Le
24 septembre 2011, la ville de Kaédi est secoué par un mouvement de révolte qui
eut l’effet d’un électrochoc pour tout le monde. Pour dénoncer les procédures d'enrôlement.
Pour
les autorités qui ont immédiatement compris que le défaut de communication
autour de la question de l’enrôlement est à la base de nombreuses
incompréhensions qui, elles-mêmes, expliquent le rejet. Les responsables de
l’opération se lancèrent alors dans un exercice d’explications qui, même si
elles arrivaient tard, avaient quand même servi à faire baisser la tension.
Pour
les partis politiques qui crurent un moment qu’il s’agissait là d’une vague qui
pouvait être favorable à leur action visant à délégitimer le pouvoir.
Et
enfin pour la classe politique traditionnelle du Gorgol en général, de Kaédi en
particulier, laquelle classe a senti qu’elle perdait la main. Car, il faut le
dire maintenant que nous avons le recul nécessaire, ce «coup de gueule»
était aussi dirigé contre cette classe politique qui se comportait comme si
elle était éternellement là.
«Nous
nous sommes senti trahis. Les anciens attisent les braises et quand on bouge,
ils viennent en pompiers pour éteindre le feu. Ils vont alors auprès des
autorités chercher la récompense», conclut l’un des activistes de l’époque,
aujourd’hui très versé dans la realpolitik.
Il
s’en va me dire que les jeunes avaient trouvé la bonne tactique, celle de
concentrer la manifestation autour de Gataga, ce village «imprenable» et
qui a une porte ouverte sur chaque autre quartier de la ville. «Quand on a
saccagé les bâtiments publics, on s’est barricadé dans le village. Personne n’a
pu nous déloger». N’était la ruée des «anciens», notables et acteurs
politiques, les jeunes seraient restés là où ils étaient.
Il
me raconte comment ils ont été convaincus par l’un des membres du conseil
municipal issu de l’UFP, à se rendre pour discuter avec les autorités qui sont
ouvertes à toutes options. Comment il viendra récupérer les quatre dirigeants
du mouvement dont mon interlocuteur pour les amener à la Mairie où, leur
avait-on dit, les attendait le Wali. C’est là où l’un des jeunes a été tabassé
par des éléments de la police (ou de la garde, il fait la confusion).
«Quand
nous avons entamé les discussions sous pression des ainés, on s’est rendu
compte qu’on gagnerait beaucoup à garder nous-mêmes le contact avec
l’administration pour éviter les interférences impromptues de la vieille classe
politique qui nous utilise comme moyen de pression dans le marchandage avec
l’Etat». Depuis le contact est maintenu.
«On
a compris que nous avions commis une bêtise en s’en prenant aux édifices
publics qui font partie de notre richesse locale, qu’avec la violence tout
pouvait arriver, que les anciens ne sont pas dignes de confiance et qu’ils
chercheront toujours à nous instrumentaliser».
Ici les organisations de jeunes sont très actives. A
l’image de cette association appelée «Agir ensemble» et dont le nom est
partout inscrit. Dirigé par un jeune Soninké revenant de l’Afrique centrale,
Agir est très active dans l’organisation de campagnes d’assainissement de la
ville, d’assistance et d’organisation des jeunes de quartiers… Se défendant de
faire la politique, ses dirigeants sont accusés de viser la Mairie de la ville.
Laquelle est déjà occupée par Moussa Sow dit Tchombé, un vieux de la vieille.
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