C’est finalement la voix du cœur qui l’a emporté dans
le dénouement de la crise qui a secoué l’Union des forces du progrès (UFP). La voix
du cœur, c’est celle qui a privilégié le maintien de la ligne de la direction
historique du mouvement devenu parti, celle que défendaient le Président
Mohamed Ould Maouloud et ses proches compagnons. Dans le rapport que nous avons
eu des discussions qui auront duré trois jours, pas de trace de Mohamed Ould
Khlil, le vice-président, l’ancien Wali notamment de Nouakchott. Lui qui
soutenait fermement le boycott ne semble pas avoir pris la parole pendant cette
dernière réunion où ce sont les dirigeants qui ont développé leurs arguments. Deux
thèses.
La première, la «participationniste»,
a été défendue par Moustapha Bedredine, secrétaire général du parti et actuel
député du parti. L’option de la participation découle de la ligne originelle du
parti. Elle se justifie amplement par la nécessité pour le parti de rester dans
le jeu, de pouvoir offrir à ses cadres la possibilité de s’exprimer
publiquement et de se donner quelques moyens pour mener à bien son action. La démocratie
étant un combat perpétuel, elle ne peut souffrir l’absence du terrain de la
contestation. Et de rappeler toutes les fois où le parti a eu à choisir de s’impliquer
ou de se rapprocher de pouvoirs avec lesquels il n’avait rien à partager, rien
que pour pousser vers plus d’ouverture, plus de progrès. Pour ce qui est de la
question de la «trahison des compagnons
de la COD», il ne faut pas s’en faire parce que tous ont trahi l’UFP et ses
leaders à un moment donné : ces partis n’ont pas de leçon à donner en la
matière d’autant plus qu’ils ne sont pas d’accord sur la décision de boycott.
La deuxième ligne était défendue par le Professeur Lô
Gourmo Abdoul et le Président Mohamed Ould Maouloud. Elle s’articule autour de
l’opportunité de la décision prise par le Comité permanent alors que le
Président était mandaté pour diriger la délégation de la COD pour le dialogue
et qu’il devait s’en tenir à la décision collégiale de cette même COD. Pour ce
qui est de la situation qui a toujours prévalu, elle était dictée par les
menaces qui pesaient sur les pouvoirs : le parti aurait rallié Ould Cheikh
Abdallahi parce qu’il craignait un coup d’Etat ; il se serait rapproché de
Ould Taya pour éviter les déchirements qui menaçaient le pays. Alors que le
pouvoir actuel ne risque rien. Allant même jusqu’à reconnaitre que «quelque chose» a été fait dans les
domaines de la liberté et des infrastructures. Ce qui donne au pouvoir de Ould
Abdel Aziz un répit qui peut durer le temps nécessaire pour arriver aux
présidentielles sans accrocs. L’objectif stratégique du parti ne doit pas être
de renforcer le camp de ce pouvoir, mais de maintenir la pression sur lui pour
lui arracher le maximum de concessions d’ici là. La meilleure façon de faire
est de maintenir le climat de crise politique en boycottant les futures
élections.
Un second développement va viser les «élus» du parti qui semblaient être les
plus engagés pour la participation. Rappel de leur «indiscipline» qui les a poussés à continuer à venir au Parlement et
à toucher leurs salaires de députés alors que le parti avait jugé «illégale» l’Assemblée présente. Rappel aussi
de la nécessité de maintenir le cap de l’engagement qui fait que les plus
anciens cadres du parti n’ont jamais été portés sur les avantages que pouvaient
procurer telle ou telle situation.
Un troisième volet du développement concernera les
rapports avec les autres composantes de la COD. Reconnaissant les trahisons
dont l’UFP et ses leaders ont été victimes par le passé, le discours a opposé
que rien moralement ne peut justifier de se comporter de la même façon. L’UFP n’a
pas le droit de faire volte-face.
Un dernier volet a traité de la nécessité de maintenir
l’unité du parti et son leadership. La direction ne doit pas éclater et le
leader Mohamed Ould Maouloud ne doit pas être désavoué. Pour ce faire une
commission est désignée pour faire une proposition qui sera soumise au vote. Composée
de cinq membres dont son président Mohamedou Nagi, supposé neutre, elle rendra
son verdict vers cinq heures du matin. Elle propose le boycott et le soumet au
vote : «Par 31 voix, 6 contre et 3
abstentions, le BE du Parti réuni depuis le 8 octobre a réaffirmé dans la nuit
du jeudi 10 au vendredi 11 octobre, sa décision de ne participer qu’à des
élections démocratiques, transparentes et consensuelles, ce qui n’est pas le
cas pour celles dont l’agenda a été imposé unilatéralement par le régime. En
conséquence, les listes déposées actuellement au nom du parti devront être retirées.
L’UFP réitère la position commune de la COD et demande la réactivation du
dialogue suspendu en vue de trouver une formule de compromis sur une
gouvernance électorale transparente et juste.» (déclaration du Professeur
Lô Gourmo Abdoul largement reprise sur le net).
C’est ainsi que les voix du cœur l’auront emporté sur
celles de la Raison. Reste à savoir comment la décision de boycott va être
appliquée, surtout si les mandataires des listes vont se plier ou non à l’exigence
du parti et/ou s’ils vont aller se présenter ailleurs.
Jusque-là la discipline du parti a toujours été
respectée par ses cadres et militants, mais on a vu comment ce différent a été
étalé avec violence sur la voie publique. De quoi affirmer que quelque chose
est en train de rompre dans la «superstructure»
des camarades.
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