Au lendemain du 3 avril, jour qu’avait fixé l’opposition de chez nous pour faire «dégager» Ould Abdel Aziz et son régime, rien n’a finalement inquiété le pouvoir. En tout cas, nous nous sommes réveillés avec l’ordre de la veille.
Ce n’est pas ici une manière de moquer quelque parti que ce soit, ni de minimiser les mouvements enregistrés ici et là, mais plutôt de dire que notre opposition commet les mêmes erreurs qu’elle a commises par le passé. Et dont le plus mortel est d’engager une confrontation malvenue parce qu’inopportune et pour laquelle surtout elle n’est pas préparée.
Si l’on excepte le meeting islamiste à Arafatt, il ne s’est pas passé grand-chose. Le rendez-vous est relativement raté. Oubliée donc «la réussite» de la marche du 12 mars dernier. La première conclusion que notre personnel politique devrait tirer est de revoir le discours. Trop violent. Gratuitement aussi.
L’idéal aurait été que le pouvoir en place accepte de dégager pour laisser la place. Mais à qui ?
A l’Institution de l’Opposition démocratique qui n’a plus d’existence politique réelle depuis qu’elle s’est éclipsée devant la Coordination (COD) ?
Aux Islamistes de Tawaçoul qui semblent être les plus mobilisés – et les plus mobilisables – contre le pouvoir ? En effet, depuis le dernier meeting de ce parti, l’on sait que la force de frappe de la COD est bien la mouvance islamiste. Avec une caution, voire un leadership comme celui de Cheikh Ould Dedew, le parti Tawaçoul aura déployé tous ses atouts. Pourquoi faire ?
Deux analyses – pour ne pas dire calculs – sont à l’origine de cette position radicale que développent actuellement les porte-paroles de la mouvance.
On estime que le «printemps arabe» est viral et qu’il passe de pays en pays. Dès les premiers soubresauts en Tunisie et en Egypte, on a cru, dans certaines sphères politiques dont les Islamistes, que, par la force des choses, le pouvoir mauritanien sera emporté par le premier mouvement de rue.
Il est certes à remarquer que les Islamistes n’ont pas été emballés toute suite, qu’ils avaient évité dans un premier temps de s’embarquer dans le mouvement du 25 février 2011. On se rappelle que c’est surtout le Rassemblement des forces démocratiques (RFD) qui avait accompagné ce mouvement.
C’est seulement à partir d’avril 2011 que les prémisses du radicalisme vont apparaitre dans le discours de la mouvance. Une attitude qui renforcera les positions, déjà affirmées depuis décembre 2010, des autres partis composant la COD. Tawaçoul allait d’ailleurs rejoindre la coordination tout suite après.
Que reste-t-il de l’analyse initiale ? Nous sommes, si l’on considère que le mouvement de contestation arabe est une succession de cycles, à la fin d’un cycle montant. Le reflux a commencé. Avec notamment les événements de Libye, l’expérience désastreuse de Syrie, du Yémen, les incertitudes sur l’Egypte et même sur la Tunisie.
Quelles sont les chances de réussite du fait d’entrainement dans un pays qui n’est en rien comparable avec les pays qui ont connu des révoltes-insurrections ? Ni la durée de vie des dictateurs, ni l’état des libertés, ni les données socio-historiques, ni les aspirations du peuple… rien ne semble justifier le radicalisme qui pousse vers l’insurrection populaire. Surtout que les politiques en présence ont été, pour la plupart, à un moment donné à mille lieues de leurs positions actuelles.
Reste au moins pour les Islamistes, la volonté de montrer qu’ils sont la formation politique la plus forte et la plus apte à prendre le départ des élections futures. La prime à l’opposition donnera un plus à une formation qui assiste déjà les populations à travers l’activité humanitaire, tout en adoptant un discours pieux plutôt imparable dans un environnement politique où la pauvreté des propositions est de mise.
C’est pourquoi les sorties de Cheikh Ould Dedew sont de plus en plus politiques, comme si on envisageait de lui faire jouer un rôle électif de premier plan. On parle de lui comme chef de la liste nationale dans les législatives et même comme futur candidat à la présidentielle de 2014. Encore que pour cela il faudra attendre la fin du mandat de l’actuel président. Ceux qui sont pressés à en découdre avec le pouvoir doivent revoir les aventures d’Iznogood, le vizir qui voulait être à la place du vizir, pour savoir que la conquête du pouvoir suppose un rapport de force en faveur du prétendant et surtout l’existence de programmes et de propositions.
Hier, le seul programme déclamé était : «irhal !» (dégage)… pourquoi le pouvoir dégagerait-il ? et à qui laisserait-il la place ? et que propose celui qui voudrait bien se voir désigné comme successeur ?
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