Mardi
soir, l’avion de la RAM est attendu. Des dizaines de gens sont là, comme moi, à
attendre que les passagers sortent. Parents, amis, coursiers… chacun voudrait
voir la personne attendue au plus vite. Depuis que le hall de l’aéroport est
interdit au public, ceux qui attendent doivent patienter dans le parking.
Si
mes souvenirs sont bons, on nous disait à l’époque où l’on confiait la gestion
des aéroports à la SAM (société des aéroports de Mauritanie), que la taxe sur
les billets compensait les services que cette société était sensée fournir aux
usagers. Dont un hall d’accueil où parents et amis pourraient attendre les
voyageurs. Aujourd’hui l’accès du hall est seulement autorisé à deux catégories
de personnes : les porteurs de badges (pour une raison ou une autre) et
les privilégiés qui ont la chance de connaitre les gendarmes en faction ou
leurs chefs.
A
la porte du hall s’agglutinent les impatients qui tentent de se rapprocher le
plus des issues pour crier à temps, marquer la bienvenue, exprimer un amour. De
temps en temps, les gendarmes font reculer la foule, plus ou moins poliment
(sans doute plus moins que plus). Le temps de reconnaitre un visage et de lui
faire passer la barrière.
Un
douanier sort avec de nombreuses valises et deux charriots qu’il convoie
justement jusque la porte de sortie. Comme ces collègues à lui qui convoient
les voitures (souvent) volées dans les pays méditerranéens et qui doivent finir
leur course dans l’une des «bourses» de Nouakchott.
Ceux
qu’on ne voit plus dehors sont les policiers. Au moins eux connaissaient
beaucoup de gens. Ce qui fait que quand ils s’adonnaient à ce manège qui
consiste à faire profiter ses proches, ses connaissances, à monnayer en fait
l’accès au hall, plus d’usagers en profitaient. Avec les gendarmes, on va dire
que ce sont deux personnes sur huit qui sont traitées de la sorte, avec le
privilège de pouvoir entrer.
Il
y a quelques mois je vous parlais de ce douanier qui faisait passer des
étrangers tous les contrôles. Je retrouve le même en train de convoyer de
grosses valises vers l’extérieur. J’imagine que ceux qui ont besoin d’être
convoyés de la sorte, ce sont des commerçant(e)s ou des trafiquant(e)s. ne nous
étonnons point si on n’a jamais entendu parler d’une prise à l’aéroport
(drogue, marchandises illicites…).
L’un des gendarmes me reconnait – ou me confond avec
quelqu’un – et vient me prier d’entrer après avoir palabré avec son chef. Je
refuse naturellement tout en le remerciant. Attendre ici ou à l’intérieur, je
ne vois pas la différence. Sauf que d’ici j’ai le privilège de contempler les
différentes expressions de joie. Les âges aussi. A des moments pareils, les
humains redeviennent ce qu’ils sont : de simples humains. Devant la joie
ou la douleur, ils se ressemblent. Même s’ils veulent le cacher en prétextant
les origines sociales et géographiques, la différence des âges, l’intensité des
liens…
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