samedi 4 avril 2015

Qui trompe qui ?

Qui parmi les protagonistes politiques veut nous tromper ? qui d’entre eux cherche à tromper l’autre ? pourquoi d’ailleurs ce jeu à qui-est-le-plus-doué-pour-tromper ?
Il y a quelques semaines, le Premier ministre actuel remettait au Secrétaire permanent du Forum national pour la démocratie et l’unité (FNDU), une note qui reprenait ce qui pouvait être, aux yeux de la Majorité, l’ensemble des points devant être discutés entre les protagonistes politiques.
Le FNDU a alors lancé un débat intérieur au cours duquel deux tendances se sont affrontés dans un premier temps : celle qui voulait aller rapidement dans la logique du dialogue et celle qui entendait le refuser sans le dire officiellement, en posant des conditions préalables difficiles voire impossibles à satisfaire dans l’immédiat. Après une dizaine de jours d’intenses confrontations, parfois rendues publiques sur internet par militants interposés, les composantes du FNDU sont arrivées à une sorte de compromis qu’elles ont formulé dans une feuille de route où il est plus question de dicter la volonté du regroupement que de présenter un document qui peut faire l’objet d’un accord.
La proposition du FNDU, largement publiée par la presse dès son élaboration, comportait un schéma qui se déroulait sur trois phases : la première englobe les conditions exigibles du gouvernement pour donner le gage de sa bonne volonté, la deuxième énumérait une batterie de mesures à prendre par le gouvernement pour susciter la confiance, la dernière phase consistant à lancer le processus de dialogue autour des questions politiques essentielles.
Le voyage du Président de la République à l’intérieur a retardé la remise du document à la délégation de la Majorité dirigée par le Ministre secrétaire général de la Présidence, Dr Moulaye Ould Mohamed Laghdaf. Rendez-vous ne sera pris que jeudi dernier (2/4).
La mission du FNDU dirigée par Me Mahfoud Ould Bettah, président du pôle politique, devait juste remettre le document sans discuter de quoi que ce soit dans un premier temps. Visiblement – ou selon ce qui a été fuité par les milieux plus ou moins officiels du FNDU – la mission n’avait d’autre mandat que celui de la remise du document.
En face, la Majorité décida de rabattre son niveau de représentation. Ce n’est plus la délégation dirigé par le Ministre secrétaire général de la Présidence et comprenant le président de l’Union pour la République (UPR) qui va à la rencontre de la délégation du FNDU, mais des une autre composition de moindre importance protocolaire. Prétextes suggérés : ce n’est pas le président du FNDU qui vient et la délégation n’a aucune prérogative pour entamer les discussions.
Réaction du FNDU, la délégation n’ira pas au Palais des Congrès pour rencontrer celle de la Majorité. Deux informations divergentes arrivent du FNDU : la première explique que parce que la Majorité a décidé de minorer sa représentation, il n’est pas question d’aller à sa rencontre avec la même délégation ; la deuxième information nous apprend qu’il s’agit juste d’un rendez-vous reporté sine die pour des raisons objectives.
Si l’on prend en compte la première explication, force est de conclure à un blocage sérieux qui pourrait compromettre la suite des évènements. Si c’est la deuxième information qui est exacte, on espère à une reprise bientôt d’un processus qui n’a pas encore commencé. Les deux explications émanent de voix autorisées du FNDU (du chef du pôle politique et du secrétaire permanent). Alors ?
On en est là. Ce au moment où une troisième voix, celle du Président Messaoud Ould Boulkheir, vient rappeler que le dialogue ne peut être sans la Coalition pour une alternance pacifique (CAP), le pôle qu’il compose avec Wiam de Boydiel Ould Hoummoid et Abdessalam Ould Horma de Sawab. En réalité, le processus envisgé devait être à trois pôles : celui de la Majorité, celui du FNDU et celui de la CAP. Un peu une reprise du schéma de Dakar qui avait vu la Majorité discuter avec le Front national de défense de la démocratie (FNDD) et le Rassemblement des forces démocratiques (RFD) qui s’était taillé une place de pôle à part à lui seul.

On oublie souvent qu’à l’époque, le rapport de force était autre : le pouvoir issu du coup d’Etat du 6 août 2008 faisait face à une hostilité réelle de la part de la communauté internationale, il manquait de légitimité, et les acteurs politiques étaient déterminés à en finir. L’accord trouvé comportait aux yeux de ses artisans opposants – ou d’une partie d’entre eux (FNDD) pour être précis – les germes de son autodestruction. La date du 18 juillet comme jour d’élection ne pouvait être matériellement respectée. C’est ce qui explique les hésitations qui ont suivi et qui avaient pour objectif de trainer jusqu’à arriver au-delà des délais incompressibles. Quand on rappelle aujourd’hui le fameux décret de convocation du collège électoral pour en souligner le caractère frauduleux, on occulte volontairement que la date du 18 est spécifiée dans l’accord et qu’elle ne devait être changé sous aucun prétexte. On a cru tromper… on s’est trompé… ce qui arrive dans ce pays à tous ceux qui croient tromper...