir
les règles du jeu démocratique pour le rendre plus régulier et plus équitable
notamment en renforçant les outils qui le mettent en œuvre. Ce peut-être l’occasion
d’exiger le retour sur les élections législatives et municipales et leur
reprise pour après l’élections présidentielle. L’occasion de maintenir le statu
quo actuelle, avec la même Institution de l’Opposition, et aussi d’ouvrir la
voie à tous de participer et de revenir sur scène. Ce peut-être l’occasion de
préparer l’élection présidentielle de 2019 qui est le vrai rendez-vous de l’alternance.
Revenons
un moment en arrière et rappelons-nous dans quelles conditions le candidat Sidi
Ould Cheikh Abdallahi a été élu : malgré le soutien affirmé de la junte au
pouvoir, il a eu seulement 24% au premier tour ; il a fallu le
retournement de Messaoud Ould Boulkheir et le ralliement de Zeine Ould Zeidane
pour le faire passer avec 52%. Plus proche de nous, l’expérience des législatives
et municipales est édifiante à Tintane, à Rosso, à Guérou, à Chinguitty… Tout
nous enseigne ici que le seul soutien de l’autorité n’assure plus une victoire
aux élections.
En
2019, le Président Ould Abdel Aziz ne sera pas candidat. Il se contentera
certainement de porter un candidat. L’histoire du pays nous apprend qu’entre un
candidat «sortant» (ou en place) et
un candidat «soutenu», il y a une
grande différence. Autant le premier peut paraitre «imbattable», autant le second peut être battu.
C’est certainement ce que les Islamistes de Tawaçoul
ont pris en compte dans leur position marquant plutôt une indifférence
vis-à-vis de la future présidentielle : s’il y a une chance, c’est pour l’alternance,
c’est celle de 2019 qu’il faut préparer dès à présent. La préparer suppose une
présence sur la scène. Elle nécessite un positionnement de leadership au sein
de la nouvelle opposition. Ce qui fait de la perspective de boycott, une
aubaine pour ce parti dans la mesure où la participation pourrait mener au
retour des autres partis dans le jeu.
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