jeudi 10 mai 2012

C’est mieux comme ça


La Coordination de l’opposition démocratique (COD) a organisé une marche suivie d’un meeting… on va dire «qui a pris du temps», un meeting qui a duré le temps nécessaire pour permettre à tous les leaders et chefs de partis de dire ce qu’ils avaient envie à dire, pour permettre que tout soit dit. Sans discernement parfois, sans retenue souvent. Toute la nuit. Entre deux heures et trois heures du matin et après concertation, les chefs de la COD ont décidé de se retirer sans confrontation. La semaine d’avant ils avaient été «surpris» par l’offensive policière et préféré vider les lieux sans se battre.
Les explications données sont (très) recevables : en fait c’est pour éviter à la Mauritanie les dérives et les affrontements inutiles. Noblesse d’esprit à louer d’autant plus que tous les leaders ont répété cette explication des faits. Mais pourquoi ne pas avoir le même souci avant même d’enclencher le processus qu’on voulait déterminant pour le départ du pouvoir de Ould Abdel Aziz ? C’est là où l’opposition pèche.
Le «dégage» de Tunisiens – parce que c’est lui que nous empruntons – n’a pas fait partie des slogans des premiers jours. Si l’on considère que la «révolution tunisienne» - insurrection populaire qui a abouti à faire partie la tête du système – a duré un mois (du 17 décembre 2010 au 14 janvier 2012), on peut dire que le slogan «dégage» a été le leitmotiv des dernières 72 heures. On a commencé par des revendications de changement, d’amélioration, de pluralisme, de justice… et devant l’entêtement du régime qui n’a pas hésité à tuer pour réprimer, on est passé à la vitesse supérieure. Même démarche en Egypte…
Ici, les partis de la COD sont passés du stade de l’opposition «conciliante» ou «bienveillante» ou encore «constructive», vers le slogan «dégage». Trois qualificatifs pour utiliser une situation où les partis s’empressaient à rompre le processus du rejet du pouvoir issu des élections de juillet 2009, pour chercher à s’acoquiner avec lui plus ou moins franchement.
Si ces partis ont pour la plupart refusé de reconnaitre les résultats de juillet 2009, on a vu leurs leaders autour du Président Ould Abdel Aziz de juillet à décembre 2010. On les a entendus reconnaitre sa légitimité (et ou sa légalité), engager avec lui un rapprochement très rapide. Avant de les voir à nouveau virer pour aller le plus loin possible… et aboutir, dès les premières hésitations de la révolution, au slogan «dégage»…
Certains parmi les acteurs souhaitent voir le dialogue reprendre pour inclure ceux de la COD. Tous ceux qui l’ont exprimé appartiennent à des formations qui ne font pas partie du regroupement de l’opposition. Celle-ci ne l’a pas exprimé, d’aucune manière. Et si l’on s’en tient à ce slogan «dégage», la perspective d’une participation à un nouveau dialogue n’est pas envisageable.  Ce n’est pas pour autant qu’il faille rester à attendre de voir les protagonistes s’user sans faire quelque chose qui puisse faire avancer la situation.
Première urgence, mettre en pratique les lois fruits de l’accord entre les partis ayant accepté de participer au processus de dialogue de 2011. Mettre en place, et au plus vite, la Commission électorale indépendante consensuelle. Cette mise en place de la CENI permettra de déplacer le débat vers la participation ou non aux élections futures. A la place du slogan «dégage» qui bloque la situation politique aujourd’hui, il faut espérer une dynamique de discussions autour des garanties données sur la régularité des élections pour permettre une grande participation. Cette dynamique participera à désamorcer la tension entretenue actuellement en ouvrant des horizons devant les opérateurs politiques.
En attendant des mesures concrètes qui participeraient à l’apaisement de la scène, profitons de l’accalmie, résultat de la fin heureuse du meeting d’hier.

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