C’est l’un des soucis majeurs de la
Mauritanie que l’existence de générations entières formées en ce temps qualifié
par tous de «règne de la médiocrité».
Ces trois décennies qui ont vu tout foutre le camp : le niveau, l’école,
les valeurs, l’économie, la politique, la Morale, le moral, l’honneur, l’engagement,
la vérité… Nous ne sommes pas assez durs avec ce temps qui a rongé ce qu’il y
avait de mieux en nous. Heureusement qu’il y a eu des résistances.
Aujourd’hui, les survivants du système,
ceux qui l’ont nourri et entretenu, essayent de se mêler à la foule des
résistants, de se refaire une virginité, de se retaper et de nous faire oublier
les rôles mesquins qu’ils ont dû jouer… Ils sont les mêmes physiquement…,
moralement certainement…, mais ils prennent des places qui ne devaient pas être
les leurs.
Les inventeurs de l’article 104, les
tortionnaires, les bourreaux, les prédateurs, les promoteurs des faux chiffres,
les génies malfaisants de l’époque 1980-2005 doivent reculer, la distance
nécessaire pour permettre au pays de reprendre ses souffles, le temps
nécessaire pour lui donner l’occasion de se relever.
Les résistants de l’époque doivent au plus
vite avancer un pas de plus pour ne pas se laisser submerger par ceux qui les
ont exploités tout ce temps. Ils n’avaient pas le droit de servir de «blanchisserie» aux bourreaux d’hier. Nous
laissant sans repères…
Pour revenir à ces générations qui font
déjà la Mauritanie d’aujourd’hui et qui seront les maîtres de celle de demain,
il faut dire qu’elles inquiètent. Il m’arrive de temps en temps d’observer de
près le comportement de ces jeunes de moins de 35 ans et de remarquer qu’ils
sont l’ante-Etat. Comment peut-il en être autrement ?
En 2000, lors de la campagne de répression
contre les jeunes de Conscience et Résistance, des gens sont venus dans les
rédactions demander de ne pas citer leurs enfants arrêtés dans ce cadre. Je me
souviens avoir tenu à deux «grandes
personnalités» de l’époque le raisonnement suivant : pourquoi avoir
honte d’avoir donné à la Mauritanie un(e) jeune interpellé par la situation du
pays et soucieux de l’engagement sur la voie de changement ? Je crois qu’il
est plus grave de les doter de cartes d’identité nationale falsifiées, avec des
noms et des âges qui ne sont pas les leurs et de leur demander ensuite de voter
l’une de ces calamités du PRDS… J’en avais fait un texte que j’avais intitulé «Générations Maawiya, générations perdues».
Pour dire combien nous sommes inconscients de vouloirs léguer à la Mauritanie
un encadrement pourri par l’appât du gain.
Récemment encore, je suivais un quiz
organisé par des jeunes Mauritaniens – étudiants apparemment – et où la
question se rapportant à la date du premier référendum sur la première
Constitution du pays était posée. L’un des participants me pose la question. Je
réponds naturellement que la première Constitution a été adoptée le 22 mars
1959, puis révisée le 26 novembre 1960, le 20 mai 1961 pour fonder le régime
présidentiel et préparer la fin du pluralisme politique qui allait suivre. La loi
61.095 du 20 mai 1961 n’a pas fait l’objet d’un référendum, mais celle de 59,
si.
Les compagnons du quiz ne voulaient rien
entendre. Il n’y a jamais eu de Constitution, ni de référendum avant le 20
juillet 1991. C’est comme ça que des pans entiers de notre Histoire sont rayés
par le fait de l’insouciance qui est une règle de conduite qui caractérise
notre élite…
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