C’est ce lundi que le Représentant du Secrétaire général
des Nations Unies pour le Mali et commandant de la MINUSMA, cette mission des
casques-bleus déployée au Mali, a été reçu par le Président de la République
Mohamed Ould Abdel Aziz. Selon le responsable onusien, l’entretien a surtout
porté sur le processus politique engagé dans ce pays avec notamment la
perspective du second tour de la présidentielle. L’émissaire n’a pas mentionné
dans ses déclarations la question de la participation de la Mauritanie à la
MINUSMA, encore moins l’état du déploiement de la force et son rôle. Pourtant,
rien n’est plus sûr de ce côté.
Pour ce qui est de la participation mauritanienne, elle a
été compromise par les suspicions exprimées plus ou moins clairement par la
partie malienne.
Il y a quelques mois, le président par intérim Dioncounda
Traoré demandait à la Mauritanie de participer à l’effort de maintien de la
paix au Mali. Il réitérait cette demande lors de sa visite à Nouakchott en mars
dernier. Doléance à laquelle la Mauritanie répondait favorablement. S’en suivit
la préparation des troupes, par ailleurs très coûteuse.
Puis les Mauritaniens devaient apprendre par certains de
leurs alliés dans la région, que les Maliens ne souhaitaient pas les voir se
mêler de l’opération. Et surtout qu’ils n’entendaient absolument pas les
laisser se déployer dans l’aire de Tombouctou qui est a plus proche de la
frontière mauritanienne.
Quand en juin dernier, le Premier ministre mauritanien, Dr
Ould Mohamed Laghdaf et le chef d’Etat Major des Armées le Général de Division
Mohamed Ould Ghazwani sont dépêchés à Bamako, c’est pour en discuter et non des
des modalités du déploiement des 1800 hommes prévus par la Mauritanie. La
partie mauritanienne s’entend dire que ce déploiement ne peut se faire sur les
terres maliennes proches des frontières mauritaniennes. Une première
proposition indique Douentza, cette ville du pays Dogon, non loin de Mopti,
plusieurs fois cible des attaques terroristes durant la première phase de l’opération
Serval.
La logique développée par les Mauritaniens est simple :
pour être le plus efficace possible, les forces mauritaniennes auront besoin d’être
en contact avec leurs bases arrières pour assurer logistique et couverture. Aussi
est-il attendu que ce soit nos forces qui subissent le plus de pression de la
part de l’ennemi. Il n’est pas question de les envoyer sur un terrain inconnu,
en milieu hostile, loin de tout appui certain pour eux… Ce serait tout
simplement suicidaire.
Rien à faire, les autorités provisoires maliennes n’ont pas
voulu comprendre. La réaction des nôtres a été immédiate : renoncement à
participer aux forces de la MINUSMA. Puis ce sont les Nigérians qui, sous
prétexte de mener une guerre chez eux, ont commencé à retirer leurs forces déjà
déployées elles. Parce que les conditions fixées par les standards de l’ONU en
matière d’équipements de casques bleus et la manière avec laquelle les
autorités maliennes entendent diriger et encadrer les opérations n’augurent
rien de bon pour les forces déployées.
On s’attend dans les semaines à venir, surtout après les
opérations antiterroristes en Tunisie, à un reflux des combattants islamistes
vers le Nord du Mali, dans cette région située à la frontière du Niger, du
Mali, de l’Algérie…, à portée des bases arrières installées en Libye. Ce reflux
sera certainement suivi par une recrudescence des opérations de harcèlement
menées par les terroristes.
Les Français ne sont plus là sur le terrain, les Tchadiens
se retirent après avoir subi le plus lourd tribut, les forces de la MINUSMA n’ont
pas vocation guerrière…, alors qui va les défendre ? les forces Maliennes ?
les Sénégalais ? les Béninois ? …En plein désert et devant des unités
combattantes aguerries et déterminées, quelle armée régulière africaine peut
tenir ?
Jusque-là, la Mauritanie a bien réagi. D’abord en menant
une guerre préventive visant à éloigner d’elle la menace. C’était en 2010-11 et
12, quand tout le monde refusait de réagir. Cette expérience lui a permis une
remise à niveau de son Armée et le déploiement de plusieurs unités spécialisées
dans la lutte contre le terrorisme. Elle lui a permis aussi d’assurer le
contrôle de ses frontières. Quand la guerre du Mali a éclaté, elle a assuré à
deux moments : au moment où les bandes terroristes agissaient comme si aucun
Etat de la région ne pouvait leur tenir tête, et au moment où l’opération
Serval a été lancée, à chaque moment les combattants d’Al Qaeda ont évité de se
frotter aux Mauritaniens, comme si l’objectif pour eux était de ne pas leur
donner un prétexte d’intervention. Ils savent ce que cela leur aurait coûté sur
le terrain. Qui a peur de qui désormais ?