Mohamed Ali Ould Abadi, mon confrère de Al Mustaqbal, me racontait l’autre jour comment il a appris que feu Habib, génie de tous les temps, écrivait en Français mais ne pouvait être entièrement compris que par un public mauritanien. En d’autres termes comment l’Arabe qu’il est, parlant mal français, avait compris que certains auteurs s’étaient approprié cette langue étrangère pour y camper une partie d’eux-mêmes que seuls leurs compatriotes peuvent saisir.
Ould Abadi était en voyage pour l’Egypte avec un autre confrère. Ils devaient passer par Paris. Ils n’avaient pas pu avoir le visa d’entrée alors qu’ils devaient changer d’aéroport (de Roissy à Orly). Arrivés à l’aéroport, ils ont été cueillis par la police des frontières.
Gentil, le commissaire comprit qu’ils étaient aussi inoffensifs que pouvait l’être un marabout de chez nous, encore pétri par la culture de la mesure et du détachement. Il décida de leur coller un flic qui aura pour mission de les accompagner partout jusqu’à leur départ pour Orly.
A un moment de la journée, Ould Abadi qui avait sympathisé avec le flic, lui passe un vieil exemplaire du Calame et lui propose de lire les Mauritanides de Habib. Pour ceux qui ne le savent pas, il s’agit d’une chronique où tout le génie de cet homme hors du commun, explosait.
Ould Abadi fut surpris de ne pas voir de réaction sur le visage du flic. Celui-ci finit par plier le journal et dire : «qu’est-ce que cela veut dire ?» Surprise chez le jeune Abadi qui n’en revenait pas. «Depuis ce jour, j’ai compris qu’il fallait être initié à notre monde pour comprendre ces écrits qui traduisaient merveilleusement bien notre réalité».
En l’écoutant, je suis resté au niveau du comportement de la police de l’aéroport. L’époque où l’on pouvait être compréhensif, cette époque est révolue. Essayez aujourd’hui de passer de Roissy à Orly sans visa… essayez déjà d’avoir un visa…, vous verrez combien les barrières sont devenues fortes… Là au moins, l’extrémisme a gagné son pari.
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